L'appel au dialogue du Chef de l'État peut marquer un tournant décisif dans la politique au Sénégal. Mais, alors que la société civile propose la désignation d'une personnalité indépendante pour piloter cette initiative, l'opposition maintient ses conditions.
L'appel au dialogue politique proposé par le Chef de l'État, Macky Sall, continue de susciter des réactions. Pour la société civile, cet appel est susceptible d'apaiser les tensions politiques et sociales. Pour des membres de la société civile, à travers le renouvellement de cet engagement à discuter avec les forces vives de la Nation, le Chef de l'État montre sa disponibilité à faire progresser la démocratie sénégalaise. Le Directeur exécutif de l'Ong 3D, Moundiaye Cissé, invite, à cet effet, les protagonistes du jeu politique à répondre favorablement à cet appel et à s'engager dans la voie de l'intérêt général. « J'estime que le Chef de l'État est dans son rôle. Maintenant, il faut joindre l'acte à la parole en désignant une personnalité consensuelle et en s'engageant à faire appliquer les conclusions consensuelles. J'invite l'opposition à y aller. C'est grâce au dialogue politique que nous avons pu obtenir et renforcer tous les acquis démocratiques », souligne-t-il.
Pour lui, ces concertations sont nécessaires dans un contexte de tensions politiques. Elles permettront d'aborder toutes les questions électorales et de bâtir de solides consensus. « Sans le dialogue, il ne peut pas avoir de réforme du Code électoral. Nous pensons que les recommandations de l'opposition regroupée au sein de la plateforme F24 doivent être intégrées dans les points de discussion, mais ne doivent pas constituer une condition pour participer au dialogue », a-t-il ajouté. Il propose également de désigner une personnalité neutre pour conduire ces concertations sur la base de son impartialité et son leadership. « Il pourra, précise-t-il, définir les termes de référence et encourager le Chef de l'État à appliquer les conclusions consensuelles issues de ce dialogue ».
Moundiaye Cissé encourage aussi les acteurs du jeu démocratique à éviter de tomber dans le piège de ceux qui ne trouvent pas leur compte dans ce dialogue entre les différentes forces vives de la Nation.
Consolider la démocratie
Cependant, à quelques mois du scrutin présidentiel de février 2024, des leaders de l'opposition n'ont pas manqué de poser des conditions pour la tenue de ces concertations. L'un des responsables du mouvement « Takhawu Sénégal », Moussa Taye, trouve prématuré de donner une suite à cette invitation faite par le Président de la République, lors de son adresse à la Nation du 3 avril dernier et renouvelée le jour de la korité. « Nous ne pouvons pas réagir sur la base d'une simple déclaration. Nous attendons de voir la suite. Le Chef de l'État, Macky Sall, a lancé une idée. Nous attendons d'être saisis officiellement en tant que parti ou coalition de partis pour réagir et donner notre position », a-t-il souligné, lors d'un entretien téléphonique.
Sa réaction fait suite à celle de Mamadou Mbodj, le coordonnateur de la plateforme F24, qui regroupe des partis de l'opposition et des organisations de la société civile. M. Mbodj a exigé le respect de certaines conditions telles la libération des « détenus politiques ». « F-24 a été mis en place et s'est assigné une mission très précise. L'élément premier de cette mission, c'est de dire que nous voulons obtenir du Président de la République (Macky Sall) qu'il renonce à présenter sa candidature pour un 3e mandat. Nous pensons que l'élément central du dialogue devrait tourner autour de ce point », a-t-il souligné dans une interview largement reprise par la presse.
La présidente du mouvement « Mimi 2024 », l'ancienne Première ministre Aminata Touré, a invité ses camarades de l'opposition à rejeter cette main tendue du Chef de l'État. Elle a considéré que c'est une tentative de division de l'opposition et de la société civile regroupée au sein de la plateforme F24.