Madagascar: Secourisme - Les sapeurs-pompiers travaillent avec les moyens du bord

Les sapeurs-pompiers ont célébré leur journée mondiale, par une porte ouverte, hier. C'était l'occasion pour eux, de parler davantage de leur métier et de leurs missions.

Les sonneries d'urgence retentissent dans la caserne des sapeurs-pompiers à Tsaralalàna, au moment du déjeuner. Les secouristes de garde abandonnent leur repas et courent vers les fourgons d'incendie ou les véhicules de secours. Quand cette alarme sonne, ils doivent quitter la caserne dans les deux minutes qui suivent, le temps que les moteurs des véhicules chauffent, pour arriver le plus rapidement possible à l'endroit où un incendie ou un accident survient.

Leur objectif est de secourir et de protéger le maximum de personnes et de biens. Mais leur mission n'est pas évidente. Les soldats du feu font face à de nombreuses difficultés. Ils sont en sous-effectif, travaillent avec un matériel insuffisant, rudimentaire et obsolète. L'effectif des sapeurs-pompiers à Tsaralalàna, la plus importante unité de secours à Madagascar, par exemple, a été doublé en quelques années, selon le colonel Tiana Razafimanahaka, chef de corps des sapeurs-pompiers à Tsaralalàna.

Cette caserne fonctionne avec près de trois cent agents dont une centaine en cours de formation, pour une intervention d'incendie, trois interventions pour d'autres catastrophes, par jour, et trois cent interventions de prévention d'accident, par an. Cet effectif n'est pas encore suffisant. La Brigade de Sapeurs-pompiers de Paris est composée de huit mille agents, pour le même nombre d'habitants qu'Antananarivo.

%

Manque de matériel

En outre, l'insuffisance des bouches d'incendie limite la marge des manoeuvres des sapeurs-pompiers dans leur travail. Sur les deux cent quatre-vingt bouches d'incendie à Antananarivo, il n'y a que les 75% qui sont opérationnels. Ce manque de matériel, ce sous-effectif sont des problèmes communs des sapeurs-pompiers à Madagascar. « Des riverains se moquent de nous à cause des fuites d'eau sur les tuyaux et les citernes. », lance le colonel Charles Désiré, chef de corps des sapeurs-pompiers à Toamasina.

C'est en 2015 que cette caserne a été dotée, pour la dernière fois, d'une voiture d'intervention, grâce à l'appui d'un partenaire. En général, le matériel et les équipements des sapeurs-pompiers sont des donations. Les casernes des sapeurs-pompiers ne disposent pas de budget autonome, elles sont rattachées à la commune. Les sapeurs-pompiers ne semblent pas être importants pour les autorités.

Pour avoir des véhicules et d'autres équipements complets, pour entretenir les véhicules existants, pour disposer de tenus de protection, les casernes de sapeurs-pompiers doivent attendre des philanthropes. Par ailleurs, plusieurs villes ne disposent pas encore d'unité de secours à Madagascar, comme Moramanga, Ambatondrazaka, Mananjary, entre autres. Antsirabe, l'une des plus grandes villes de Madagascar n'a son service de protection, que cette année.

« Ce sont les habitants et les éléments de force de l'ordre qui s'entraident, en cas d'incendie. Souvent, les feux s'étendent et détruisent beaucoup de choses car nous ne sommes pas équipés pour maîtriser les feux, rapidement. », raconte une source à Mananjary. Les sapeurs-pompiers demandent la valorisation de ce métier noble. « Si on veut améliorer les choses, une école de pompiers doit être ouverte. Les sapeurs-pompiers doivent disposer de leur propre statut et de leur propre budget », propose le colonel Charles Désiré.

Adjudant-chef Lantoniaina Rakotomavo

« Rares sont les personnes sauvées en cas de noyade »

Le sauvetage en cas de noyades est l'une des plus difficiles tâches des sapeurs-pompiers. « Rares sont les personnes qu'on arrive à sauver, lorsqu'elles tombent dans l'eau. Malheureusement, la plupart des victimes décède », livre l'adjudant-chef Lantoniaina Rakotomavo. L'une des rares fois où il a pu sortir une personne vivante de l'eau, c'était en 2009.

