Considéré comme un secteur clé de l'économie, le bâtiment et les travaux publics (BTP) sont mis en difficulté par la hausse généralisée des prix qui, depuis plusieurs mois, rend le marché frileux. Mais le secteur doit aussi faire face à d'autres défis pour se relancer.
Le document sectoriel produit par la Chambre de commerce et d'industrie d'Antananarivo (CCIA) indique que le BTP, en termes de croissance du Produit intérieur brut (PIB), se démarque avec une contribution moyenne de 35,4%. Autre remarque faite, la population doublera d'ici 2040 et 20 % des habitants choisissent de résider en ville. Ces personnes auront besoin aussi bien de logements que de bâtiments pour développer des activités professionnelles. Le Grand Tana, avec ses trois millions d'habitants, éprouve un besoin de cent mille logements.
On signale, parallèlement, une hausse continue des entreprises opérant dans le secteur. De huit cent quatre-vingt-dix-huit en 2008, le nombre de sociétés dépasse aujourd'hui les quatre mille. Du côté du Syndicat des entreprises du bâtiment et des travaux publics (SEBTP), présidé par Hary Andriatefihasina, on note que le pays, face au défi de l'émergence, est appelé à mener un programme ambitieux d'infrastructures visant à le rendre plus productif et plus compétitif. Au coeur de ce programme, la réalisation d'infrastructures sociales (écoles, établissements sanitaires, équipements sportifs, logements...), économiques (infrastructures de transport, équipements énergétiques, constructions touristiques...) et d'importants travaux urbains (restauration des agglomérations urbaines, villes nouvelles...).
En tant que principal groupement d'opérateurs de BTP du pays, le SEBTP s'engage à contribuer efficacement à leurs réalisations pour le développement socioéconomique durable du pays. Pour ce faire, le groupement compte renforcer ses actions de promotion de la profession auprès des décideurs politiques, des bailleurs de fonds et de l'Administration.
Il engage notamment ses entreprises membres au renforcement de leurs capacités à prendre en compte la responsabilité sociétale (RSE) dans leurs activités, se renforcer sur le plan technologique et instaurer la formation permanente de leurs personnels. « Le SEBTP participe activement aux actions pour un dialogue public privé et un partenariat public privé fructueux dans les réformes structurelles pour la bonne gouvernance et l'amélioration du climat des affaires », a aussi précisé Hary Andriatefihasina.
En contrepartie, les entreprises membres du SEBTP souhaitent que le partenaire public prenne des mesures pour atténuer l'impact de la spirale inflationniste sur leurs activités. Elle aspire également à ce que les lourdeurs administratives qui retardent les paiements et pénalisent fortement les entreprises soient solutionnées rapidement. « La concurrence déloyale d'entreprises
étatiques mettant à mal le consommer local, nécessaire pour la relance de l'économie », est aussi vue d'un mauvais oeil par ces opérateurs. Les promoteurs immobiliers soutiennent, pour leur part, que le petit rebond qui pointe son nez devrait s'accompagner « de soutiens fiscaux pour améliorer la visibilité ».
Juguler l'inflation
Concernant la hausse significative des prix des matériaux de construction, les opérateurs du secteur expliquent que l'augmentation des prix au niveau des pays exportateurs, le cout du fret et la congestion du port de Toamasina ont alimenté ce phénomène. « Nous sommes encore dans un certain flou, mais nous espérons que la situation va s'éclaircir dans les prochains mois », commente Hanitra Ramanantsoa, gérante d'une entreprise spécialisée dans la construction de villas pour les particuliers.
« Le ciment proposé auparavant autour de 20 000 ariary coûte aujourd'hui plus de 30 000 ariary. Les prix ont nettement augmenté et la hausse touche pratiquement tous les produits. Le prix du fer 6 a été multiplié par trois en quelques mois », renchérit un quincailler. Un autre professionnel du secteur indique que la hausse est de l'ordre de plus de 30%. Elle confirme que la situation est problématique pour les chantiers qui sont en cours. Les travaux engagés peuvent présenter une fluctuation des couts allant de 30 à 50%. Nombreux chantiers ne sont pas achevés, faute de budget suffisant...
Mais ces opérateurs reconnaissent que la hausse des prix des matériaux de construction est mondiale. Toutes les régions du monde sont concernées. Les analystes, après avoir pointé du doigt les perturbations de la chaîne d'approvisionnement, dues à la crise pandémique, estiment maintenant que les tensions géopolitiques nées de la guerre russo-ukrainienne et la hausse des prix de l'énergie sont les nouveaux facteurs qui maintiennent les prix des matériaux de construction élevés.
