Le procureur général de la Suisse a inculpé un ancien Ministre de l'Intérieur de la Gambie pour des crimes contre l'humanité commis sous l'ancien régime autoritaire de Yahya Jammeh, a indiqué le gouvernement suisse dans un communiqué mardi.
Ousman Sonko est accusé d'avoir soutenu et participé à des « attaques systématiques et généralisées » dans le cadre d'une campagne de répression menée par les forces de sécurité contre les opposants de l'ancien Président Jammeh, a indiqué le Bureau du Procureur Général.
L'avocat de Mr Sonko n'était pas immédiatement disponible pour commentaire.
Mr Sonko a été Ministre de l'Intérieur de 2006 à 2016, date à laquelle il s'est réfugié en Suède, puis en Suisse, où il a demandé l'asile.
Il a été arrêté par la police suisse en janvier 2017 suite au dépôt d'une plainte par le groupe juridique Trial International, basé à Genève, et ce, en vertu du principe de compétence universelle qui permet le jugement des crimes les plus graves quelle que soit la juridiction où ils ont été commis.
Mr Sonko est détenu en Suisse depuis lors.
Le Tribunal Pénal Fédéral suisse statuera sur cette affaire à une date non précisée. Il s'agira du deuxième procès pour crimes contre l'humanité jamais organisé dans le pays.
« Nous sommes très satisfaits de la tenue de ce procès », a déclaré Mr Philip Grant, directeur exécutif de TRIAL International.
« Nous espérons que cela créera une dynamique irrésistible et que le procès poussera la Guinée Equatoriale à procéder à l'extradition de l'ancien Président Jammeh », a-t-il ajouté. L'ancien président de la Gambie s'est réfugié dans ce pays suite à une crise politique en 2017.
Les défenseurs des droits de l'Homme en Gambie ont salué l'inculpation de l'ancien Ministre de l'Intérieur.
Mr Sheriff Mohammed Kijera, du Centre pour les Victimes de violations des Droits de l'Homme, a déclaré que l'acte d'accusation constitue un précédent pour le gouvernement gambien, qui doit « prendre ses responsabilités pour traduire l'ancien Président Yaya Jammeh et ses hommes de main devant la justice. »
« Aujourd'hui, nous nous réjouissons que la justice puisse enfin traduire devant les tribunaux l'un des principaux auteurs de crimes contre les Gambiens, dont les victimes continuent de vivre dans la douleur et la misère », a déclaré Mr Madi Jobarteh, un militant des droits de l'homme.
La Gambie, minuscule pays d'Afrique de l'Ouest de 2,5 millions d'habitants, est encore sous le choc de plus de deux décennies de règne de l'ancien Président Jammeh, marquées par l'autoritarisme et des actes de violence présumés. L'ancien Président Jammeh a nié avoir commis ou commandité des crimes contre les droits de l'Homme lors de son règne.
Réactions des victimes
Mr Sheriff Mohammed Kijera, président du Centre pour les Victimes de Violations des Droits de l'Homme de la Gambie (Centre des victimes) a déclaré : « Le Centre des Victimes est profondément ému par la nouvelle de l'inculpation d'Ousman Sonko par les autorités suisses. C'est une bonne nouvelle pour le système judiciaire international et, selon toutes les indications, cela réaffirme une fois de plus qu'il n'existe aucun refuge, aucun abri pour les auteurs et commanditaires d'actes de torture dans le monde. Cela a créé un précédent pour le gouvernement de la Gambie, qui doit prendre ses responsabilités et traduire Yaya Jammeh et ses hommes de main devant la justice. »
Baba Hydara, fils de feu Deyda Hydara, le journaliste assassiné par les junglers qui agissaient sous les instructions d'Ousman Sonko, a déclaré qu'il se félicite de l'inculpation de Sonko, étant parfaitement informé sur les atrocités qu'il a commises pendant les 22 années de règne de Yaya Jammeh (1994 - 2016).
« Nous, les citoyens de la Gambie, saluons cette inculpation. Nous attendons avec impatience que justice soit rendue ».
Mr Pap Saine, cofondateur du journal The Point, a déclaré que l'inculpation de Sonko était attendue depuis six ans. Nous, les victimes de ses atrocités, attendions avec impatience l'inculpation de Sonko. Sonko était un assassin agissant sous les ordres de son patron, l'ancien Président Jammeh. Sonko mérite d'être puni pour les crimes qu'il a commis dans le passé.
« L'inculpation d'Ousman Sonko est une excellente nouvelle qui constitue un pas important pour la justice et la condamnation des crimes commis par le régime de l'ancien Président Jammeh à l'encontre des Gambiens. Oui, la courbe de la justice universelle est longue, mais elle se penche inéluctablement vers le triomphe du droit.
Après sept longues années, nous nous réjouissons aujourd'hui que la justice puisse enfin traduire devant les tribunaux l'un des principaux auteurs de crimes contre les Gambiens, dont les victimes continuent de vivre dans la douleur et la misère. J'espère que le procès durera beaucoup moins longtemps et que Sonko sera condamné à la peine maximale », déclare Mr Madi Jobarteh, militant des droits de l'homme en Gambie.
Demba D.A. Jawo : « La société civile et les défenseurs des droits de l'homme en Gambie ont salué la décision des autorités suisses d'inculper de crimes contre l'humanité un ancien ministre de l'intérieur sous la dictature de Yahya Jammeh. Le nom d'Ousman Sonko est apparu de manière assez négative dans pratiquement toutes les enquêtes sur les atrocités commises sous l'ère Jammeh.
Ses activités de torture et de harcèlement des opposants présumés au régime ont été mises en évidence par de nombreuses victimes du régime de l'ancien Président Jammeh lors des travaux de la Commission Vérité, Réconciliation et Réparations (TRRC) mise en place en vue d'enquêter sur les atrocités commises par le régime ».
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