Ile Maurice: Commémoration des inondations du 30 mars 2013 - Douleurs vives et plaies béantes

30 mars 2013 - 30 mars 2023. Cela fait dix ans que les inondations meurtrières ont emporté 11 personnes dans la capitale. Les familles se sont recueillies devant la stèle érigée à Port-Louis, non loin du tunnel du Caudan. Elles sont nombreuses à toujours pleurer les leurs partis trop tôt.

Cela fait presque dix ans qu'elle n'a pas remis les pieds au Caudan. Elle ne veut plus jamais fouler ce lieu qui lui a pris son unique enfant, Sylvia Wright-Fokeer. Elle n'arrive toujours pas à surmonter cette peine. «Tous les jours, je pense à elle. Je me demande pourquoi la vie me l'a prise.» Dans cette épreuve, Marie Fokeer n'est pas seule.

Faire le deuil reste difficile, et surtout en ce jour où l'émotion prend le dessus. «Mon roi s'en est allé. Aujourd'hui, il aurait eu 36 ans, Sûrement, il aurait déjà été marié, et m'aurait fait devenir grand-père», lâche Dhunputh Khoosye. Il n'arrive pas à retenir ses larmes. «Dans la vie, on ne peut pas contredire les plans de Dieu ; c'est sa décision et nous devons nous y faire...»

Penser à son papa, Rabindranath Bhobany, Jenita Bhobany le fait à tout instant. Même dix ans après, elle revit le déroulement des évènements avec la même appréhension. «Je me souviens que mon papa était allé travailler. Et nous suivions ce qui se passait à Port-Louis à la télé. Ce n'est que vers les 19 heures, sans réponse de mon papa, que nous avons commencé à être préoccupés. Son téléphone était éteint. Nous l'avons cherché durant la nuit et même le lendemain matin. Ce n'est que vers les 14 heures que nous avons appris que l'on avait découvert le corps de mon papa.» Le flash-back de cette journée cauchemardesque lui revient souvent à l'esprit. «Les mois qui ont suivi la perte de mon père ont été très durs pour nous...»

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C'est aussi le cas de Marie Hélène Henriette. Son frère, Stevenson Henriette, a également péri dans ces inondations. «Le mois de mars depuis dix ans est le plus pénible de l'année. Il n'y a pas un jour où je ne pense pas à lui, surtout quand je dois traverser le Ruisseau du Pouce. Et quand la pluie s'abat sur Port-Louis, je ne peux que penser au pire.» Elle se souvient avoir dit à son frère de ne pas se rendre à la capitale, ce 30 mars 2013. «Linn dir li pé rod enn la vi, li vini vit. Mais il n'est jamais retourné...»

Quant à Clementine Lai Kim, elle a mis cinq jours avant d'accepter le fait que son époux, Vincent Lai, ne passerait plus la porte de sa maison. «Je me souviens que je lui ai parlé une heure avant ces évènements. Il se trouvait à Port-Louis avec ma fille. Elle est allée acheter quelque chose à manger et mon époux est allé récupérer la voiture au soussol du Harbour Front.» Puis, tout est arrivé comme dans un film dramatique. «Ma fille m'a appelée pour me dire qu'elle ne voyait pas son papa et je suis sortie de Coromandel en direction de Port-Louis, le plus vite possible. Je n'ai pas cru quand on m'a dit que mon mari était mort dans le sous-sol. Dans ma tête, tant que je ne verrais pas son corps, cela voulait dire qu'il n'était pas mort.» Cinq jours après, elle a récupéré la dépouille de son époux...

En tout cas, Allan Wright - qui a perdu son épouse Sylvia et son fils, Jeffrey, - ne compte pas baisser les bras. Il continuera à se battre pour que justice soit rendue à tous ceux qui ont péri lors de ces inondations. «Les institutions existantes et celles qui viennent d'être créées, elles doivent revoir un peu leur structure. À tout moment, le danger est là. Le 6 mars dernier, on a eu peur à Port-Louis avec la montée des eaux.» Pour lui, il faudrait savoir d'où jaillit l'eau. «Même dix ans après, les autorités se doivent de prendre leurs responsabilités. Car plusieurs familles ont souffert. Mon combat est de sensibiliser le public car nous ne voulons pas revivre une telle situation à nouveau...»

Pour rappel, ces inondations ont fait six victimes dans le tunnel du Caudan : Sylvia Wright (46 ans) et son fils Jeffrey (18 ans), les frères Teewary, Amrish (24 ans) et Trishul (19 ans), Keshav Ramdhary (29 ans) et Vikesh Khoosye (25 ans). Vincent Lai (45 ans) et Rabindranath Bhobany (52 ans) sont morts dans le parking souterrain du Harbour Front. Stevenson Henriette (32 ans) et Retnon Sithanen (36 ans) ont péri au Ruisseau du Pouce. Et Christabel Moorghen, de Canal-Dayot, est décédée des suites d'un arrêt cardiaque, face à la montée des eaux.

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