« Il faut déjà reconnaître que les nombreuses différences entre les partis ou les mouvements politiques de la coalition Yewwi Askan Wi peuvent expliquer l'existence d'appréciations multiples en fonction du contexte.
Il est plus facile de s'entendre dans le cadre d'élections municipales ou législatives dans la mesure où les sièges à pourvoir sont multiples. Il en est autrement dans la perspective d'une élection présidentielle où cette fois-ci, il n'y a qu'une seule place à prendre. Yewwi Askan Wi est une coalition qui s'est formalisée dans un cadre stratégique et par rapport à des élections particulières. Par conséquent, il n'est pas surprenant d'entendre des voix discordantes au sein de cette coalition, surtout à l'approche de la présidentielle. En revanche, ce qui me paraît surprenant, c'est l'erreur d'appréciation de la situation politique du pays de la part de Khalifa Sall. Sa volonté de participer au dialogue est une faute politique. Il n'a malheureusement pas compris que les militants et les sympathisants de Yewwi sont majoritairement contre toute compromission ou compromis avec le régime finissant de Macky Sall. Comment un homme politique avec une telle expérience peut-il ignorer la réalité politique du moment ? Khalifa Sall aurait tort de penser que tous les moyens seraient bons pour être éligible ».
Pastef a une plus grande envergure que le mouvement Taxawu Sénégal
« Pastef à une plus grande envergure que le mouvement Taxawu Sénégal. Je ne parlerai donc pas de rivalité mais plutôt d'une volonté de ravir la vedette à Ousmane Sonko et de profiter des stratégies mises en place par le pouvoir pour l'éliminer de la course de 2024. Mais, j'ai toujours du mal à comprendre le manque de réalisme de certains hommes politiques. