En Ouganda, la décision du gouvernement d'envoyer des troupes en RDC fait polémique. Le principal parti d'opposition, le FDC a demandé mardi au président d'expliquer aux Ougandais les avantages de ce déploiement.
Deux mille soldats ougandais seront déployés à l'est de la RDC sous la bannière de la force régionale est-africaine, chargée de superviser le retrait des rebelles du M23. Les soldats ougandais ne sont pas là pour « combattre » le M23, insiste Kampala, mais pour occuper, en tant que force « neutre », les positions laissées par le mouvement rebelle.
Un argument qui ne convainc pas vraiment le principal parti d'opposition. Pour l'opposition, c'est avant tout la mauvaise perception de l'Ouganda aux yeux des Congolais qui l'inquiète. « L'Ouganda et le Rwanda ont été accusés par la population congolaise de soutenir le mouvement du M23. Le fait d'envoyer des troupes de l'armée ougandaise dans ce pays les met en danger. Lorsque vous vous battez contre un ennemi et que les gens derrière vous vous attaquent également, cela risque de coûter la vie à beaucoup de soldats ougandais », craint Fungaroo Kaps Hassan, secrétaire national du FDC.
« Nous voulons des explications claires du président »
L'Ouganda a déjà des centaines de soldats en RDC, envoyés en 2021 pour lutter contre les rebelles des ADF. Kampala est aussi intervenu au Congo dans les années 90 lors de la deuxième guerre du Congo, et doit aujourd'hui payer des réparations pour les dommages causés par ses troupes.
Ainsi, Fungaroo Kaps Hassan craint un nouveau gouffre financier pour le pays. « Les contribuables ougandais n'ont pas encore fini de rembourser l'argent pillé lors de la précédente guerre et le gouvernement veut envoyer d'autres troupes au Congo pour créer de nouvelles conditions de pillage ? Nous voulons des explications claires du président Museveni pour justifier ce déploiement. Les forces armées ougandaises ne doivent pas devenir sa propriété personnelle », assène-t-il.
Plusieurs ténors du FDC se retrouveront ce mercredi dans la province de West Nile à la frontière avec la RDC pour préparer une motion au Parlement contre l'intervention ougandaise en RDC. Un meeting qui coïncide avec la visite du président Museveni dans la région.
Le chef d'état-major ougandais en RDC
Et pendant ce temps, le chef d'état-major de l'armée ougandaise, le général Wilson Mbasu Mbadi, est en RDC pour l'évaluation des opérations militaires en cours dans l'est de ce pays. De passage à Kinshasa, il a eu, durant deux jours, des échanges avec son homologue congolais et surtout avec le nouveau ministre congolais de la Défense, Jean-Pierre Bemba.
Le général Wilson Mbasu a présenté à Jean-Pierre Bemba la vision de son pays par rapport aux opérations dans l'est de la RDC. Très peu de choses ont filtré de leurs échanges. Cependant, une source militaire précise qu'un accent particulier a été mis sur les comportements à afficher par les troupes déployées dans les zones sous contrôle du M23, dans le territoire de Rutshuru dont Bunagana, Rwanguba ou encore Tchengerero.
Le général Wilson Mbasu a aussi présenté les principaux défis qui se présentent à ses troupes qui combattent aux côtés des forces congolaises dans le cadre de l'opération Shujaa lancée contre les ADF. Certains bastions de ces combattants affiliés au groupe État Islamique ont été détruits.
Cependant, les ADF sont toujours actifs, principalement dans la chefferie de Bashu, dans la partie sud du territoire de Beni, et le long de la frontière septentrionale du Nord-Kivu où ils tentent de se réapprovisionner et d'organiser des représailles contre des civils perçus comme des collaborateurs des forces congolaises et ougandaises. Ce mercredi débutera à Beni la grande réunion d'évaluation de la quatrième phase de ces opérations conjointes. Ces échanges seront déterminants sur les prochaines actions militaires dans la région.