Depuis le 15 avril, le Soudan est plongé dans le chaos. Sur place, nous avons pu entrer en contact avec un groupe de migrants. Parmi eux, des femmes et des enfants.
Pour assurer la sécurité de nos interlocuteurs, nous utiliserons des noms d'emprunt.
Bien qu'un cessez-le-feu ait été conclu entre les belligérants, dans la capitale soudanaise, les affrontements autour des lieux stratégiques se poursuivent.
Antoine est un Congolais qui vit au Soudan depuis une vingtaine d'années. Il a quitté son pays pour des raisons de sécurité. Il a essayé de se rendre au Japon pour rejoindre un membre de sa famille mais n'y est jamais arrivé.
Depuis, il a cumulé les petits boulots. C'est au moment de la pandémie que sa vie a basculé. Depuis, il n'arrivait plus à payer son loyer. Il a perdu son logement et a eu recours au Haut-Commissariat aux réfugiés.
Depuis le début des affrontements, ses conditions de vie ont encore empiré. Avec une centaine d'autres personnes qui ont des histoires quasi similaires à la sienne, la plupart des Congolais, Burundais, Ethiopiens et Erythréens, ils vivent dans un quartier de Khartoum.
Conditions de vie précaire
Antoine nous a expliqué que pendant plusieurs jours, ils n'ont eu ni à manger ni d'électricité. Ils vivent sous la menace des bombardements qui visent un camp des paramilitaires.
"Il y a des odeurs parce qu'il y a les corps des personnes qui sont mortes et qui jusqu'à présent n'ont pas été enlevées. Nous risquons d'avoir le choléra. Nous dormons à même le sol et certains dorment dans des conteneurs. Vous devez savoir que quand il fait chaud, le containeur chauffe aussi et vous ne pouvez pas résister et rester à l'intérieur. Il y a même des serpents à cet endroit où nous dormons. Il y a également beaucoup de moustiques. Le Haut-Commissariat aux réfugiés, ce n'est qu'une appellation, ici, le HCR n'existe pas ! Ce n'est qu'un nom. Ce sont plutôt les Soudanais qui nous viennent en aide. Nous n'avons aucune protection puisque nous sommes sous le contrôle des soldats de Hemedti. Il y a des balles perdues et puis, les ennemis aussi les attaquent. "
Comme Antoine, Bijou est Congolaise. Elle a quitté la République démocratique du Congo pour des raisons sécuritaires. Pour elle aussi, les ennuis commencent au moment de la pandémie. Aujourd'hui, comme les autres migrants de son groupe, elle espère une évacuation vers un autre pays mais pas chez elle, pas en RDC.
" Nous souffrons beaucoup ici. Heureusement, les militaires de Daglo (Mohamed Hamdane Daglo, ndlr) nous donnent un peu de pain et de quoi manger. Depuis que la guerre a commencé, nous sommes restés plusieurs jours sans manger. Grâce à eux, nous avons au moins de quoi manger de temps en temps. "
Situation toujours aussi préoccupante
Selon l'Onu, au moins 459 personnes ont été tuées et plus de4.000 blessées.
Prosper est originaire du Burundi, il vit dans le même camp qu'Antoine et Bijou et se dit préoccupé par les risques de propagation de maladies. Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), plus de 60% des centres de santé de la capitale sont fermés.
"Depuis que la guerre a commencé, nous sommes ici et personne ne nous aide. On nous a jeté ici, nous n'avons ni eau, ni nourriture et j'insiste sur le fait que personne ne nous aide. Là où nous nous trouvons, nous ne pouvons pas sortir, nous vivons une situation très difficile parce que nous vivons près d'un camp occupé par les militaires de Hemedti. A n'importe quel moment, on peut se prendre une balle perdue. En plus, ici, il y a des femmes et des enfants. Les avions larguent des bombes sur le camp, du coup, nous sommes vraiment dans une situation difficile."
Le directeur général de l'OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, a fait savoir qu'à Khartoum, 61 % des établissements de santé sont fermés et seuls 16% fonctionnent normalement.
De nombreux patients atteints de maladies chroniques, telles que les maladies rénales, le diabète et le cancer, n'ont pas accès aux établissements de santé ou aux médicaments dont ils ont besoin.