Tunisie: Condamnation de l'opposant tunisien Ghannouchi - Un destin politique en pointillés pour un homme ambitieux

Rached Ghannouchi
analyse

L'ancien président du Parlement tunisien, Rached Ghannouchi, patron du parti islamiste Ennahdha, arrêté le 17 avril 2023, a été condamné, le 15 mai dernier, à un an de prison pour "apologie du terrorisme".

L'octogénaire homme politique était, depuis quelques mois, dans le collimateur de la Justice tunisienne puisqu'il avait été convoqué plusieurs fois par cette institution qui le soupçonne d'être mêlé à des affaires de terrorisme, de blanchiment d'argent ou encore à des tentatives de déstabilisation du régime de Kaïs Saïed, avant qu'il ne soit mis aux arrêts.

En attendant que cette condamnation soit confirmée, l'on peut, sans risque de se tromper, dire que le rouleau compresseur de Robocop, qui s'est mis en branle, n'est pas près de s'arrêter. C'est d'autant plus vrai que depuis son accession au pouvoir, l'homme emprisonne à tour de bras tous ceux qui osent lever le petit doigt pour critiquer sa gouvernance.

Ils sont soit jetés en prison, soit menacés de poursuites judiciaires. Cela dit, la condamnation du leader de Ennahdha suscite des interrogations, surtout qu'elle intervient au moment où la Tunisie semble être à la croisée des chemins.

Le moins que l'on puisse dire, c'est que cet opposant est devenu l'un des poils à gratter du président Kaïs Saïed, depuis la dissolution de l'Assemblée nationale en 2021. Un destin politique bien en pointillés pour un homme ambitieux, pourrait-on donc s'exclamer !

C'est vrai qu'on ne peut pas l'absoudre de tout péché, mais tout laisse croire que Ghannouchi paie pour ses prises de positions engagées. Comme quoi, qui veut embastiller son opposant l'accuse de terrorisme.

Le contexte sociopolitique actuel en Tunisie, ne milite pas en faveur d'un musellement des opposants

Et sur le continent, les exemples sont légion. Du Bénin au Rwanda en passant par le Gabon, des opposants ont été purement et simplement jetés au cahot pour des raisons spécieuses de terrorisme pendant que les vrais terroristes se pavanent sans être inquiétés.

Cette façon de faire tue non seulement la démocratie, mais aussi les espoirs des peuples qui aspirent à une gouvernance vertueuse. Plutôt que de passer le temps à étouffer les voix dissonantes, Kaïd Saïed gagnerait à soigner sa gouvernance aux fins de tirer la démocratie tunisienne vers le haut.

La dictature qu'il a adoptée comme mode de gouvernance, risque de le conduire à sa perte. Car, comme le dit la sagesse populaire, « ce n'est pas en cassant le thermomètre qu'on fait baisser la fièvre ». Toujours est-il que le contexte sociopolitique actuel en Tunisie ne milite pas en faveur d'un musellement des opposants.

Mais obnubilé par sa volonté de faire place nette, Kaïs Saïed poursuit la traque de ses opposants. A preuve, de février à nos jours, une vingtaine d'entre eux ont été mis aux arrêts. Et tout porte à croire que l'homme n'est pas prêt d'arrêter sa machine répressive. C'est une véritable chape de plomb qui s'abat sur les opposants et autres défenseurs des droits humains en Tunisie.

Kaïs Saïed veut-il divertir les populations prises à la gorge par des difficultés économiques sans précédent? Condamné un opposant de la trempe de Ghannouchi, à deux mois des élections législatives, cela a toutes les allures d'une cabale politique.

Toutefois, Ennahdha doit aussi faire son autocritique sur son parcours politique, car on ne peut pas tremper sa barbichette dans toutes les soupes et vouloir sortir indemne.

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