Maroc: Macron, le Maroc et l'autre mémoire

Sébastien Lecornu, ministre des Armées et Patricia Mirallès, Secrétaire d'Etat en charge des Anciens combattants et de la Mémoire ont co-publié un article, dans les colonnes du journal français "Le Figaro", dans son édition du mercredi, concernant le projet de loi de programmation militaire pour les années 2024-2030, notamment l'article 11 relatif à la décision du président Emmanuel Macron de pérenniser les missions de l'ordre de la Libération.

Pour l'écrivain-journaliste Abdelhamid Jmahri, «l'article en question a été largement débattu et même célébré dans de nombreux médias français, après avoir été soumis au Conseil des ministres».

«L'article est lié à l'ordre de la Libération - Compagnons de la Libération, car il s'agit d'une institution créée par le général De Gaulle en 1940 à qui la France doit sa libération du colonisateur nazi. Les étrangers sont au nombre de 60 sur 1 038 inscrits sur une liste fermée et Macron veut faire revivre cette institution, déclarée éteinte le 12 octobre 2021, avec la mort de son dernier héros, Hubert Germain», estime-t-il dans un éditorial publié jeudi chez notre alter ego "Al Ittihad Al Ichtiraki", sous l'intitulé «Macron, le Maroc et l'autre mémoire : la mémoire de la libération entre Mohammed V et Charles de Gaulle».

%

«Ceux qui attendaient pour entrer dans le forum des camarades libertaires faisaient partie de ceux qui ont affronté le régime de Vichy qui soutenait les nazis et Hitler, et Mohammed V s'est distingué sur ce front en s'opposant aux régimes racistes envers les juifs marocains... Il avait 30 ans au moment où la guerre a éclaté», révèle le directeur de publication du journal "Al Ittihad Al Ichtiraki", avant de préciser que «cet article, écrit à quatre mains, n'aurait pas suscité beaucoup d'intérêt n'eût été le fait que le Maroc soit concerné moralement, dans le passé comme dans le présent, par cette question, surtout après la grande aura qui l'a entouré».

«Ce qui a poussé un ministre et une secrétaire d'Etat à signer un article élogieux mais tout aussi explétif sur la question», a-t-il noté, avant de poursuivre son analyse : «L'article des deux responsables ministériels considère que le moment de discuter ce budget, qui sera présenté aux députés dans les prochains jours, est un «moment de vérité», compte tenu de ce qu'il représente concernant les préparatifs français pour faire face aux «dangers qui guettent le pays»». Sur ce registre, le directeur de publication note que «puisqu'il s'agit d'un moment de vérité, nous pensons que la part de mémoire, d'histoire et du Maroc est aussi un moment de vérité auquel la France de Macron doit faire face».

Abdelhamid Jmahri

Le Roi qui a défendu la liberté de la France contre le nazisme est celui qui a gagné la liberté de son pays contre la France elle-même

L'article précise que le projet présenté dans le cadre du budget vise à faire revivre l'héritage des camarades de la libération qui ont rejeté le sort inévitable face au colonisateur nazi et la complicité honteuse du régime de Vichy.

«Dans ces deux cas en particulier, un grand Marocain et l'un des leaders de la liberté dans le monde entier, a triomphé pour les valeurs auxquelles la France veut redonner leur vitalité et en nourrir la société moderne, et ce grand et grand Marocain n'est autre que Mohammed V !», relève Abdelhamid Jmahri dans son édito. Et de poursuivre : «C'est un reniement des valeurs incarnées par les Compagnons de la Libération, de ne parler que des Français, ou de se contenter de faire référence aux "soldats africains" au sein du large spectre formé par les compagnons de l'Ordre de la Libération».

«Mohammed V a reçu la Médaille de Compagnon de la Libération en tant que roi du Maroc alors que son pays était sous occupation coloniale. Il est entré dans l'histoire française en tant que personnage remarquable dans le registre unique des pays d'Afrique du Nord colonisés, apparaissant sur toutes les cartes coloniales françaises en tant que seul roi dans ce système fondé sur les valeurs de courage, d'honnêteté, de respect des pays et de liberté. Son nom est le seul inscrit sur la liste des compagnons de la libération en tant que sultan, en plus bien sûr du roi du Royaume-Uni, George VI», estime l'éditorialiste.

«Mohammed V, qui a reçu la rare distinction de Compagnon de la Libération fait partie de la constellation de combattants pour la liberté, en particulier la liberté de la France. Il a dirigé son pays vers l'indépendance avec un esprit de lutte élevé, ce qui a fait de lui un leader de la lutte pour la libération de son pays», rappelle Jmahri.

«Le Roi qui a défendu la liberté de la France contre le nazisme est celui qui a gagné la liberté de son pays contre la France elle-même... Cette équation doit être examinée avec gratitude par la France et ceux qui adoptent ses vieilles tendances... Et avec humilité aussi !», conclut-il.

AllAfrica publie environ 600 articles par jour provenant de plus de 100 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.