Valoriser les matériaux de substitution
Mais en plus de la spirale inflationniste, force est également de constater que les matériaux de construction disponibles ne suivent pas la demande. Du côté du secrétariat d'État en charge des Nouvelles villes et de l'habitat (SENVH), on fait savoir que juste pour les 320 logements sociaux prévus pour le projet Tanamasoandro, le ravitaillement en briques et en bois de construction est devenu problématique. « Outre ceux fabriqués localement, l'importation de certains matériaux de construction coûte cher et ne sont pas toujours disponibles. Autant de difficultés à faire face en ce moment », fait-on aussi remarquer.
Parmi les solutions proposées pour remédier à cette situation de pénurie, figure la valorisation des matériaux de substitution. Les pavés autobloquants, les briques ou bétons produits à partir du recyclage de déchets en plastique sont ainsi appelées à être utilisés davantage. La production de ciment alternatif ou encore l'utilisation de coquilles d'huitre dans la composition du béton sont également proposées. Ainsi, plusieurs projets innovants devraient être développés prochainement. Aussi, assiste-t-on aujourd'hui à la montée en puissance des briques de terre compressée (BTC).
Obtenues par la compression de terre et de ciment, ces briques écologiques participent à la réduction de l'appauvrissement des sols des rizières. Plusieurs entreprises sont sur le créneau et disent répondre aux exigences techniques et environnementales des constructions modernes. De leur côté, les autorités ont initié une démarche de mise en place d'une norme malgache sur ce matériau de construction. C'est dans ce cadre qu'un programme de formation a été dispensé par le Laboratoire national des travaux publics et des bâtiments (LNTPB) en collaboration avec le cimentier Cementis (ex-Holcim).
Construire sa maison à Antananarivo
Mode d'emploi
Avoir sa propre maison, des milliers de foyers tananariviens en rêvent. L'Express de Madagascar vous propose un guide des étapes à suivre. Tout commence par l'élaboration de l'avant-projet, c'est-à-dire tout ce qui est préparation avant le début des travaux. Il s'agit de déterminer quel type de terrain vous correspond, le type de construction de votre future maison et le budget.
Ce sera ensuite le choix du terrain à bâtir. Cette démarche est nécessaire pour se projeter. Généralement, les offres sont plus abondantes en périphérie qu'au centre-ville. Il s'agit de localisation (distance par rapport au lieu de travail, commodités...). Le plus avantageux est d'opter pour un terrain viabilisé, c'est-à-dire raccordé aux voiries et aux divers réseaux (eau potable, téléphone, électricité...). Pour finaliser l'acte de vente et devenir enfin propriétaire de votre terrain, le rendez-vous chez le notaire est impératif.
Ce passage doit être précédé de la signature d'un compromis de vente ainsi que de l'acceptation du financement par la banque. Ainsi, le notaire peut délivrer une attestation de propriété, qui sera indispensable à l'ouverture du chantier. Pour ce qui est des frais de notaire, seule la valeur du terrain est prise en compte dans le calcul.
Pour le permis de construire, il faudrait produire les détails sur la maison à construire : emplacement, surface totale, mode d'évacuation d'eau, nombre de pièces... Plusieurs étapes doivent être franchies, ce qui peut prendre entre plusieurs semaines à plusieurs mois, afin d'obtenir un permis auprès de la mairie. Vous avez un délai d'un an, à compter de la délivrance du permis, pour la réalisation des travaux.
Pour constituer le dossier de demande d'un permis de construire, il faut un plan d'alignement, une demande manuscrite adressée au maire et au chef du fokontany, un certificat juridique de moins de trois mois, cinq plans topographiques, trois plans d'implantation, trois plans de la future maison. Lors du dépôt du dossier complet, l'on vous attribue un récépissé numéroté, dont les deux -derniers chiffres correspondent à l'année de dépôt.
VERBATIM
Gérard Andriamanohisoa, secrétaire d'État chargé des Nouvelles villes et de l'habitat auprès de la Présidence de Madagascar
« En plus d'être le socle du développement, le secteur du bâtiment est l'un des piliers de l'économie nationale. Le secteur immobilier maintient son essor continu, malgré le contexte de crise mondiale et l'onde de choc de flambée de prix à l'international, n'épargnant aucun secteur. Face à cela, l'État malagasy confirme sa volonté politique à faciliter l'accès de la population au logement décent. Pour ce faire, l'État se positionne en tant que facilitateur et met en oeuvre des mesures incitatives afin de favoriser une contribution plus soutenue du secteur privé. »