Egypte: Abus à l'encontre de femmes suspectées de liens avec un groupe affilié à l'EI

Journée internationale de la femme en Egypte (archive)
communiqué de presse

Beyrouth — Des cas de torture, de détention au secret, et de procédure irrégulière figurent parmi les abus

Les autorités égyptiennes ont arbitrairement détenu des femmes et des filles liées à des membres présumés d'un groupe affilié à l'État islamique (EI) dans le nord du Sinaï, certaines pendant des mois ou des années, ont déclaré aujourd'hui Human Rights Watch et la Sinai Foundation for Human Rights.

Les autorités ont également torturé plusieurs femmes et filles et les ont maintenues en détention prolongée au secret. Les détentions visaient généralement à faire indirectement pression sur leurs proches masculins, soupçonnés de liens avec le groupe Wilayat Sina' (« Province du Sinaï »), affilié à l'État islamique, pour qu'ils se rendent ou obtiennent des informations à leur sujet, ont déclaré des avocats et des témoins. Certaines femmes et filles ont elles-mêmes été victimes d'exactions commises par ce groupe lié à l'État islamique, notamment des viols et des mariages forcés ; puis elles ont été détenues par les autorités égyptiennes après s'être échappées et avoir demandé l'aide des autorités.

« Les autorités égyptiennes ont maltraité de nombreuses femmes et filles dans le nord du Sinaï pour obtenir des informations sur leurs proches présumés affiliés à l'EI ou faire pression sur ces suspects pour qu'ils se rendent », a déclaré Ahmed Salem, directeur exécutif de la Fondation du Sinaï pour les droits humains (Sinai Foundation for Human Rights). « Les autorités devraient immédiatement libérer toutes les femmes et les filles détenues simplement parce qu'elles sont liées ou associées à des suspects de sexe masculin, et enquêter sur les actes de torture et autres mauvais traitements subis à leur encontre. »

Depuis juillet 2013, les opérations militaires égyptiennes se sont intensifiées dans le nord du Sinaï contre Wilayat Sina', qui a prêté allégeance à l'EI en 2014. Les autorités égyptiennes ont effectivement transformé la région en une zone militaire fermée où les reportages indépendants sont interdits. Tant Wilayat Sina' que l'armée et la police égyptiennes ont commis de graves violations du droit international humanitaire, ayant pu dans certains cas constituer des crimes de guerre.

Human Rights Watch et la Sinai Foundation for Human Rights ont documenté 21 cas survenus entre 2017 et 2022 impliquant 19 femmes et 2 filles. Les organisations ont interrogé à distance les proches de neuf femmes et filles, les avocats représentant neuf autres femmes, deux personnes détenues avec une autre femme et deux femmes anciennement détenues.

Des proches de trois femmes ont déclaré que des agents de l'Agence de sécurité nationale (NSA) les avaient maltraitées sur divers sites de l'agence, notamment avec des passages à tabac et des décharges électriques. Deux autres femmes ont déclaré que des policiers les avaient agressées verbalement les femmes, giflé l'une d'entre elles et bandé les yeux de l'autre dans des postes de police du nord du Sinaï.

Des femmes et des filles ont été gravement maltraitées par des membres de Wilayat Sina, subissant des viols et des mariages forcés, ont indiqué des sources. Dans certains cas, les membres du groupe ont empêché les femmes et les filles de partir. Pourtant, dans les 21 cas documentés par les deux organisations, les autorités égyptiennes n'ont pas traité les femmes et les filles comme des victimes possibles de crimes.

En 2019, les autorités ont arrêté une jeune fille de 15 ans qui avait subi trois mariages forcés depuis l'âge de 14 ans, ses deux premiers maris étant morts dans des affrontements armés. Lorsqu'elle a pu quitter le nord du Sinaï pour aller vivre au Caire, les autorités l'ont arrêtée détenue au secret pendant six mois et poursuivie en justice, a déclaré son avocat.

« De nombreuses femmes et filles du nord du Sinaï ont déjà subi des abus intolérables de la part de membres liés à l'État islamique », a déclaré Adam Coogle, directeur adjoint de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord à Human Rights Watch. « Le gouvernement égyptien devrait les protéger, au lieu de les enfermer et torturer. »

AllAfrica publie environ 600 articles par jour provenant de plus de 110 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.