Au Tchad, ils sont une vingtaine de manifestants et non-manifestants des événements du 20 octobre dernier à avoir retrouvé la liberté ce week-end. Une ordonnance de non-lieu avait été prononcée en leur faveur depuis décembre dernier, mais ils étaient toujours détenus dans la prison de Koro Toro, à 600 kilomètres au nord de la capitale. Parmi les personnes libérées, il y a le journaliste Service Ngarledjelaye, qui témoigne.
Beaucoup de Tchadiens appellent le « jeudi noir », la répression des manifestations du 20 octobre 2022 contre la prolongation de la transition pour 24 mois supplémentaires et le maintien à sa tête de Mahamat Idriss Déby. Ce 20 octobre, en dépit de l'interdiction des autorités, des marches s'engagent à l'appel de l'opposition dans plusieurs villes.
Si dans certaines, comme Sarh ou Bongor, elles se déroulent sans trop de heurts, elles virent à l'émeute à Ndjamena, Moundou, ou Koumra. Selon son témoignage, le journaliste Service Ngarledjelaye a été enlevé à son domicile familial dans la nuit du 20 octobre 2022 par des éléments des forces de sécurité.
Maintenu en détention
Le journaliste exerçant dans un organe privé à N'Djamena vient de retrouver sa famille, relate notre correspondant à N'Djamena, Olivier Monodji. Tellement affaibli et amaigri physiquement, il est méconnaissable après avoir passé huit mois emprisonné au bagne de Koro Toro. Mais il a quand même trouvé la force de raconter à ses confrères ce qui lui est arrivé à l'issue de ce « jeudi noir ».
« Dans la nuit du 20 octobre, des militaires bien armés et la GNNT, je précise, a fait sa perquisition dans notre domicile. Je me suis réveillé directement. J'ai pris des gifles, on nous a amenés à bord. Le samedi, très tôt le matin, on nous a amenés devant un fleuve pour nous exécuter, on nous a déposés tout mourants, et effectivement, beaucoup parmi nous ont péri dans le désert », explique-t-il.
Pour Service, s'il n'y avait pas eu la vigilance de certains membres de la mission pour l'audience foraine du 8 et du 9 mai, ils seraient encore enfermés. « Une ordonnance de non-lieu nous a libérés début décembre, mais on nous a maintenus dans cette souffrance. Grâce aux autorités judiciaires, le procureur était obligé de pincer le régisseur », poursuit-il.
La vingtaine de manifestants qui ont retrouvé la liberté ce week-end ont encore besoin de temps pour récupérer et se faire soigner, certains étant dans un état psychologique instable à cause des tortures.