Tunisie: Le droit de savoir

MARDI 9 mai au soir sur l'île paisible et multiconfessionnelle de Djerba, les armes ont parlé. Le pèlerinage juif annuel, évènement religieux et festif, se transforme en quelques secondes en champ de tirs. Un membre de la Garde nationale parvient à atteindre les abords de la synagogue de la Ghriba, lourdement armé, il prend pour cible les pèlerins. Des visiteurs de la Tunisie et des citoyens juifs tunisiens chez eux, ici. 5 victimes en tout, un carnage évité de peu. Tout le mérite revient à ses vaillants frères d'armes.

Plus de dix jours après l'attaque que les autorités refusent de qualifier d'attentat terroriste, tout a-t-il été dit ? Vraisemblablement non. A ce niveau de l'enquête, des éléments essentiels manquent pour faire la lumière sur cet événement sanglant qui a fait la une de la presse internationale avec les effets prévisibles sur l'image du pays, malgré les tentatives d'en minimiser l'impact.

Si l'on connaît à peu près le déroulé de l'assaut, plusieurs zones d'ombre demeurent. La première : comment l'assaillant a-t-il pu accéder aux abords de la synagogue, sans être repéré et arrêté, alors que les barrages routiers et maritimes, l'on suppose, ainsi que les dispositifs de sécurité jalonnaient les issues menant à la célèbre synagogue ? Et que les agents chargés de la protection des lieux sont facilement identifiables parce que badgés.

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Deuxième importante question : quelles sont ses motivations? Est-il l'exécutant d'un plan diabolique mis au point par des commanditaires disposant de grandes ressources et d'hommes de main ? Est-ce un « loup solitaire » qui s'est auto-radicalisé et qui cherche, dans sa folie meurtrière, à gagner la bénédiction divine ? Souffre-t-il de troubles psychiques ? A ce jour, très peu d'informations officielles sont révélées sur le profil du meurtrier.

En tout état de cause, et quelles qu'en soient ses sombres desseins, comment a-t-il pu échapper à la vigilance de sa hiérarchie ? Comment a-t-il pu passer entre les mailles du filet ?

L'attaque de la Ghriba est une tragédie en soi. Sa gravité est amplifiée par le statut de son auteur. Ce qui nous amène à penser qu'un audit interne et minutieux s'impose dans les corps de la police, la Garde nationale et de l'Armée. Mais attention : ne pas céder au jeu facile des procès d'intention, des intrigues politico-idéologiques et des rivalités professionnelles et personnelles et faire des victimes injustement sanctionnées. Une fois cela dit, les Tunisiens ont le droit de savoir et de regard sur ceux qui se sont engagés solennellement à protéger la nation, à maintenir la paix et la sécurité publique au péril de leur vie,et qui, un jour, ont failli.

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