Burkina Faso: Béni ou banni ?

opinion

Quand je regarde toutes ces grimaces et autres gesticulations pour l'argent j'ai peur et pitié pour les gens.

Quand je les vois me dépasser en vitesse aux trousses du matériel, mon coeur se fêle, mais je ris du ridicule qui se laisse obnubiler sans scrupule. Il y en a qui ne pensent qu'à thésauriser au point d'oublier que la vie est une chaîne de montage qui fonctionne avec l'humain et à deux mains. Très souvent, c'est en fin de course que le forcené chercheur d'or se rend compte que le métal le plus précieux ne vaut et ne vaudra jamais l'homme. Beaucoup de fois, c'est après avoir tout accaparé que l'on se rend compte que la voracité et la cupidité sont de vilains défauts. J'ai vu des milliardaires agoniser pendant des années sans savoir se défaire de l'enfer sur terre.

J'ai vu des propriétaires de la planète Terre sombrer six pieds sous terre sans pouvoir emporter la moindre poignée de cette même terre. En vérité, nous nous battons parfois à mort pour avoir la terre entière à nos pieds, mais c'est cette même terre qui nous enterre tous au même titre que le clochard que nous dédaignions. Mais la vie n'est pas qu'argent ; il y a aussi les gens. La vie n'est pas que matérielle, il y a aussi le spirituel, et le spirituel n'est pas un fruit qui se cueille qu'à l'église ou à la mosquée. La vie elle-même est un grand temple où l'ignorance côtoie la connaissance sans savoir s'y frotter. La vie elle-même est un grand projet qui ne demande qu'à être réalisé, mais très peu pose la première pierre. Quand nous bâtissons, c'est pour nous rien que pour nous. Quand nous faisons des efforts, c'est pour notre coffre-fort rien que pour notre confort. Et on veut avoir le réconfort quand le tort franchit le portail d'acier de notre fort sans passer par la guérite.

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Et nous sommes surpris quand patatras le sort se jette dans nos bras et nous enlace avec ses ventouses. Il est écrit quelque part : « tu honoreras ton père et ta mère », mais combien ont déjà tout donné au géniteur sans matelas ni pull-over qui souffre de froid et d'émoi ? Combien se soucient plus d'eux que de leur capricieuse marmaille au chocolat ? Combien boudent la mère dépourvue pour choyer l'insatiable épouse qui traite sa belle-mère de coépouse ? Oui, et toi, combien de poulets et de bière avales-tu par mois et combien de francs envoies-tu par mois à celle qui t'a porté neuf mois, mais qui mange à peine deux fois par jour ? Il y en a qui ont construit une villa cossue pour déloger les parents encombrants et les mettre dans de « bonnes conditions » loin de toute affection. Chaque trimestre, ils vont voir la grand-mère ou le grand-père comme on va visiter un zoo. Ça fait mal quand on sait qu'on vieillira un jour.

Mais encore faut-il avoir la chance de vieillir ! A quoi sert d'envier le riche qui brille, mais triche avec le monde en fuyant toutes les nuits le fantôme de sa mère ? Il y en a qui revoient en plein jour cette mère en larmes et toute de blanc vêtue leur barrer le passage en plein embouteillage. Même dans leur rêve, elle les poursuit la main sur le sein, implorant tous les saints. C'est malsain, mais on vit avec le butin et on fait le malin dans un monde plus mu par l'envie que le besoin. Il paraît que c'est Dieu qui nous a créés, mais si tant est que cela soit vrai, il doit lui-même craindre sa propre créature.

Mais on ne parle pas de Dieu à quelqu'un qui a sacrifié le sang qui l'a irrigué et vivifié. On ne parle pas de Ciel à quelqu'un qui a déjà tout sur terre et croit que seule la Terre est son biotope. Au dernier étage de sa tour, il regarde le monde en plongée, mais il se rend compte qu'il ne vaut même pas une fourmi. La grandeur des vrais hommes n'est pas à l'aune de leurs avoirs, mais de leurs devoirs.

Et qui ne doit rien à personne n'aura droit à rien. Car il est aussi écrit : « donnez et vous recevrez ». La générosité est l'épargne des vertueux ; chaque largesse est un placement de sagesse qui nous revient en bien. Mais encore faut-il savoir que l'univers est un témoin patient et reconnaissant. Le jour où l'argent sera au service de l'homme et non le contraire, il saura que le respect est plus grand que la gloire. Il suffit de comparer le plus beau costume des grands jours avec le linceul de l'ultime voyage pour savoir que tout est vanité, vanités, des vanités. Entre les bénis ou les bannis, de quel côté es-tu ?

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