Dakar — Un groupe de recherche travaille à rendre accessibles par le biais d'une cartographie les fonds d'archives « très riches » du poète-président Léopold Sédar Senghor (1906-2001), lesquels ont été répertoriés un peu partout dans le monde, en particulier en France et au Sénégal, a-t-on appris d'une chercheure au Centre national de recherche scientifique (CNRS) français.
»Pour cela, un dialogue fécond est établi au Sénégal avec le musée Senghor et la fondation du même nom, les archives du Parti socialiste (PS) ainsi que d'autres lieux de conservation des manuscrits et des archives sur le premier président du Sénégal indépendant (1960-1981) », a expliqué Claire Riffard, mardi, à Dakar, lors d'une journée d'études axée sur le thème : « Relire Senghor à l'aune des archives ».
»Outre les deux grands pays qui portent la majorité des archives littéraires du poète-président Senghor, à savoir la France et le Sénégal, le groupe de recherche a aussi pisté des documents en Allemagne, aux Etats-Unis, notamment dans les universités américaines et dans les archives départementales de la Martinique », a ajouté la chercheure française au cours de cette journée d'étude tenue à la faculté des Sciences et Techniques de l'éducation et de la formation (FASTEF) de l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD).
Elle a expliqué que l'un des points sensibles de ce travail de cartographie des fonds d'archives, à savoir où les situer et les rendre disponibles pour le public, est l'accès à ces archives par accord pour la diffusion publique. La numérisation des archives sur Senghor serait une solution, de même qu'une mise en ligne sous réserve d'un accord des ayants droit, a indiqué la chercheure.
La numérisation « permet un accès à tout point du globe et nous l'espérons », sous la forme d'un « accès tout à fait gratuit et indispensable pour renouveler les études senghoriennes à la lumière des archives, l'objet de cette rencontre d'aujourd'hui », a-t-elle ajouté.
Elle a indiqué qu'à l'occasion de cette journée, le point sur les archives du poète-président a permis de cartographier l'existence de 28 fonds d'archives provenant de six pays. « Les fonds d'archives sur Senghor se révèlent très riches aussi bien en France, notamment aux archives de Verson en Normandie, à la bibliothèque nationale de France, aux archives de Nantes et d'Aix-en-Provence et dans d'autres institutions », a souligné Mme Riffard.
La chercheure du Centre national de recherche scientifique (CNRS) français a en outre soutenu que le contenu des archives permet d'entrer dans la poétique senghorienne. « Il y a, dit-elle, des découvertes à faire au sein des brouillons des poèmes de Lépold Sédar Senghor notamment dans celui dédié à la championne du 1500 mètres dame en 1974, +Le chant pour Yacine Mbaye+ où le mot wolof +Khéréer+ (qui renvoie à la couleur noire de la peau) a disparu dans la version éditée ».
« Il y a également des surprises quand on entre dans la complexité de l'écriture de Senghor. On connait Senghor traducteur des langues africaines vers le français, mais les archives montrent un poète traducteur de l'anglais au français, ce qui était, disait-il, une récréation poétique qui, l'on sait, a influencé et enrichi son écriture », a encore soutenu Mme Riffard.
Le professeur Mamadou Ba, coordonnateur de ce groupe de recherche, a souligné que le projet le plus important lié à ce travail est de faire « une édition de référence de tous les poèmes de Senghor ».
Ce groupe de recherche sur Senghor, composé d'historiens, de philosophes, de politistes, d'archivistes, de linguistes, de littéraires, entre autres spécialités, a été créé en octobre 2022. Il compte organiser tous les mois des séminaires et colloques avec des chercheurs venant de France, de la Suisse, du Canada, du Sénégal et des Etats-Unis « pour parler de sujets divers avec comme point central Senghor » et à la lumière des archives.