Des attaques violentes et la discrimination entravent l'enrôlement des électeurs dans l'est
Le 24 avril, la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI) en République démocratique du Congo, a conclu le processus national de mise à jour des listes électorales en vue des élections générales prévues pour décembre 2023. Mais lorsque les citoyens se sont rendus dans les centres d'enrôlement, certains ont été confrontés à de la violence et à des discriminations.
À Goma, Bukavu, Nyagenzi et Uvira, dans l'est du Congo, des groupes de jeunes ont menacé et passé à tabac des Banyamulenge - des Tutsi congolais de la province du Sud-Kivu - et leur ont temporairement refusé l'accès aux centres d'enrôlement en raison de leur ethnicité.
Human Rights Watch s'est entretenu avec des victimes, des témoins et des leaders communautaires qui ont confirmé les incidents, y compris les attaques de « Wazalendo », des groupes de jeunes mobilisés pour défendre leurs localités contre les groupes armés au Sud-Kivu, y compris les rebelles du M23.
Depuis la recrudescence, en 2022, des attaques commises par les rebelles du M23 soutenus par le Rwanda, les parties au conflit font de plus en plus appel aux loyautés ethniques, suscitant une vague de discrimination à l'encontre des Banyamulenge et des communautés tutsies, que beaucoup au Congo considèrent comme des partisans du M23.
Un homme Munyamulenge nous a raconté que des Wazalendo l'avaient passé à tabac, lui ainsi que trois de ses amis, alors qu'ils allaient s'enrôler dans un centre à Uvira le 17 février. « Ils m'ont blessé aux bras, frappé avec des clous. Ils nous ont dit : "Les Banyamulenge sont des Rwandais, ils ne vont pas se faire enrôler" ». Il a finalement pu se faire enrôler après l'arrivée de la police. Un membre du personnel de l'université de Nyagenzi a déclaré être rentré chez lui après que les Wazalendo lui ont jeté des pierres alors qu'il allait s'inscrire. Il s'est finalement enrôlé après l'arrivée de la police, quatre jours plus tard.
L'accès aux centres d'enrôlement est essentiel pour que les citoyens puissent obtenir leurs cartes d'électeurs, un document indispensable pour voter et qui est également utilisé comme pièce d'identité au Congo.
Alors que les élections approchent et que la crise dans l'est du pays se poursuit sans relâche, les attaques contre les Banyamulenge et les Tutsis risquent également d'interférer avec d'autres processus nationaux, dont le recensement de la population et le processus d'identification, tous deux attendus depuis longtemps.
Les autorités congolaises devraient garantir la tenue d'élections inclusives, sans crainte de discrimination ou d'intimidation fondées sur l'appartenance ethnique. Elles devraient mettre en oeuvre des campagnes globales de sensibilisation des électeurs visant à prévenir la discrimination basée sur des critères ethniques, appliquer la loi de manière impartiale et poursuivre de manière adéquate tout individu se livrant à des actes de harcèlement ou à des attaques motivés par l'appartenance ethnique, et interdire les pratiques discriminatoires susceptibles de conduire à d'autres abus.
Carine Dikiefu Banona, Chercheuse junior sur la République démocratique du Congo