Congo-Kinshasa: Mode et moeurs - Des jeunes kinoises de plus en plus attirées par la conduite automobile

Plus que jamais, l'automobile passe dans plusieurs ménages kinois pour le moyen modal par excellence de la mobilité quotidienne. Aujourd'hui, il n'est plus l'apanage des seuls hommes.

La gent féminine s'est, elle aussi, introduite dans l'engrenage, enlevant au volant son exclusivité masculine. Les statistiques à travers le monde et, particulièrement, en Afrique sont évocatrices à ce sujet. L'engouement de la gent féminine dans les auto-écoles à Kinshasa et dans d'autres capitales africaines en constitue une preuve éloquente. Les écarts du taux de réussite ont, en effet, sensiblement diminué ces dernières années entre les deux sexes.

Dans les rues bondées de Kinshasa, les femmes défient désormais les hommes, adoptant parfois les mêmes tics et réflexes au détour des carrefours, prémices sans doute de la parité au volant. Cela tient, certes, d'un épiphénomène, mais dont le côté positif est d'en finir avec les stéréotypes longtemps nourris au sujet des conductrices. Le vieil adage, « Femme au volant, mort au tournant » a même perdu de sa substance dans une société qui veut s'émanciper en singeant l'Occident dans ses moindres frasques. Une certaine catégorie de jeunes kinoises, elle, s'est carrément appropriée le volant. La part d'influence des films nigérians mettant en relief des jeunes actrices roulant carrosse n'est pas à exclure dans l'emprise exercée sur la gent féminine autant que son goût naturel prononcé pour le lucre.

Un effet de mode

Obnubilées par un élan exagéré de paraître, elles ont fini par réduire la voiture en un objet d'ornement. Celle-ci participe au feeling que dégage la propriétaire ou mieux à une tendance à l'exhibitionnisme dont elle est le centre d'intérêt. Dans les différentes artères de Kinshasa, des adolescentes confortablement assises derrière le volant des berlines de la dernière génération crèvent les yeux. Elles sont soit étudiantes, jeunes employées dans certaines entreprises sulfureuses, soit influenceuses ou encore maîtresses de grosses fortunes. N'allez surtout pas chercher la provenance de leurs revenus ! Quoiqu'il en soit, cette catégorie de jeunes filles fascine, tant tout en elles inspire, commande et stimule un certain challenge, celui de la réussite facile dans laquelle ont sombré, par effet de contagion, nombre de leurs semblables. Une jeune fille qui revendique une certaine modernité doit allier beauté, élégance, classe et tous les accessoires qui vont avec dont une voiture de luxe.

Les influenceuses des réseaux sociaux font étalage, à longueur de journée, de leurs acquis matériels avec des prises de vue à bord de leurs cylindrés. Une façon, pour elles, d'être dans l'air du temps au grand désenchantement des garçons de leur génération qui n'ont que leurs yeux pour pleurer. Moralité : tous les moyens sont bons pour atteindre cette finalité, synonyme d'un certain positionnement social.

Dans les auto-écoles de Kinshasa, le nombre exponentiel des requérantes est à la mesure de leur appétence effrénée pour le volant. Les véhicules à boîte automatique sont les plus prisés par ces jeunes dames vu les facilités qu'ils offrent dans la conduite. D'où, le passage au permis de conduire a cessé d'être un épouvantail pour ces jeunes conductrices qui affrontent les rues bondées de Kinshasa, sans peine ni anicroche. Les plus téméraires d'entre elles, qui gardent encore intactes leurs valeurs éducationnelles, sont employées comme tel dans des organismes qui prônent l'égalité des sexes et conduisent des gros engins. À tout prendre, l'essort de la mobilité des femmes exprime leur émancipation progressive en ce XXIe siècle. Il s'agit d'un enjeu de lutte contre la précarité et de déconstruction des stéréotypes. Mais que cela n'occasionne pas la dérive d'une société congolaise en manque de repères dont le mimétisme conceptuel, sans réflexion, inquiète plus qu'il ne rassure.

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