Madagascar: Manie migratoire ou fuite de l'esclavage ?

Chez tous les peuples, à Madagascar comme ailleurs, les récits d'apparence historique commencent par la narration d'un déplacement humain collectif. A cette vérité plus ou moins évidente, deux administrateurs des Colonies, Raymond Decary et Rémy Castel ajoutent, cependant, que des opinions erronées sont émises sur la population malgache.

La question des migrations, en particulier, donne lieu à d'étonnantes erreurs dues à des « généralisations imprudentes ». Parmi celles-ci, les deux responsables français citent cette affirmation : « Les indigènes de Madagascar ont une soif dévorante de vagabondage. » Ou encore : « Les Antimos (Antemoro) qui habitent cette ile, paraissent être complètement dominés par une manie migratoire, dont souffrent également d'autres tribus. »

Selon les deux auteurs, la domination antankarana s'étend jusque sur l'Androna (région de Befandriana -Nord et de Mandritsara). Elle recule progressivement devant les Sakalava contre lesquels les Antankarana soutiennent des luttes acharnées. Les chefs et les principales familles sakalava sont, à l'origine, venus de la province d'Isaka, sur la côte Sud-Est. De leur côté, les Antesaka ont encore conscience de leur parenté avec ceux qu'ils appellent les Antesakalava.

Le groupe ethnique conquérant passe au sud des Hauts-Plateaux par le col du Midongy. Par la suite, ils se scindent en deux parties. La première s'établit dans le Mahafaly où les rois se disent d'origine Maroseranana, puis en Androy. La seconde branche franchit le Mangoky, se dirige vers le Nord où elle conquiert le Menabe puis, plus tard, le Melaky, l'Ambongo et le Boeny.

De Mananjary, les chefs Zafiraminia émigrent vers le Sud et fonde en Anosy un royaume dont la capitale est Fanjahira. Vers 1845, les Antanosy, à leur tour, pour échapper à la domination des Hova établis à Fort-Dauphin, vont s'installer dans Moyen-Onilahy et ses affluents de la rive droite. Ultérieurement, ils s'étendront sur la rive gauche dans la vallée du Savazy. La population bara, originaire de l'Itomampy, occupe provisoirement la vallée de l'Iondevo, puis celle de la Menarahaka, d'où elle chasse les Betsileo.

De là, elle envahit la vallée de l'Ihosy et, enfin, celle du Mangoky où elle se heurte aux Sakalava. En 1862, l'assassinat de Radama II détermine une insurrection à la suite de laquelle de nombreux Merina émigrent sur les limites orientales du pays sakalava Bemihimpa. « Il est difficile de les distinguer des Sakalava dont ils adoptent le genre de vie et même les modèles de... tatouages. »

Les Tanala, qui se réclament d'origine Zafindraminia, s'avancent vers l'Ouest à la suite des Bara. Ils émigrent par la haute vallée de l'Iantara, contournant l'Ivohibe par le Nord. Les Tanala émigrés portent le nom de Hovalahy Ny Antara, « mais ce nom est, en réalité, sans aucun rapport avec celui de la caste imérinienne.

Cette migration a lieu vers 1880. Hormis les immigrations comoriennes sur la côte Nord-Ouest, des Africains Makoa sont également introduits en quantité dans la Grande ile par les Arabes, au cours du XIXe siècle. Ces esclaves en provenance du Mozambique, sont, pour la plupart, débarqués dans les ports de Maintirano, Tambohorano et Baly. Ils sont libérés au cours du kabary du 20 juin 1877, de Ranavalona II. « Tous les Mozambiques qui sont venus dans mon royaume sont affranchis et deviennent sujets libres. »

En fait, Decary et Castel trouvent deux sortes d'immigration. D'une part, celles forcées et définitives, dont les causes sont la fuite d'une guerre ou d'un partage du royaume. Il y a aussi les ordres du roi pour la conquête d'un pays, le désir intense de s'affranchir d'une nouvelle servitude sociale, politique ou religieuse, l'appât du gain, le manque de terre ou plus exactement de l'espace vital, la famine ou la disette périodique, les « fady » et les tabous...

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