Tchad: Des enfants soudanais réfugiés aux «regards vides» et «très effrayés»

Fatimé et ses enfants dans leur abri au camp des réfugiés de Kalambari.
interview

Le conflit au Soudan a débuté il y a un mois. Il a bouleversé le quotidien de milliers d'enfants, contraints de partir de chez eux, privés de scolarité, à tel point que des ONG s'inquiètent des conséquences pour leur avenir. C'est le cas d'Éducation sans délai. Un Fonds mondial des Nations unies pour l'éducation qui vient de débloquer une aide de 3 millions de dollars pour accompagner les enfants déplacés au Tchad. Pays qui accueille plus de 60 000 réfugiés soudanais, dont 70% des enfants. Yasmine Sherif, directrice exécutive de l'organisation, vient de rentrer d'une visite de cinq jours à Ndjamena. Entretien.

RFI :Quel tableau faites-vous de la situation de ces enfants réfugiés au Tchad ?

Yasmine Sherif : Sur le terrain, nous avons constaté une différence flagrante entre les enfants réfugiés au Tchad, depuis 15 ans, et ceux qui viennent d'arriver. Ceux qui sont ici depuis longtemps vont à l'école, ils ont l'air d'aller bien et d'avoir tourné la page.

Rien à voir avec les enfants que nous avons rencontrés au centre d'accueil de Borota, à l'est du Tchad. Ces derniers ont le regard vide, ils ont peur, très peur. Quand on veut les approcher, il faut faire très attention, car ils sursautent, ils ont le sentiment d'être en danger. Ils ont vu des horreurs. Ils ont tout perdu, leurs maisons, les membres de leur famille. Toute la population soudanaise est traumatisée, mais les enfants sont les plus touchés

Dans ce contexte, votre organisation Éducation sans délai (Education Cannot Wait) vient de débloquer une aide de 3 millions de dollars à destination de ces enfants. Comment cet argent va-t-il être utilisé ?

Cet argent va leur permettre d'avoir un accès immédiat à des services de soins psychologiques, car il faut traiter leurs traumatismes. Ce soutien est d'une importance capitale pour des enfants de 5, 10, 11, 12 et 13 ans qui ont dû fuir le Soudan dans des conditions terribles.

Il faut également veiller à ce qu'ils reçoivent un repas à l'école, à ce qu'une infrastructure scolaire soit mise en place rapidement, avec la création de salles de classe, que des enseignants soient formés et rémunérés et que ces enfants retrouvent un environnement normal avec des jeux et un apprentissage. Ces année-là sont en effet les plus formatrices pour ces jeunes âmes et si nous ignorons cela, nous tuons littéralement leur espoir et leur avenir. Nous avons investi 3 millions de dollars, pour notre part, et nous lançons un appel aux autres gouvernements et aux donateurs. Il faut au total 5 millions de dollars pour soutenir l'éducation, rien qu'au Tchad

Vous venez de rentrer d'une visite au Tchad où vous avez rencontré notamment le ministre de l'Éducation. Qu'avez-vous retenu de ce déplacement ?

Je pense qu'il est important de reconnaître et saluer la politique d'ouverture du gouvernement tchadien, une politique très progressiste. Le Tchad accueille les réfugiés, sans distinction.

C'est remarquable de voir comment un pays qui est classé deuxième sur l'indice de développement des pays les plus pauvres de la planète - après le Soudan du Sud - fait preuve d'une telle générosité à l'égard des réfugiés. Alors qu'à l'inverse, les pays riches leur ferment la porte. Nous félicitons donc vivement le gouvernement tchadien pour sa politique très généreuse à l'égard des réfugiés

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