Congo-Brazzaville: Concession RVA-Ndolo - Des députés nationaux accusés de soutenir la spoliation d'une partie de l'emprise publique

L'Association congolaise pour l'accès à la justice (Acaj) demande aux gouverneur et au vice-gouverneur de la ville-province de Kinshasa d'ignorer l'ordre manifestement illégal de l'Assemblée nationale et de poursuivre, sans désemparer, la démolition des constructions anarchiques sur les emprises publiques.

L'Acaj se dit vivement préoccupée par des informations faisant état du bénéfice par des opérateurs économiques étrangers spoliateurs de quatorze mètres de l'emprise publique attenante à la concession de la RVA/Ndolo, du soutien actif et incompréhensible de deux députés nationaux, membres de l'Union sacrée de la Nation (USN). Ces élus seraient intervenus pour faire suspendre la démolition entreprise le 3 mai des constructions anarchiques par l'Hôtel de ville de Kinshasa. « Les deux députés nationaux dûment identifiés ont, sur ordre d'une personnalité dont l'Acaj se réserve le droit de divulguer l'identité ultérieurement, fait tenir une réunion urgente de la Commission de l'environnement de l'Assemblée nationale, le 4 mai 2023, au cours de laquelle le vice-Premier ministre, ministre de l'Intérieur et Sécurité, a été interpellé sur ladite démolition, jugée illégale par l'Assemblée nationale », a souligné l'Acaj.

Pour elle, ces députés, forts de l'appui intéressé d'autres personnalités politiques, ont exigé et obtenu, en violation des lois dont ils sont pourtant dépositaires, l'annulation pure et simple de la démolition desdites constructions anarchiques. « Ce qui enfreint, de manière délibérée, la loi sur la libre administration des provinces et d'autres instruments juridiques nationaux pertinents », a rappelé cette association.

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Pour l'Acaj, face à cette situation, l'Assemblée nationale a cessé d'être le creuset du slogan « Le Peuple d'abord », pour consacrer une justice à deux vitesses : sévère à l'égard des pauvres et complaisante pour les riches. « Pourquoi cette subite prise de conscience de l'Assemblée nationale lorsqu'il s'agit d'une démolition concernant un opérateur économique expatrié, alors que dans le même contexte temporel, plusieurs opérateurs économiques congolais ont été victimes de cette opération salutaire des autorités urbaines sans émouvoir l'Hémicycle ? », se demande l'Acaj. A son avis, visiblement, la défense des intérêts privés a primé sur ceux de la collectivité. L'Acaj est indignée de constater que les étrangers, pompeusement présentés comme opérateurs économiques, se comportent en conquérants et prédateurs sur le sol congolais et obtiennent, à coup d'argent sale, tout ce qu'ils ne peuvent se permettre dans leurs pays d'origine. L'association se dit également scandalisée par le silence du gouvernement central, « qui a pourtant l'obligation constitutionnelle de protéger le patrimoine foncier et immobilier de l'Etat et de combattre la corruption ainsi que le blanchiment des capitaux qui sous-tendent tous ces projets dits de développement et de modernisation du patrimoine de l'Etat ».

A cette allure, précise l'association, si les mesures idoines de sauvegarde ne sont pas initiées, le Congo risque de se retrouver, dans quelques années, privé de tout son patrimoine foncier et immobilier à cause de la boulimie financière de ses dirigeants. « Et la postérité ne pourra que constater les dégâts profonds causés par l'inconscience et le manque de patriotisme des gouvernants d'hier et d'aujourd'hui, toutes tendances confondues », a-t-elle appuyé.

Une action pour arrêter la descente aux enfers

Relevant la complicité avérée de plusieurs personnalités politiques, administratives et judiciaires dans cette maffia foncière et immobilière, l'Acaj pense qu'il revient, d'une part, aux citoyens et organisations de la société civile de se mobiliser pour systématiquement documenter ces faits de spoliation, de prédation et de blanchiment de capitaux qui prennent des proportions inquiétantes, surtout à la veille des élections et, d'autre part, d'en assurer dès maintenant un plaidoyer actif auprès des Nations unies, des Etats-Unis d'Amérique et de l'Union européenne pour faire prendre des sanctions ciblées contre les dirigeants et/ou personnalités politiques ainsi que les opérateurs économiques véreux qui tirent politiquement et/ou financièrement profit de ces actes de spoliation et de prédation, qui hypothèquent gravement, non seulement les efforts de construction d'un État de droit et démocratique au Congo, mais également condamnent à la désespérance les générations futures. « L'Acaj est d'ores et déjà engagée dans ce processus de plaidoyer et de dénonciation », a avisé cette organisation, demandant au demeurant à l'Assemblée nationale de revenir aux bons sentiments. « Si elle n'en est pas capable, elle a l'obligation de demander au gouvernement d'indemniser tous les Congolais lambdas victimes de démolition des constructions anarchiques dans la ville-province de Kinshasa. L'égalité de tous devant la loi constitue le socle essentiel de la démocratie », a souligné cette organisation.

Elle demande, par ailleurs, aux gouverneur et vice-gouverneur d'ignorer l'ordre manifestement illégal de l'Assemblée nationale et de poursuivre, sans désemparer, la démolition des constructions anarchiques sur les emprises publiques. « C'est ça travailler pour "Le peuple d'abord" », a fait savoir l'Acaj, qui prie le secrétaire exécutif de la Cellule nationale de renseignements financiers d'enquêter sur les faits de blanchiment des capitaux qui couvent la spoliation du patrimoine foncier et immobilier de l'Etat.

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