Des chirurgiens du Comité international de la Croix-Rouge s'affairent à soigner les blessés par balle des conflits en cours dans la province du Nord-Kivu. Reportage.
Héritier est allongé de tout son long dans l'hôpital Ndonsho de Goma, chef-lieu du Nord-Kivu. Le regard hagard, la bouche grande ouverte, l'enfant de sept ans a auprès de lui son père, Pierre, depuis le 20 mars, date de leur arrivée sur les lieux.
"Nous étions en train de fuir les combats entre le M23 et l'armée congolaise, c'est à ce moment que mon fils a pris une balle perdue dans la tête", se souvient le père.
Après une journée de voyage sur un brancard puis sur une moto, Héritier est aujourd'hui tiré d'affaire, grâce aux chirurgiens du Comité international de la Croix-Rouge.
"Je me pensais morte"
Non loin de la chambre d'Héritier, Jacqueline Kabugho, la soixantaine, a échappé de justesse à l'attentat de l'église de Kasindi, le 17 janvier dernier, revendiqué par les Forces alliés démocratiques, les ADF, groupe extrémiste rallié à l'Etat islamique.
Ce jour-là, 14 personnes sont mortes. Jacqueline, elle, gravement blessée, a été brûlée à de nombreux endroits et sa jambe gauche a dû être amputée.
"Je me pensais morte, raconte Jacqueline à la DW. Mais avec les chirurgiens, les infirmières, les psychologues, m'ont demandé de garder patience, m'ont dit que j'allais m'en sortir, ce qui est le cas aujourd'hui."
Dans la salle de rééducation, Salomon dit s'être fait tirer dessus par un soldat congolais. Car dans le centre hospitalier de Ndonsho, le CICR reçoit principalement des blessés par balle, comme l'explique Anne-Kathrin Muller, la responsable du projet.
"Je dirai qu'il s'agit de 80% de nos blessés. Pour les autres 20%, ce sont des blessés à l'arme blanche ou encore à cause d'explosions de bombes ou de grenades, ce qui est rare. Les blessés le sont souvent au niveau des membres inférieurs comme supérieurs, ainsi qu'au thorax."
Violations des droits humains
Selon l'organisation, la structure de santé a reçu 260 blessés depuis le début de l'année, alors que 641 personnes avaient été admises en 2022, et 521 en 2021, avant la résurgence du M23. Tout en sachant que, les chiffres de l'année 2023 ne couvre pas les territoires de Rutshuru et certaines régions du Masisi, au nord-ouest de Goma, d'où les patients ne viennent plus.
Et si le CICR observe une augmentation des cas depuis le début de l'année, ces données viennent confirmer un rapport du Bureau conjoint des Nations unies pour les droits de l'Homme qui a observé une augmentation des atteintes aux droits de l'Homme dans la province qui représente 66% des violences dans le pays.