Alors que les attaques semblaient baisser dans la région grâce aux efforts conjoints des pays côtiers et d'Etats européens, des actes de piraterie ont repris sur la route maritime cruciale bordant des pays riches en hydrocarbures, qui s'étend sur 5 700 kilomètres entre le Sénégal et l'Angola. Des bandes criminelles nigérianes sont à l'origine de la plupart des assauts décriés par la communauté internationale.
La dernière attaque en date a été perpétrée le 10 avril dans la voie de livraison essentielle. Elle est attribuée à « des personnes non identifiées » qui ont investi, à quelque 550 kilomètres au large de la Côte d'Ivoire, un navire-citerne immatriculé à Singapour. Selon les responsables de cette embarcation, vingt membres d'équipage de diverses nationalités se trouvaient à bord du Success 9 lorsque des individus sont montés à son bord.
L'Autorité maritime et portuaire de Singapour, qui a confirmé cette information, assure travailler en étroite collaboration avec le propriétaire du navire, de même qu'avec le Centre de coordination des secours maritimes de la région de Monrovia et le Centre de commandement et de contrôle de Changi de Singapour « pour examiner la situation et apporter l'assistance nécessaire ».
Outre cela, et pas plus longtemps qu'en mars dernier, des pirates se sont emparés d'un pétrolier danois au large de Pointe-Noire, en République du Congo, enlevant six membres d'équipage avant d'abandonner le navire. Il s'agissait du Monjasa Reformer, battant pavillon libérien, qui avait été attaqué par une embarcation de pirates alors qu'il se trouvait à 140 milles marins au large du port congolais.
Il avait fallu attendre près d'une semaine pour que le navire soit repéré par un drone patrouilleur français en haute mer, déployé par Paris dans le cadre de sa mission anti-piraterie Corymbe. Le constat qui a été fait est que sur les dix marins qui se trouvaient sur le Monjasa Reformer, trois blessés légers ont été pris en charge par un médecin militaire, mais aucun dommage n'a été constaté sur ce bateau de 135 mètres ni sur sa cargaison de carburant. Selon la mission franco-britannique MDAT-GoG (Maritime Domain Awareness for Trade Gulf of Guinea) et la marine française, ce sont cinq pirates qui avaient perpétré l'attaque.
Depuis 2021, les pirates mènent des attaques plus loin, dans les eaux internationales, selon les transporteurs. Leur violence et leurs techniques sophistiquées ont encouragé les entreprises du secteur à réclamer une présence navale étrangère plus importante, à l'image de la mission engagée il y a une décennie pour endiguer les attaques de pirates somaliens.
Appels à des patrouilles de navires de guerre
Réagissant à ces actes, Noel Choong, du Centre d'information sur la piraterie, émanant du Bureau maritime international, souhaite que des mesures drastiques soient prises pour endiguer le phénomène. « Il apparaît que les attaques graves se multiplient dans le golfe de Guinée. Nous espérons que davantage de navires de guerre internationaux équipés de moyens héliportés pourront patrouiller dans la zone », a-t-il déclaré.
Le Danemark, importante puissance de marine marchande via son géant Maersk, fait partie des pays qui ont contribué à la chute des actes de piraterie maritime. Ses autorités avaient envoyé une frégate dans le golfe de Guinée à l'automne 2021. Ce qui a fait qu'en 2022, seulement une vingtaine d'accrochages a été recensée dans la région, selon le Maritime information cooperation & Awareness center. Il y en avait eu 52 en 2021 et 115 en 2020, à en croire l'organisme d'expertise en sûreté maritime installé à Brest, en France.
L'Association danoise des armateurs estime que l'affaire du Monjasa Reformer montre que « les problèmes de piraterie au large de la côte Ouest de l'Afrique sont loin d'être résolus ». L'organisation de marine marchande s'inquiète notamment de voir les attaques repartir à la hausse, les armées occidentales se recentrant sur l'Europe avec la guerre en Ukraine. La plupart des agressions de ces dernières années sont menées par des malfrats nigérians qui se lancent à l'assaut des navires à bord d'embarcations rapides. Certains ont capturé de plus grands navires de pêche qu'ils utilisent comme base pour leurs vedettes rapides afin d'effectuer des raids plus loin en mer.
Dans le cadre de la lutte contre la piraterie maritime, un Nigérian, soupçonné d'être un pirate, a été reconnu coupable en février dernier par la justice danoise pour avoir mis en danger la vie de soldats lors d'une fusillade dans le golfe de Guinée. Les autorités danoises avaient rapatrié cet homme de 41 ans - qui se présente simplement comme « Lucky » - pour des raisons humanitaires puis l'avaient jugé pour des faits survenus dans les eaux internationales au large des côtes nigérianes. Il faisait partie d'un groupe de pirates ayant ouvert le feu, le 24 novembre 2021, sur un hélicoptère de la marine danoise qui patrouillait pour prévenir les actes de piraterie.