Bras de fer entre l'opposition et l'Hôtel de ville de Kinshasa autour de la marche de ce samedi 13 mai 2023. Les violons ne s'accordent pas du tout. Les deux parties se regardent désormais en chien de faïence. Alors qu'ils étaient réunis par le Gouverneur de la ville-province de Kinshasa pour les derniers réglages à la veille de la manifestation, les secrétaires des partis politiques Ensemble pour la République de Katumbi, ECIDé de Fayulu, LGD de Matata Ponyo et Envol de Delly Sesanga ont été surpris de la décision de l'autorité urbaine de renvoyer la marche pour le jeudi 18 mai courant.
Une décision mal digérée par les quatre gestionnaires au quotidien des partis de l'opposition qui, au sortir même de l'entretien, mieux dans l'enclos de l'Hôtel de ville, ont confirmé, par le biais de Devos Kitoko, SG de l'ECIDé, leur marche pour ce samedi, tout en rejetant en bloc la mesure de Ngobila, qui évoquait, d'ailleurs, des raisons sécuritaires.
«Je tiens d'abord à préciser que la République Démocratique du Congo, notre pays, n'est pas placé sous le régime d'autorisation en ce qui concerne les manifestations publiques. Nous sommes dans un régime d'information. Ce que nos quatre partis politiques ont fait. Nous avons écrit depuis deux semaines à l'autorité urbaine pour l'informer de l'organisation par nos quatre partis de notre marche du 13 mai 2023, à 8h, le samedi.
Une semaine après, nous avons écrit une deuxième lettre à l'autorité urbaine, pour rappeler à son intention que conformément à la constitution, soixante-douze heures après la lettre d'information, il y a une prise d'acte automatique et qu'on sollicitait une séance de travail pour discuter des modalités d'encadrement et de sécurisation des marrés humaines qui vont se déployer samedi lors de notre marche.
C'est à notre demande. Alors que le gouverneur nous a reçus et après discussion, nous avons confirmé que le samedi 13 mai 2023, nous allons marcher», a confirmé Devos Kitoko, face à la presse venue à sa rencontre. Que dire encore ?
Avec un tel décor planté, tout est bien parti pour une journée surchauffée, ce samedi-là, puisque Gentiny Ngobila, usant de ses prérogatives du garant de la quiétude dans la capitale, tâchera mordicus d'imposer sa décision en déployant des éléments de la police sur toutes les grandes artères de Kinshasa et, même, jusqu'aux points de rencontre annoncés, le Rond-point Sakombi à Ngaliema et la Rond-point Super Lemba.
L'opposition, pour sa part, comme elle est en quête du répondant en marge des joutes électorales, pourrait s'appuyer sur la réprimande, pour dénoncer, en ce moment-là, ce qu'elle va considérer comme la violation pure et simple de la liberté d'expression et de manifestation, pourtant garantie par la Constitution du pays. Pour ainsi le rappeler, c'est depuis la semaine dernière que Moïse Katumbi Chapwe, Président d'Ensemble pour la République, a posé ses valises à Kinshasa pour, justement, prendre part, en chair et en os, à cette marche aux côtés de ses compagnons de lutte, Martin Fayulu, Matata Ponyo et Sesanga. Ces quatre ténors de l'opposition veulent, à travers leur manifestation, dénoncer l'insécurité qui persiste dans l'Est du pays suite à l'activisme du M23, groupe rebelle soutenu par le Rwanda, dire à non à tout plan visant la balkanisation du pays et dénoncer les conditions de vie difficiles qui se sont incrustées dans le quotidien des congolais.
Tout en reconnaissant la sacralité du pouvoir et de l'autorité du Gouverneur Ngobila, il y a, cependant, de quoi s'interroger sur la nature de sa décision de reporter, à la veille, une marche pourtant fixée, depuis plus de deux semaines, au 13 mai. Quatre bonnes années après l'avènement de Félix Tshisekedi à la tête du pays, l'opposition de devrait pas se sentir museler. C'est d'ailleurs ce qui ferait la beauté du jeu démocratique dans un pays où l'on prêche à longueur des journées l'Etat de droit. Pour l'heure, place au suspense. Tout le monde retient son souffle...