Afrique: Partenariat multilatéral - L'Afrique et l'Europe dessinent l'avenir des musées

29 Avril 2023

Un forum international a réuni, du 25 au 27 avril, 60 directeurs de musées venus de 38 pays d'Afrique et d'Europe. Pendant trois jours, ils ont dessiné l'avenir des musées et se sont engagés à renforcer leurs partenariats pour construire un futur commun dans une perspective de dialogue des cultures.

Repenser la muséologie. C'est l'ambition des directeurs de musée venus de 38 pays, dont 20 d'Afrique et 10 d'Europe, qui se sont réunis à Dakar, du 25 au 27 avril. Lors de ce conclave, qui leur a permis de dessiner l'avenir des musées, ils ont défini leurs priorités et posé les jalons pour créer un cadre d'échange et de collaboration. Trois thèmes étaient au menu des échanges : le renforcement de la capacité d'agir, le développement des expositions, la préservation et l'accessibilité des collections.

Ce forum a permis aux acteurs de constituer un réseau pour forger un futur commun, mettre en oeuvre un ambitieux programme de partenariat multilatéral entre les musées d'Afrique et d'Europe.

Guido Gryseels, vice-président du Comité de pilotage du forum, a salué cette belle initiative qui constitue, selon lui, un premier pas pour le renforcement des partenariats entre musées africains et européens. On s'est très vite aperçu que la plupart des interactions entre musées en Afrique et en Europe étaient basées sur l'histoire coloniale, qu'il n'y avait pas de réseau local et que beaucoup de directeurs africains ne se connaissaient pas.

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Très vite, on s'est aperçu qu'il y avait un besoin d'un réseau de directeurs africains pour pouvoir échanger de vues et développer des partenariats avec les musées européens », a expliqué l'ancien Directeur général du Musée royal de l'Afrique centrale, en Belgique. Le but de cette conférence, a-t-il indiqué, est de mettre tous les directeurs de musée autour d'une table dans un processus d'échanges entre professionnels de musées. Le patrimoine d'Afrique a longtemps été enfermé dans une vision ethnographique.

Ensemble, ces directeurs de musée se sont engagés à « mutualiser leurs efforts pour documenter, préserver et réinterpréter avec les communautés, les collections en Afrique et en Europe et à les mettre à disposition du public par la numérisation, la recherche, la pédagogie et les expositions ». De même, ils ont relevé que « le développement d'expositions itinérantes conjointes avec de multiples partenaires circulant en Afrique et en Europe est un instrument de transformation des récits qui construisent notre vision du monde et de promotion du nouveau partenariat dans lequel nous nous engageons ».

Ces ambitions sont, selon eux, source d'inspiration « pour construire un réseau durable en accord avec la gouvernance culturelle mondiale dans le domaine des musées tel qu'incarné par l'Unesco ».

REPENSER LA MUSÉOLOGIE MONDIALE

L'idée de base de ce forum, selon Hamady Bocoum, Directeur général du Musée des Civilisations noires de Dakar et président du Comité de pilotage, c'est qu'il fallait réformer le rapport muséologique entre l'Afrique et l'Europe, mais plus globalement repenser la muséologie mondiale. « Nous sommes arrivés à cette seconde globalisation, qui est de repenser la narrative dans nos musées, nos institutions, et surtout essayer de nous projeter pour un monde meilleur, moins conflictuel et plus consensuel, et cela se passe d'abord par l'esprit des hommes et les musées doivent jouer un rôle extrêmement important », a-t-il indiqué.

Les narratives, a-t-il expliqué, doivent être revisitées à partir des collections. Toutefois, a-t-il déploré, on a souvent tendance à penser aux collections qui sont dans les musées européens quand on parle de collection. Le Directeur du Musée des Civilisations noires a estimé que les collections africaines sont beaucoup plus vastes. « L'Afrique, c'est 6,5 millions d'années d'histoire et la colonisation fait partie de notre histoire, de notre patrimoine. Les collections pendant la colonisation font donc partie de notre patrimoine et on doit faire de telle sorte qu'il ne fasse pas un espace conflictuel, mais un espace de dialogue, de revisite, de déconstruction, de construction et de vérité », a préconisé M. Bocoum.

À son avis, « il ne faut pas seulement voir ces collections en termes d'élément de restitution, mais aussi de constitution ». Et l'Afrique, a-t-il laissé entendre, « ne doit pas rester dans la perspective de subordination ». Des recherches archéologiques doivent, à son avis, être menées et des collections d'art africain et contemporain réalisées. « Aujourd'hui, nous devons accorder une importance très particulière pour ce qui se passe dans l'Afrique contemporaine pour constituer des collections pour le futur », a indiqué Hamady Bocoum. Un accent particulier a également été mis sur la dimension itinérante des expositions. « On parle beaucoup d'unité de ce continent.

Il faut en avoir les instruments et moyens qui sont d'abord et avant tout culturels. La culture doit jouer un rôle très important et avec les expositions itinérantes, on peut démontrer des continuités culturelles qui peuvent aider à gommer des frontières culturelles. C'est un rôle que les musées peuvent jouer et avec nos collègues européens, nous avons l'ambition de développer des expositions qui peuvent nous aider à franchir ces frontières », a fait savoir Bocoum. L'autre dimension a trait au renforcement.

Car, a indiqué M. Bocoum, il y a encore du travail à faire pour transformer les narratives, développer des narratives prospectives, pour mieux se projeter vers le futur. « Nous avons un devoir d'introspection sur notre culture », a-t-il noté. Aujourd'hui, l'une des ambitions des directeurs de musée, c'est « d'oeuvrer pour que la muséologie puisse aider cette humanité globale à mieux se comprendre, à mieux échanger, que les musées africains ne soient pas seulement pour l'Afrique, mais pour recevoir et inviter le monde entier ». Ils comptent ainsi mettre en oeuvre un projet important avec l'appui des bailleurs pour « pouvoir poser les bases d'une collaboration durable et ouverte entre l'Europe, l'Afrique et le reste du monde ».

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