Congo-Brazzaville: Les souvenirs de la musique congolaise - Dissidences et dislocations des orchestres congolais de 1960 à 1970 (suite et fin)

Les dissidences et dislocations des orchestres sur l'échiquier musical congolais furent un phénomène qui connut une ampleur dans les deux rives du fleuve Congo, au cours des décennies 1960, 1970 et 1980. Ainsi, de nouveaux orchestres vont naître suite à l'implosion d'un noyau originel.

En 1969, Sam Mangwana, Dalienst et autres quittent le Vox Africa de Bombenga pour former le Festival de Maquisards, d'où naîtra plus tard le groupe Les grands Maquisards de Dalienst, Kiessé, Diana, Lokombé, Dizy Mandjékou, etc.

La décennie 1970 voit se multiplier des dissidences. Après son passage à l'Olympia, Rochereau se débarrasse de Roger Izeïdi par une simple déclaration à la radio et crée l'Afrisa International. Il sied de noter que ces dislocations ont diverses causes. Dans un premier cas, il s'agit souvent de la lutte pour le leadership.

C'est ainsi que pour échapper à l'ombre tutélaire de son frère aîné Maxime Soki, Emile Soki quitte l'orchestre Bella-Bella et crée le Bella Mambo. Gislain Makanga et Abeli Wangui désertent le Thuzaïna, déstabilisant ainsi le groupe. Dans un autre cas, la gestion des groupes et des fonds constitue la cause des scissions. Youlou Mabiala, Celi Bitsou et Fanfan abandonnent l'Ok Jazz pour monter le Somo-Somo, après un détour par Lovy du Zaïre de Vicky Longomba.

Mario, Djeskain et Saak Sakoul créent le trio Madjesi de l'orchestre Sosoliso après avoir quitté l'orchestre Vévé. Le départ en masse des musiciens de l'Afrisa International de Rochereau a pour conséquence de grossir le nombre des orchestres kinois tels que l'Afrizam de Ndombe Opetum, Willy Mbembe et Denis Lokassa. C'est dans ce cas que s'explique également le départ de Célestin Kouka, Pamelo Mounka, Kosmos, Théo Bitsikou, Passi Mermans et Edo Ganga des Bantous de la capitale pour les orchestres Le peuple du trio Cépakos et les Nzoïs.

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A côté des causes endogènes, il y a aussi celles exogènes. Il s'agit souvent de l'intervention d'une tierce personne dans la dislocation des groupes. Me Taureau, grand danseur et mécène, est à l'origine de l'éclatement de l'orchestre Fiesta du guitariste Faugus dont les transfuges Josky Kiambounkouta, Wuta Mayi... ont créé le Continental.

C'est le cas de Verkys, patron de l'Ecurie Vévé, à qui l'on attribue nombre d'implosions d'orchestres à Kinshasa par la soustraction d'un ou de plusieurs musiciens pour donner naissance à un nouvel orchestre. L'Ecurie Vévé fut à la fois une maison d'édition de disque appelée Editions Vévé, composée des groupes à qui Verkys octroyait des instruments de musique, groupes qui par la suite connaîtront des dissidences selon sa volonté. De l'orchestre Bella Bella, vont naître les groupes Lipua-Lipua, les Kamalés, etc.

Un phénomène qui fait du chemin

De même, l'orchestre Rumbaya des trois frères (Youlou Mabiala, Loko Massengo Djeskain, Michel Boyibanda) connaîtra le même sort après une période faste. L'on assiste à un éclatement en trois groupes: Youlou Mabiala crée le Kamikaze Loninguisa, Djeskain le Rumbaya international et Michel Boyibanda lance Ebouka système. Ce phénomène s'est amplifié avec l'irruption de nombreux orchestres sur la scène musicale congolaise depuis la seconde moitié de 1970 à nos jours.

Ainsi, du Zaïko puis Tout choc, Anti choc, Zaïko Langa Langa (noyau originel du clan Langa Langa) suite à une série d'implosions, vont naître des nouveaux groupes qui enrichissent la galaxie musicale congolaise tels qu'Isifi, Isifi Lokole, Yoka Lokole, Viva la Musica, Zaïko Wawa, Zaïko Familia dei, Langa Langa stars, Victoria Eleison, Choc stars, Anti-choc stars, Wengué musica 4x4, Wengué BCBG, Wengé Maison mère, Wengué El Paris, etc... qui constituent la troisième génération de la musique congolaise après 1970.

Hormis ces causes endogènes et exogènes, la gloire, le succès produit par les oeuvres, l'octroi de l'origine ou la paternité du groupe revendiquée par une tierce personne suite aux conflits qui en résultent sont aussi des causes qui conduisent inévitablement à l'éclatement. Le titre "Feu de l'amour" de l'album de JB Mpiana, par exemple, fait voler en éclats le Wengé Musica 4x4. Extra Musica n'échappe pas au démon de la division, le groupe original donne naissance à Extra Musica Zangoul, Extra musica International puis Extra musica Nouvel Horizon...

Ainsi va la musique sur les deux rives du fleuve Congo.

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