Congo-Kinshasa: Assemblée nationale - La problématique de la dot, des fiançailles et du mariage polygamique fait débat

Au sein de la jeune génération de Kinshasa et de l'arrière-pays, l'institution "Mariage" connaît, ces dernières années, un net recul. Une baisse de fréquence qui lui confère un côté mythique.

Le constat crève les yeux : les jeunes se marient de moins en moins. Les fiançailles ne sont plus limitées dans le temps. Elles tirent souvent en longueur, sans perspective de formalisation, souvent au grand désenchantement des parents qui attendent mieux. Réduits au chômage, plusieurs jeunes couples désargentés ont opéré un passage en force en mettant les parents devant le fait accompli après constat de grossesse. Les quelques rares jeunes qui, à coup de persévérance et de courage, parviennent à briser ce mur de glace, passent dans l'imagerie collective pour des héros dans une société où le célibat prolongé demeure encore la règle.

Lorsque les députés s'en mêlent...

Alors, comment faire pour appâter les jeunes et les amener à officialiser leurs unions, sans forcément passer par des raccourcis du genre "Yaka tovanda" (Entendez union libre) ? La problématique du mariage, telle que soulevée par ce questionnement, taraude bien des esprits jusqu'à s'inviter à l'hémicycle du Palais du peuple. L'idée est de briser toutes les barrières érigées sur la voie royale du mariage. Porté par le député Daniel Mbau, le projet de loi portant réglementation de la dot et des fiançailles fait actuellement débat. Jugée recevable - première étape d'une démarche devant conduire à son adoption et à sa promulgation -, cette proposition de loi fait son chemin, récoltant au passage de nombreuses adhésions.

Pour l'initiateur de la loi, il s'agit de combattre les abus autrefois décriés dans la fixation du prix de la dot muée en un fonds de commerce pour certains ménages. Pourtant régi par le Code de la famille datant de l'année 1987, le mariage en République démocratique du Congo a perdu toute sa valeur symbolique. La dot est négociée au prix fort, se chiffrant à des milliers de dollars. Bien plus, des éléments ou des objets non prévus dans la coutume y sont inclus, enlevant à ce rituel toute sa substance ancestrale.

La loi Mbau entend requalifier cette approche marchande de la dot en fixant un taux officiel auquel les familles congolaises devront dorénavant se conformer (500 dollars américains dans les zones urbaines et 200 dans les zones rurales). Venu bousculer des paradigmes longtemps ancrés dans les moeurs, ce projet de loi n'est pas sans casse. Le débat de société ainsi suscité révèle deux tendances diamétralement opposées quant au contenu à lui donner. D'un côté, on estime que cette loi favorisera l'officialisation des unions en portant un coup d'estocade aux méthodes moins conventionnelles d'unions libres. De l'autre, on est d'avis que la révision à la baisse de la dot desservirait des familles ayant investi dans les études de leurs filles, qui pensent être en droit de réclamer une dot plus conséquente et proportionnelle aux efforts consentis dans l'éducation de leurs progénitures.

Entre ces deux positions extrêmes, il y a ceux qui pensent que la femme n'a pas de prix et que sa valeur dépend de son époux ainsi que des moyens dont il dispose. Un homme qui aime bien sa femme peut aller au-delà du montant que lui peut proposer sa belle-famille, soutient-on. Dans tous les cas, il s'agit ici d'une matière qui procède plus des arrangements entre familles, lesquels ne relèvent nullement des prérogatives parlementaires, entend-on dire.

Plus des fiançailles élastiques !

Le projet de loi apporte également quelques modifications à d'autres chapitres du Code de la famille. À propos des fiançailles, par exemple, Daniel Mbau propose que les prétendants se présentent devant l'officier de l'Etat civil pour contracter les fiançailles. Toutefois, celles-ci pourront à tout moment être dissoutes si, douze mois après s'être fiancés, les futurs époux ne se marient pas. Une façon de décourager tous les jeunes garçons qui s'aventurent dans certaines familles sous prétexte des fiançailles, sans aucune perspective de mariage.

Quant à l'introduction de la polygamie dans le Code de la famille, une autre séquence de la proposition de loi, les avis divergent. Pour la majorité des hommes, il s'agit d'une tradition séculaire qui vaut la peine d'être institutionnalisée. Ce qui ne fait pas l'affaire de la gent féminine plutôt accrochée aux prescrits des Écritures saintes qui prônent le mariage monogamique. Cependant, une infime minorité des femmes voit les choses autrement. Elle adhère, au nom de la "polygamie saine", à l'idée de partager un même conjoint, quitte à respecter les règles de jeu établies. À noter que la proposition de loi a été transmise à la commission sociale et culturelle de l'Assemblée nationale pour un examen approfondi. En attendant, elle n'arrête pas de faire parler d'elle, en bien ou en mal...

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