Ile Maurice: Parlement l Ambiance - Le PM accomplit un exploit...

La séance parlementaire d'hier restera dans les annales. Pour plusieurs raisons. Le Premier ministre a accompli un exploit, pour ne pas dire un record, avec l'aide du speaker, Sooroojdev Phokeer, pour répondre à trois questions lors de la Prime Minister's Questions Time (PMQT). D'habitude, Pravind Jugnauth répond uniquement à une seule question pendant les 30 minutes consacrées à cet exercice... Quand il veut, il peut.

À vrai dire, tout a été planifié pour que Pravind Jugnauth puisse répondre à la question concernant les articles saisis dans les coffres-forts de Navin Ramgoolam en 2015. Cette interpellation était en troisième position sur la liste. Le chef du gouvernement a été très rapide en donnant les réponses à la première question de Vikash Nuckcheddy sur les arrestations de trois Mauriciens à l'île de la Réunion, tout en égratignant le Parti mauricien social-démocrate (PMSD). Pravind Jugnauth n'a pris que 12 minutes pour répondre à cette question alors que depuis son élection, il lui faut 30 minutes pour une interpellation.

De plus, les backbenchers du Mouvement socialiste militant (MSM), qui se démènent toujours comme de beaux diables pour poser des questions supplémentaires, n'ont pas bougé le petit doigt, sauf Subhasnee Luchmun Roy. Elle a tenté d'interpeller le Premier ministre, mais le speaker l'a ignorée. Il en a été de même quand Nando Bhoda posait sa question sur les revenus de la Mauritius Broadcasting Corporation. Ce député de l'opposition n'a eu droit qu'à deux questions supplémentaires. Deux élus du Parti travailliste (PTr) ont essayé d'interpeller le chef du gouvernement sur ce sujet, mais ils ont été ignorés et Sooroojdev Phokeer a ordonné à Kavi Doolub de poser sa question sur Navin Ramgoolam.

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Il était alors 11 h 54 et la séance de la PMQT était censée prendre fin à 12 h 04. Pravind Jugnauth a pris un malin plaisir à égrainer la liste et la quantité des pilules saisies chez le leader de Parti travailliste. Il a ensuite rappelé que ces médicaments sont utilisés pour améliorer la performance sexuelle et d'autres étaient pris pour un sommeil paisible. Il était alors 12 h 04. Sooroojdev Phokeer, d'habitude très à cheval sur l'heure consacrée aux questions, a laissé le Premier ministre parler pendant quelques minutes encore au lieu de l'interrompre comme il le fait souvent avec des élus de la minorité.

«Comme si, après une hyperactivité sexuelle rendue possible par des produits dopants, la bête a besoin d'un profond sommeil pour récupérer. Même un Casanova ne pourrait imaginer un tel cocktail», a-t-il ironisé, alors que des parlementaires ricanaient tout en faisant des commentaires déplaisants. Un élu du PTr lui a déclaré : «Samem Sherry Singh ti pé pran?» Le Premier ministre a ignoré son commentaire. Un autre élu rouge a ajouté: «Li kontan rant dan lavi privé dimounn.»

«Lakour rékréasion»

Joanna Bérenger a été la première membre du Mouvement militant mauricien à exprimer son indignation. «Cheap», a-t-elle laissé échapper. Un élu de la majorité s'en est pris à elle. «Al asiz akoté li to pou koné», a-t-il déclaré, en parlant de Navin Ramgoolam. Un autre a poursuivi : «To partner sa.» Kavi Ramano, ancien du MMM, s'est également mis de la partie. «Sa nivo-la MMM in vini.» Joanna Bérenger ne s'est pas laissé intimider. «Li kouma enn zanfan. Al dir sa dan lakour rékréasion», a-t-elle maintenant face à l'insistance de Pravind Jugnauth.

Elle a fait face à d'autres commentaires des élus de la majorité et Sooroojdev Phokeer a même mis en garde la députée mauve. «Indigne d'un Premier ministre», a-t-elle laissé sortir, alors qu'il y avait un silence éphémère dans l'Hémicycle. Le speaker lui a recommandé de présenter ses excuses, ce qu'elle a fait.

Tandis que le Premier ministre répondait aux questions de Kavi Doolub, Patrick Assirvaden, Shakeel Mohamed et Osman Mahomed ont tous levé la main pour faire comprendre qu'ils ont des questions supplémentaires sur ce sujet. Toutefois, dès que Pravind Jugnauth a terminé sa réponse, le speaker leur a dit que le temps de la PMQT était écoulé. Patrick Assirvaden a insisté pour poser une question tandis que Shakeel Mohamed a murmuré quelque chose derrière son masque. «Honorable Mohamed, veuillez présenter vos excuses pour avoir contesté ma décision», lui a ordonné Sooroojdev Phokeer.

«Je n'ai pas contesté votre décision», a-t-il répondu. Le speaker a alors expulsé le député rouge. Il s'en est pris également à Patrick Assirvaden en élevant la voix. «Pas besoin de crier», lui a conseillé Arvin Boolell. Le speaker s'est ensuite tourné vers Osman Mohamed, lui demandant de s'excuser également. Surpris, le député lui a voulu savoir pour quel motif. «Vous avez parlé après ma déclaration. Présentez vos excuses ou quittez la chambre», a-t-il exigé. Osman Mahomed s'est excusé contre sa volonté.

Durant la tranche réservée aux questions destinées aux ministres, le député Farhad Aumeer a également fait les frais de la mauvaise humeur du speaker. D'habitude calme tout en évitant les accrochages depuis son élection, l'élu du PTr n'a pas pu garder son calme suite à une remarque de Sooroojdev Phokeer et du député du MSM Kenny Dhunoo. D'abord, le speaker est intervenu pour dire au député de reformuler sa question, sinon il ne lui donnerait plus la parole. «Ne transformez pas ce Parlement en cinéma», a-t-il déclaré à Farhad Aumeer.

Celui-ci lui a répondu : «Ce n'était pas du cinéma un moment plus tôt ?» Il faisait référence aux réponses de Pravind Jugnauth. Kenny Dhunoo a alors fait la leçon au membre de l'opposition sur la façon de poser des questions. «Ce n'est pas à toi de m'apprendre comment poser des questions», lui a-t-il dit. Pas content, le député du MSM l'a alors invité à «prendre des comprimés» pour ensuite dire à l'égard de son collègue de l'opposition : «To fou!»

Dans toute cette cacophonie, le député Mahend Gungapersad a dû présenter des excuses alors qu'il n'a rien dit. «Only mad men talk whenever they want», lui a lancé le speaker, pour ensuite crier. Le whip de l'opposition, Patrice Armance, calme jusqu'ici, a fini par craquer. «Arrêtez de hurler», a recommandé le député du PMSD au président de la Chambre.

Des échanges ont eu lieu entre les deux hommes avant que Sooroojdev Phokeer n'expulse le whip de l'opposition. Le speaker a prétendu que l'intention du député était de partir tôt alors qu'il est payé pour rester. «Vous, vous n'êtes pas payé pour hurler», a déclaré le parlementaire du PMSD. Le leader des Bleus et de l'opposition était par ailleurs absent hier, pour cause de maladie.

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