Madagascar: Jimmy Hilarion Rakotonavory - « Le Balimanjôfo fait, gère et construit la société Tsimihety »

Ayant tout récemment décroché son doctorat en ethnomusicologie avec le thème « Harmonie constructive des Tsimihety à travers le bal Balimanjôfo » à l'école doctorale Thématique Lettres, Humanité et indépendance culturelle, de l'université de Toliara, une grande première dans le genre, Jimmy Hilarion Rakotonavory, musicien, chanteur compositeur et enseignant, se livre dans les explications plus terre-à-terre du « balimanjôfo ». Ses recherches ont obtenu la mention très honorable avec félicitations du jury.

Pourquoi l'ethnomusicologie d'abord pour en faire des recherches doctorales ?

La musique c'est toute ma vie. Elle m'a accompagné depuis que je suis tout petit. J'en ai créé un groupe, « LeJim415 » afin de marquer mon mariage éternel avec la musique. Le nom du groupe est tout simplement le diminutif de mon prénom et le code postal de Mandritsara, de là ou je viens dans la région Sofia. Mon thème de Maîtrise obtenue en 2009 est intitulé : « La musique dans la vie des Tsimihety, propédeutique à une ethnomusicologie » et d'un DEA à l'époque, portant sur « Le bal balmanjôfo ou bal poussière dans la région de l'Androna, pour quels regards sur l'Anthropologie ? » et le thème du doctorat est la suite logique de toutes ces recherches. J'ai toujours voulu apprendre et approfondir sur l'ethnomusicologie, la science humaine qui étudie les rapports entre musique et société. Aussi, ai-je étudié de près la société Tsimihety, dans laquelle je me noie et ses liens avec le genre musical « balimanjôfo ».

Pourquoi s'inscrire à l'école doctorale de l'université de Toliara ?

Ce fut un périple effectivement que de s'inscrire dans une école doctorale avec mon thème de prédilection. Je me suis inscrit dans deux universités déjà mais pour de nombreuses raisons, d'encadrement notamment, je me suis malmené pour m'inscrire. L'université de Toliara a la possibilité d'offrir des appuis dont j'avais besoin pour parfaire mes recherches et d'offrir la disponibilité des professeurs pouvant m'encadrer dans mes recherches. Victor Randrianary, mon directeur de thèse par exemple est un professeur au centre universitaire de recherches à Androy.

Que vouliez-vous démontrer dans vos recherches sur le bal « balimanjôfo » et la société Tsimihety ?

J'ai essayé de démontrer le rapport qui existe entre le genre musico-chorégrahique « balimanjôfo » en creusant dans la littérature sur la musique malgache, les instruments de musique et ce que ce genre musical produit comme effet, ce qu'il impacte sur une société, et spécifiquement la société Tsimihety. Le « balimanjôfo» que j'étudie, comportant la dimension de « bal », est à relier avec des rythmes déjà étudiés par d'autres chercheurs, Malgaches et Etrangers qui ont entre autres approfondi sur les « bals poussière ». Mon constat et mon vécu ainsi et les recherches ont alors établi que les « bals poussière » ou « balimanjôfo » dans la région Sofia sont toujours animés par des rythmes musicaux relevant de la culture traditionnelle, comme le « tsapiky » dans le sud malgache ou le « basesa » dans l'est, le « salegy » au nord. La musique accompagne toujours un événement, une fête et le « balimanjôfo » accompagne la vie des Tsimihety.

Quel est le rôle et quelle est la place du «balimanjôfo» dans la société Tsimihety ?

Malgré les apports modernes, le pays Tsimihety préserve aujourd'hui encore, la pratique musicale des ancêtres qui accompagne la vie des gens, de la naissance et jusqu'après la mort. Le « balimanjôfo » dans le pays Tsimihety serait né de la manière de danser des genres musicaux exécutés dans un terrain « manjôfo » ou poussiéreux. Il se déroule chaque année du mois d'avril à novembre durant la période sèche, sans pluie et privée d'activités agricoles importantes. Le « balimanjôfo » est la somme de toutes les pratiques musicales en pays Tsimihety. le terme prend tout son sens avec la montée de la poussière piétinée par la foule excitée par l'orchestre avec les styles musicaux d'origine Tsimihety Un « balimanjôfo » est un bal animé car invoque le mouvement, la danse en plein air avec de la poussière. Une fête n'est pas une fête sans un bal « balimanjôfo » et un événement n'est pas important, avec ou sans les autorités locales, s'il n'est pas animé par un « balimanjôfo». C'est devenu un rite. C'est l'ambiance créée, c'est les échanges économiques qui s'y installent dans les fêtes. C'est l'occasion pour les femmes et homme non mariés de trouver chaussures à leurs pieds. C'est une belle opportunité de rencontrer des familles, proches et amis. Le bal « balimanjôfo » orchestré par le groupe « Grand maître Tianjama » dans les années 70, a influencé la jeunesse Tsimihety de l'époque. Ses prestations musicales représentaient autant d'initiations pour les futurs musiciens et animateurs de « balimanjôfo » au nombre desquels je me comptais.

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