Sénégal: L'INEFJA fier de la réussite de ses élèves à Ziguinchor

Ziguinchor — D'anciens pensionnaires de l'INEFJA (Institut national de l'éducation et de la formation des jeunes aveugles) de Ziguinchor (sud) parviennent à faire de brillantes études dans différents établissements scolaires de la métropole du sud grâce à la socialisation" dont ils ont bénéficiée dans cette école spécialisée.

Créé en 2018, cet institut de formation érigé dans l'enceinte de l'école élémentaire lieutenant Alioune Badara Diallo de Ziguinchor, derrière le camp militaire Georges Boissy, reçoit chaque année une dizaine d'enfants âgés de six à dix-huit ans.

"Depuis sa création, nous avons seulement enrôlé 38 jeunes déficients visuels dont 8 filles, faute de place. Et tous ces enfants ont obtenu une meilleure socialisation", se réjouit le coordonnateur de l'INEFJA de Ziguinchor, Souleymane Guèye.

Malgré ce nombre réduit d'élèves non-voyants formés dans cet établissement, ses anciens pensionnaires se distinguent par leur réussite scolaire. Ceux qui sont orientés dans les écoles de Ziguinchor arrivent à sortir du lot avec de très bons résultats scolaires.

L'un d'eux, Moustapha Diallo, s'est imposé comme "leader dans son école, Ataba Tabar, à Ziguinchor", confie le directeur de cet établissement scolaire. Brillant élève, Diallo est actuellement le président du gouvernement scolaire de cette école. Cerise sur le gâteau, il vient de réussir son premier essai en classe de CM2, selon le directeur d'Ataba Tabar.

Michel Nassarlé a lui aussi tracé son chemin au collège Amical Cabral de Ziguinchor. Très bien apprécié par ses professeurs, il avait sauté la classe de cinquième pour s'inscrire directement à celle de quatrième.

"C'est un excellent élève. Son niveau avait dépassé la classe de cinquième. Cette année, en quatrième, Michel Nassarlé est premier de sa classe avec une moyenne de 18,58", confirme le coordonnateur de l'INEFJA de Ziguinchor, visiblement fier de son ancien élève.

Michel Nassarlé se dit animé par la volonté d'obtenir le baccalauréat pour devenir journaliste. "Mon rêve est d'obtenir mon bac et embrasser le métier de journalisme. Je veux vraiment être journaliste. C'est un métier qui me plait", insiste Nassarlé.

L'élève se dit aussi un amoureux du slam. "Pendant mes heures creuses, je fais du slam. J'ai même récemment participé à un concours de slam à Dakar", fait-il savoir.

Le coordonnateur de l'INEFJA de Ziguinchor cite aussi Astou Badiane parmi les anciens pensionnaires de l'institut. Cette dernière, selon ancien encadreur, est devenue aveugle "tout juste après avoir obtenu son Brevet de fin d'études moyennes (BFEM)".

"Elle faisait le tour des guérisseurs pour se soigner avec un comportement toujours alarmiste, car elle a accusé du retard à faire son deuil", se souvient Souleymane Guèye.

Finalement, elle intègre l'INEFJA en 2020. En fait, ses parents ne croyaient pas beaucoup aux enseignements de cet établissement dédié aux élèves non-voyants.

Pourtant, après un an de rééducation, Astou est réorientée au lycée Djignabo grâce au Service d'aide à l'intégration (SAI) mis en place par l'Inspection d'académie de Ziguinchor, "le bras technique de l'INEFJA", relève le coordonnateur de l'INEFJA.

"En seconde, Astou Badiane a obtenu une moyenne de 10,18. Et cette année, retrouvant le courage et l'intérêt pour les études au premier semestre de 2023, elle est première de sa classe avec une moyenne supérieure à 11", se réjouit-il.

Le cursus scolaire de Eureka Sambou a connu des perturbations à cause de son handicap. En 2019, elle est admise à l'INEFJA pour une rééducation. Elle est ensuite orientée au Centre sauvegarde de Ziguinchor, où elle est actuellement en classe de troisième année, dans la section couture. Eureka souhaite obtenir son diplôme et devenir formatrice pour aider les jeunes déficients visuels à s'orienter vers ce métier.

Neuf modules sont enseignés à l'INEFJA de Ziguinchor, dont la psychologie, la pathologie, l'anatomie et la compensation du déficient visuel.

Il y a aussi les techniques d'enseignement et apprentissage du braille aux primo arrivants, l'orientation et la mobilité appliquées aux disciplines académiques - observation et pratique pédagogique, orientation et mobilité en milieu ouvert : déplacement dans différents milieux - plan tactile avec différents supports, l'aide précoce, la basse vision, les aides optiques, la malvoyance, principes et adaptations pédagogiques dans une classe inclusive.

Un enseignement des sciences et de la géographie adapté aux déficients visuels et la psychomotricité et sports adaptés (torball, cécifoot, tandem) figurent aussi au programme.

Des pensionnaires de l'INEFJA sans familles d'accueil à Ziguinchor

"Certains enfants n'ont pas de famille d'accueil et d'autres n'ont pas [les moyens de prendre en charge leur] transport. Ils sont souvent exposés à des cas d'accidents", déplore le coordonnateur de l'INEFJA de Ziguinchor.

L'institut de formation est dépourvu de dortoirs pour les enfants qui n'ont pas de tuteurs à Ziguinchor et ne dispose pas non plus d'un bus de ramassage.

Le coordonnateur de l'INEFJA évoque par exemple le cas d'un enfant de son école qui a été récemment mordu à l'oreille par un chien et trois autres gravement blessés par des motos-taxis. Une situation à cause de laquelle il plaide pour un meilleur devenir des pensionnaires de l'établissement.

Aussi invite-t-il les autorités étatiques à doter son institut d'un bus pour assurer le transport des élèves. Il plaide également pour la construction d'un logement, le recrutement d'auxiliaires de vie scolaire pour un suivi dans les familles.

Souleymane Guèye souhaite aussi trouver des familles d'accueil pour les jeunes déficients visuels qui n'ont pas de parents à Ziguinchor, acheter des machines à coudre et ouvrir trois filières de formation professionnelle en tissage, en brosserie et en fabrication de canne.

Le coordonnateur de l'INEFJA affirme que l'inspecteur d'académie de Ziguinchor est "très engagé" pour la réussite du projet. Selon lui, il facilite la formation des enseignants et des encadreurs dans les écoles élémentaires, lycées et collèges. "C'est un ambassadeur dans le domaine de l'inclusion", souligne-t-il.

Souleymane Guèye, spécialiste en éducation inclusive, est diplômé de l'institut royal des sourds et aveugle de la Belgique (IRSA). Né en 1976 à Khombole, dans la région de Thiès, il a obtenu son baccalauréat à l'Acapes de Thiès, avant d'être orienté à la faculté des sciences juridiques de l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar. Deux ans après, il quitté l'université pour devenir enseignant.

Très engagé dans la recherche du bien-être des enfants déficients visuels, il avait séjourné en Europe pour suivre une formation, notamment à l'Institut royal des sourds et aveugle de la Belgique (IRSA).

"Ma motivation va dans le sens d'aider des jeunes qui sont laissés à eux-mêmes et qui ont les potentialités de réussir comme tout enfant", insiste-t-il.

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