Face à la «pénurie» persistante depuis plusieurs semaines, le gouvernement a autorisé, à «titre exceptionnel», la mise sur le marché d'une quantité de 20.000 tonnes de sucre en vue «d'atténuer» la «tension» constatée sur cette denrée en fortement consommée durant le Ramadan.
«Cette quantité de 20.000 tonnes de sucre importées du Brésil découle d'une autorisation spéciale du gouvernement», a expliqué Ahmadou Bamba Ndao, le directeur du Commerce intérieur, le lundi 3 avril 2023, lors d'une visite d'un entrepôt au Port autonome de Dakar (PAD). Cette marchandise importée sous une «autorisation spéciale» du ministère du Commerce devrait permettre de diminuer les prix du sucre qui ont flambé ces dernières semaines du fait d'une pénurie, en plein Ramadan.Mais pour combien de temps ? La consommation de sucre étant estimée à 25.000 tonnes durant le mois béni, l'Etat est appelé à prendre les devants pour éviter pareil scénario aux populations. Et, pour un approvisionnement correcte et permanent du marché, des commerçants, accusées souvent d'être à l'origine de spéculations sur le produit dont ils procéderaient à la rétention de stocks, en appellent à casser «le monopole» de sa commercialisation.
AMADOU TOUBA NIANE, COMMISSAIRE AUX ENQUETES ECONOMIQUES, CHEF DU SERVICE DU COMMERCE REGIONAL DE DAKAR
«Le Sénégal consomme environ 25.000 tonnes de sucre pendant le Ramadan»
Le Commissaire aux enquêtes économiques, par ailleurs chef de Service régional du Commerce de Dakar, Amadou Touba Niane, évalue à environ «25.000 tonnes» la consommation en sucre pendant le Ramadan. A l'en croire, le Sénégal consomme en temps normal et mensuellement17.000 tonnes de sucre, soit 204.000 tonnes par an. Pour cette situation exceptionnelle, le non moins responsable de la Communication à la Direction du Commerce intérieur précise qu'en «situation exceptionnelle» comme celle-ci (Ramadan et Carême "Ngalax"), la consommation est à environ « 27.000 tonnes». De ce besoin exprimé, l'offre intérieure annuelle (production de la Compagnie sucrière sénégalaise - CSS) se chiffre en moyenne à 145.000 tonnes. Le reste du gap à combler (des 204.000 tonnes), soit environ «60.000 tonnes est importé», a-t-il dit.
Pour ce qui est de l'approvisionnement correct du marché en sucre, il affirme que les livraisons sont en cours et que la plateforme livre en moyenne autour de 1000 tonnes par jour. A ce tonnage (les 1000 tonnes), viennent s'ajouter les 800 à 1000 tonnes livrées par le dispositif fonctionnel de la CSS. Tout ceci ? dira-t-il, «nous donne l'espoir que le marché du sucre sera bien approvisionné et dans les meilleurs délais».
OUSMANE SY NDIAYE, DIRECTEUR EXECUTIF DE L'UNACOIS/JAPPO SUR LA PENURIE DE SUCRE
«Le monopole doit être cassé»
L'Etat du Sénégal est entièrement responsable de la pénurie de sucre constatée ces derniers jours sur le marché, bien que le gouvernement ait autorisé, à «titre exceptionnel», la mise sur le marché d'une quantité de 20.000 tonnes de sucre, en vue d'atténuer la tension sur cette denrée en forte demande durant le mois de Ramadan et en cette période de fin de Carême avec les "Ngalax". Cette situation qui n'en est pas une, est la résultante de «l'impuissance de l'Etat» à casser le monopole du marché du sucre, octroyé à la seule Compagnie sucrière Sénégalaise (CSS).
Réprouvant cette option de l'Etat, Ousmane Sy Ndiaye, directeur exécutif de l'UNACOIS/JAPPO, trouve que l'Etat, par mesure de prudence et de sécurisation de son stock, devrait penser à ouvrir ce marché pour mieux garantir l'approvisionnement correct du marché. Encore, prévient-t-il, «si jamais l'usine venait à tomber en panne ou au pire des cas celle-ci (usine) venait à connaitre un accident industriel, comment l'Etat ferait face à cette situation ?». D'où, l'aberration d'entretenir «la dépendance de tout un pays à la seule production d'une industrie», déconseille-t-il.
Ce qui l'amène à dire que «l'Etat doit impérativement casser le monopole du marché du sucre, laissé entre les mains de la CSS». Pour lui, «Si le monopole continue, c'est parce que l'Etat a les mains liées à la CSS. Voila pourquoi, rien n'est fait, depuis toujours, pour réguler le marché du sucre».
Pour ce qui est de la consommation de sucre pour le mois de Ramadan, le directeur exécutif de l'UNACOIS/JAPPO l'estime entre 23.000 et 25.000 tonnes. S'agissant de l'approvisionnement correct du marché avec les 20.000 tonnes de sucre déjà importées, il donne des assurances. Le marché sera bien approvisionné en sucre. Il précise que les importateurs sénégalais sont en train de s'approvisionner, pour le mettre à la disposition des grossistes qui, à leur tour, vont organiser l'approvisionnement correct du marché.