« Cette personne a glissé, en se lavant dans la rivière, un après-midi. Elle s'est appuyée sur quelque chose, sous le pont, ce qui l'a aidée à ne pas se noyer», enchaîne ce plongeur. Selon ses explications, le cerveau d'un être humain n'arrive à fonctionner sans oxygène que cinq minutes. Avec la dizaine de minutes que les sapeurs-pompiers perdront en chemin, la chance de survie de la victime diminuerait. L'adjudant-chef Lantoniaina Rakotomavo invite, ainsi, les riverains, à faire attention aux rivières, à ne pas nager seuls, pour éviter la noyade.

Commandant Parfait Mamy Razafindrabe

« Je suis encore prêt à servir »

Le commandant Parfait Mamy Razafindrabe a intégré le corps de sapeurs-pompiers, en 1989, à l'âge de 21 ans. Il fait partie des soldats du feu qui ont éteint les incendies au Palais de la Reine à Manjakamiadana, en 1996. Cette intervention est, d'ailleurs, ce qui l'a le plus marqué dans ses nombreuses années de service. « Nous avons fait face à de grandes difficultés, le matériel, les ressources humaines et l'eau manquaient. Il a fallu que la Jirama intervienne pour nous approvisionner en eau. Il nous a fallu deux jours pour maîtriser les feux », se souvient-il.

Il est, en outre, le témoin de l'évolution de la caserne à Tsaralalàna. « Entre les années1990 et maintenant, il y a eu de grands changements. À l'époque, nous n'étions qu'une douzaine par équipe de garde, actuellement, nous sommes beaucoup plus nombreux. La caserne ne disposait que de deux véhicules, à l'époque. En ce moment, les matériels ont augmenté et se sont améliorés », témoigne-t-il. Le commandant Parfait Mamy Razafindrabe a encore quelques années de service avant la retraite. « Je ne vais pas arrêter, avant. C'est ici que j'ai passé toute ma vie. Je suis encore prêt à servir mes compatriotes », lance-t-il.

Sergent-chef Henri Randrianirina

« Des riverains nous ont jeté des pierres »

Des sapeurs-pompiers font, parfois, face à des riverains « hostiles ». Comme le témoigne le sergent-chef Henri Randrianirina, assistant au service de prévention, ils leur arrivent d'être hués ou agressés pendant les interventions. « Une fois, nous sommes arrivés sur un lieu d'incendie. Les badauds nous ont jeté des pierres, en nous accusant d'arriver trop tard », témoigne-t-il. Les sapeurs-pompiers affirment pourtant que lorsque l'existence d'une catastrophe est vérifiée, ils quittent la caserne tout de suite. « Le délai du trajet ne dépend pas de nous, mais de ce qu'il y a sur le trajet », enchaîne le sergent-chef Henri Randrianirina. Il déplore également le manque d'intérêt des riverains pour les sapeurs-pompiers. « Nous avons effectué une sensibilisation au niveau des fokontany. Mais cela n'a intéressé personne », regrette-t-il. Il invite les riverains à coopérer avec les sapeurs-pompiers, dans la prévention des accidents.

Stagiaire Tsikinambinina Rakotonomenjanahary

« Les femmes ont leur place chez les sapeurs-pompiers »

Cela fait dix mois que Tsikinambinina Rakotonomenjanahary suit des formations pour intégrer le corps de sapeurs-pompiers. En dix mois de stage, elle confirme sa motivation à exercer ce métier, qui a été considéré pendant très longtemps, comme un métier d'homme. Cette jeune femme tient à prouver que les femmes peuvent exercer ce métier, sans difficulté. « On ne reconnaît pas que je suis une femme pendant les interventions, avec les combinaisons de protection que je porte. Une fois, j'ai assuré seule, le transport du matériel, très lourd. Lorsque l'intervention s'est terminée, j'ai enlevé mon casque, et les personnes qui étaient là ont été toutes surprises », raconte-t-elle. La caserne de sapeurs-pompiers à Tsaralalàna a recruté vingt-deux femmes pour étoffer son équipe. Le colonel Tiana Razafimanahaka, chef de corps des sapeurs-pompiers à Tsaralalàna, affirme que les femmes ont leur place chez les sapeurs-pompiers.

AllAfrica publie environ 500 articles par jour provenant de plus de 100 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.