Il ne peut être question, en 1895, de demander au peuple malgache- divisé en groupes ethniques de niveaux culturels différents- encore attardé au stade du respect quasi religieux à un souverain, de légiférer, car il voyait mal combien la révolution coloniale allait bouleverser sa société » (Roger Pascal, docteur en Droit, 1965).
Politiquement, les populations malgaches ne sont pas éduquées. Les colonisateurs ne redoutent donc pas leur « turbulence ». Mais ils peuvent craindre que le suffrage universel ne soit tout simplement « confisqué » par les colons à leur profit. Ce qui rendra ainsi « impossible l'arbitrage de la Métropole entre eux et l'indigène ». En effet, les hommes politiques (français) de l'époque n'oublient pas que le suffrage universel établi en France en 1848, est accaparé pendant plusieurs dizaines d'années par les notabilités. « Ils n'entendaient alors pas leur sacrifier les intérêts des indigènes, tout en comptant sur les connaissances, l'énergie et les capitaux des colons pour mettre le pays en valeur ».
Le décret de 1909 assouplit toutefois cette pratique car les Malgaches, dont le genre de vie se rapproche des Européens, peuvent demander et obtenir la citoyenneté française avec les droits et les devoirs que comporte cet état. Plus tard, les progrès de la démocratie dans l'ile amène une évolution dans la représentation populaire. Car malgré leurs compétences, les gouverneurs généraux ont besoin de conseillers dont le rôle s'élargit progressivement avec la loi-cadre, de même leur recrutement. « Le gouverneur général, despote éclairé, contrôle par le Conseil d'État et le président de la République, devint pratiquement un vice-roi qui régnait. » Le Conseil d'administration, créé le 3 aout 1896, est initialement composé de hauts fonctionnaires qui donnent leurs avis sur le budget, les impôts et les demandes de concession, ainsi que sur les projets de textes intéressant l'organisation et le fonctionnement des services.
Par le décret du 2 janvier 1902, la composition du Conseil est « timidement » élargie : deux notables malgaches choisis par le gouverneur général sont invités à s'y joindre. Selon l'auteur de l'étude, la pacification des esprits, la volonté de progrès manifesté par les populations ainsi que « le sincère attachement à la France des Malgaches » doivent entrainer des réformes plus profondes. « Il était de plus en plus essentiel pour le gouverneur général de susciter une représentation indigène afin de ne pas se trouver seul face aux groupes de pression des intérêts européens. »
Le décret du 7 mais 1924 crée les délégations économiques et financières qui comprennent vingt-et-un Malgaches et quinze Français. A cette institution succèdent, le 25 octobre 1946, une Assemblée représentative et des Chambres provinciales chargées respectivement des intérêts généraux et de la gestion des intérêts provinciaux. L'institution du suffrage universel suscite la formation de partis politiques qui se refusent à voir « les aspirations populaires limitées à l'ordre et à l'enrichissement », tandis que les guerres coloniales accélèrent l'évolution politique. Le besoin de cette évolution est satisfait par la loi-cadre du 23 juin 1956. Celle-ci sacrifie la représentation de la minorité européenne par l'établissement d'un collège unique et constitue la fin du gouvernorat général remplacé par un haut-commissariat.