Ile Maurice: Gel des avoirs - Sur les traces du cuivre de Mauritius Telecom

La descente de la «Special Striking Team» dans l'entrepôt de Tradeway International Limited a remis cette compagnie au-devant de l'actualité. C'est d'ailleurs cette fonderie et recycleuse de vieille ferraille qui avait obtenu un contrat sous le règne de Sherry Singh comme CEO de Mauritius Telecom. L'occasion de suivre la route du cuivre qui nous mène à la zone industrielle de La Tour Koenig.

La zone industrielle de La Tour Koenig grouille de véhicules, mais pas de passants en ce vendredi. Et pour cause, c'est une région où l'air est lourd. La raison: la présence d'usines textiles, fabricants de barres de fer, de tuyaux et d'autres produits pour le bâtiment. Les habitations sont de l'autre côté de la route, soit au morcellement Rey en face et au morcellement Sagiterre plus loin. Gila Peeroo et Georges Brelu-Brelu du collectif Bien-Être, une ONG des forces vives qui se mobilise contre la pollution dans la région, nous ont donné rendez-vous pour suivre la route empruntée jadis par des camions pour transporter le cuivre vers l'entrepôt de Tradeway International Ltd.

À première vue, on voit une usine métallurgique; on passe ensuite devant un fabricant d'équipements en métal, pour arriver devant le chantier de la fonderie de Tradeway International. Les deux membres de l'ONG soulignent qu'avant on pouvait voir à l'intérieur. «Ils ont remplacé le fencing par des feuilles de tôle pour qu'on ne puisse pas voir ce qui se passe à l'intérieur. Il a fallu que le scandale de Mauritius Telecom éclate pour qu'on reparle de cette compagnie. En 2016 et 2017, nous nous sommes mobilisés contre cette fonderie qui tournait à plein régime et qui a causé une pollution avec des conséquences sur la santé. Des personnes avaient même été admises à l'hôpital à l'époque. Aujourd'hui, l'implantation d'usines lourdes se poursuit dans notre région sans que les habitants puissent faire quelque chose», regrette Gila Peeroo. Sa maison se trouve à quelques mètres d'une usine de métallurgie et elle est aussi proche de Tradeway.

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Selon Gila Peeroo, à l'époque, la fonderie était un pollueur. «Une fois face à nos protestations, un camion du ministère de l'Environnement était venu pour contrôler la qualité de l'air. Une fois ce camion parti, la fonderie a remis ses chaudrons en marche. Nous nous sommes mobilisés et il y a eu des changements. Mais le fond de notre combat reste contre l'implantation d'usines lourdes dans la région à proximité des habitations», soutient notre interlocutrice. Des émanations de souffre, l'odeur, la fumée et les dommages causés durant plusieurs années ont marqué toute une génération. Bien que sur place on ne sente pas l'odeur, l'atmosphère reste lourde. Même si la pollution n'est pas visible, la zone industrielle tourne à plein régime.

Lorsque nous arrivons devant la fonderie, le chantier tournait au ralenti avec de rares employés qui s'affairaient au dehors. On voyait quelques amas de métaux. Il faut savoir que la compagnie fait face à un ordre de saisie conservatoire de la Cour suprême dans une série de gels des avoirs liés à Sherry Singh. Cette entreprise est dirigée par Chaitanya et Siddarth Mittal ainsi que Deyendranath Persand, les directeurs de Tradeway International Ltd. Elle a par le passé fait face au courroux des habitants qui contestaient sa mise en place, l'opération de ses chaudrons, l'émanation de fumée et l'évacuation des eaux usées. Depuis quelques années, des dortoirs de travailleurs étrangers d'une usine de textile se trouvent à proximité de la fonderie. Comme par hasard, une plaque pour la construction d'un entrepôt pour matériaux de construction et de produits en métal est affichée.

Rencontres candidats ou élus

Pour en revenir à l'engagement citoyen, Gila Peeroo et Georges Brelu-Brelu ont plusieurs fois sollicité diverses autorités, les élus de la région et les médias pour faire front face à cette fonderie, mais sans succès. Les deux activistes trouvent ironique que l'on ne s'intéresse qu'au lien de Tradeway International avec l'affaire Sherry Singh. «Nous militons contre le tort que causent ces usines à proximité de nos maisons. Il y aurait eu CT Power avant, puis Tradeway International. Maintenant tant d'autres qui sont venus s'installer et le feront à l'avenir.»

Georges Brelu, lui, raconte avoir saisi la justice, envoyé des lettres et même sollicité des rencontres avec des candidats à la veille des élections ou des élus. Même s'il y a quelques questions au Parlement, la situation reste la même. Toutefois, il faut dire que les normes imposées aux usines qui polluent sont revues constamment et des capteurs de qualité de l'air sont présents et constatables en ligne. La compagnie, du fait de sa petite taille, a une licence de Pre-Environmental Report et n'a pas eu besoin d'Environnement Impact Assessment (EIA). En revanche, la période à laquelle les habitants ont fait face à cette pollution coïncide avec le monopole établi par Samlo Koyenco, quand la fonderie devait faire face au monopole et à l'interdiction d'exporter des vieilles ferrailles et du cuivre. L'entreprise devait alors récolter d'autres types de métaux pour la transformation.

Le lien de tradeway avec Mauritius Telecom

C'est en 2019, que Mauritius Telecom choisit d'octroyer un contrat à Tradeway International Ltd pour se débarrasser des câbles en cuivre de son réseau qui sera remplacé par de la fibre optique. Un contrat est ainsi alloué par Mauritius Telecom pour 8 000 tonnes de câble de cuivre sous l'ère Sherry Singh. Alors que la compagnie passe par une procédure ouverte d'appel d'offres, la descente de la SST présage une convocation prochaine car 22 tonnes ont été saisies lundi dernier. La police a ouvert une enquête.

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