Madagascar: Atout maitre pour Farquhar

À son retour à l'ile Maurice qu'il a quittée pour l'Europe en 1817 pour des raisons de santé, Robert Farquhar trouve « ses efforts, si savamment combinés, réduits à néant par la mauvaise foi et la brutalité de son successeur, le général Hall » (Pierre Lintingre, Bulletin de Madagascar, octobre 1967).

En outre, son plus fidèle collaborateur, James Hastie, est tenu à l'inaction et ramené à son grade de sergent. Ce que le gouverneur de Maurice ne peut accepter. Ce qu'il refuse surtout, c'est de « laisser cueillir par la France les fruits d'une si longue et si prudente diplomatie satisfaisante qu'elle lui avait valu le titre de baronnet ». Derrière son dessein de faire passer Madagascar sous la juridiction du vicariat apostolique de Maurice, d'ailleurs voué à l'échec, il semble qu'il y ait un autre mobile. Car petit-fils de pasteur, « il n'avait aucune raison d’œuvrer pour une religion autre que réformée ». Aussi n'hésite-t-il pas à appuyer toute tentative d'introduction de la religion protestante en Imerina.

Cette tentative vient d'être décidée par le gouvernement britannique qui envoie à Antananarivo, le Rev. David Jones. Sir Robert Farquhar présente ce dernier à James Hastie comme « le missionnaire de Madagascar ». Car les ministres de Sa Majesté ont recommandé qu'on accorde au missionnaire toute la protection et l'assistance « que méritent ses pieux travaux ». Ils invitent, officiellement, le gouverneur de Maurice, Farquhar, à veiller sur sa sécurité et « à lui apporter toutes les facultés qui soient possibles pour la réalisation de sa mission ».

Dans la « délicate partie de poker» qui l'oppose à la Mission catholique de Bourbon, Farquhar a un atout maitre. Effectivement, il obtient et ramène de Londres la ratification par le gouvernement britannique de «son» traité du 23 octobre 1817. Le cabinet de Saint-James ayant « daigné ordonner la reprise des relations amicales avec les chefs de Madagascar », il ne reste plus au gouverneur de Maurice qu'à démontrer à Radama que « le gouvernement britannique n'était pas engagé ou mêlé dans la question de rupture ou de la non-exécution du traité ».

Et Sir Robert Farquhar d'ajouter : « La source de revenu que nous lui offrons, le rendra le chef le plus puissant et le plus indépendant de Madagascar. » De surcroit, continue-t-il, la ratification du traité de 1817 est la preuve tangible et indéniable que le roi d'Angleterre approuve et confirme son action auprès de Radama. Le roi de la Grande-Bretagne désapprouve également et « énergiquement la responsabilité discrétionnaire assumée par mon successeur ».

Ce qui implique le retour de Radama dans la sphère d'influence anglaise, signale Pierre Lintingre. Il reste ainsi à Farquhar à obtenir de Radama, « très monté contre les Anglais », le renouvellement du traité. C'est encore James Hastie qui s'en charge. Car il a, dans le passé, déjà fait preuve de son remarquable talent diplomatique et de son zèle. Le 4 septembre 1820, Hastie reçoit ses instructions du gouverneur Farquhar.

Le 9 suivant, il est à Toamasina. Le 15, il part pour le Mangoro. Le 3 octobre, il atteint la capitale merina. Et le 11 octobre 1820, « le traité anglo-merina était solennellement reconfirmé par Radama ». Dès lors, il devient difficile, sinon impossible, aux Français « de ramener le jeune roi malgache dans leur orbite ». Aussi, à la lettre de l'abbé Pastre du 19 aout (lire précédente Note), Radama ne peut-il qu'opposer « un refus pur et simple ».

Ce qu'il fait, cependant, dans des termes très fermes, mais des plus courtois. « Je suis bien peiné, Monsieur, de vous refuser ma permission que vous avez sollicitée depuis longtemps, mais ce refus est occasionné pour une raison bien légitime vu que la religion que vous professez n'est pas la même que celle des Protestants, à qui j'ai accordé une pleine liberté et protection dans mes États. Ainsi, Monsieur, j'ai cru bon de vous informer de cette nouvelle avant d'entreprendre le voyage qui vous conduirait à des dépenses et aux risques de maladie. »

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