Congo-Kinshasa: Rejeter coûte que coûte le statut de catastrophe humanitaire !

La Suisse prend en mai 2023 la présidence rotative du Conseil de sécurité des Nations Unies élargi, conseil constitué de 5 pays permanents et 10 pays non permanents. Elle succède de ce fait au Gabon. D'où, la visite de son Chef d'Etat Alain Berset en RDC, précisément à Kinshasa (où il a échangé avec son homologue congolais Félix Tshisekedi), à Bukavu (où il a rencontré notamment Dr Denis Mukwege à l'hôpital de Panzi) et à Goma (où il a visité des camps de déplacés de guerre).

Au cours de la conférence de presse co-animée avec Félix Tshisekedi le jeudi 13 avril, il a entendu ce dernier exclure toute possibilité de dialogue avec le M23. « _Il n'y aura pas de discussion avec les responsables du groupe armé (...) C'est au moyen de ce genre de dialogue que les gens qui manipulent ce groupe nous infiltrent pour créer des revendications fallacieuses pour nous attaquer », a-t-il déclaré.

Pays de référence en négociations délicates, la Suisse est comme avertie !

Faut-il encore que la RDC, elle-même, soit également suffisamment avertie des conséquences du statut de « catastrophe humanitaire ».

En effet, quand un pays se le fait coller, il perd certains droits. Dont celui, fondamental, de souveraineté. On l'a vu avec le Bengadesh, au Kosovo, en Ethiopie, en Somalie, au Soudan, etc. C'est ce qui a donné naissance au fameux droit d'ingérence humanitaire initié par Bernard Kouchner.

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Ce droit a pour singularité de soustraire de l'autorité établie la zone atteinte par l'insécurité humanitaire.

Quelle différence peut-on établir entre, par exemple, Darfour et Rutshuru car ayant les deux le même décor ?

Aucune. Donc...

On ne peut pas ne pas appréhender la catastrophe nationale que serait un Kitshanga ou un Djugu déclaré catastrophe humanitaire par le Conseil de sécurité des Nations Unies sur base, on s'en doute, des rapports entérinés notamment par la présidence rotative exercée par un pays membre permanent ou non permanent. Cas justement de la Suisse, après le Gabon.

Car ce sera la *consécration* de la balkanisation effective de la République Démocratique du Congo en ce que tout en croyant y exercer ses prérogatives régaliennes, le Pouvoir central sera bien obligé de négocier avec des pays donateurs et des institutions distributrices la nature des aides à faire octroyer aux populations qui risquent de croire plus à l'assistance internationale qu'à l'assistance nationale. D'ailleurs, il y a risque de voir les donateurs se passer carrément de la position du gouvernement.

Ce ne sera pas une première dans l'histoire de la RDC, à l'époque Zaïre. En 1994, à la suite de la guerre civile survenue au Rwanda, l'arrivée massive des réfugiés rwandais hutu au Nord et au Sud-Kivu avait ôté au Pouvoir central toute autorité sur l'assistance humanitaire destinée à ces deux provinces.

Kinshasa se retrouva à l'écart du dispositif sécuritaire et humanitaire mis en place par la communauté internationale, si bien que même ses revendications assises pourtant sur le droit international, dont celle de l'éloignement des réfugiés hutu (civils et militaires) à plus ou moins 150 km de la frontière zaïro-rwandaise côté Zaïre, avaient été ignorées. Et quand l'armée rwandaise avait mené ses raids sur les camps abritant ces réfugiés, ce fut la débandade totale. Le Président Mobutu neutralisé par la santé, le Gouvernement Léon Kengo wa Dondo fut isolé des tractations de la communauté internationale pour gérer la catastrophe humanitaire.

Ce précédent doit interpeller le Pouvoir central. Aucun coin du pays ne doit être concerné par ce concept. Car, au finish, on en viendra forcément à se demander ce que vaut un Pouvoir, un régime ou un gouvernement (c'est du pareil au même) qui cède une partie de son territoire aux humanitaires.

Il n'est meilleur aveu d'impuissance à gérer le pays que celui-là.

Dans cette perspective, la coïncidence entre le séjour du Président de la Confédération helvétique en RDC et la relance du schéma Berlin 2 par Paul Kagame en séjour au Bénin doit nous préoccuper.

En effet, quand on présente le Kivu en Suisse des Grands-Lacs, on n'y voit pas que la RDC. On voit aussi l'Ouganda, le Rwanda, le Burundi et la Tanzanie avec leurs lacs, monts, vallées, végétation, température, coutumes et us etc. semblables.

Comprenne qui pourra...

 

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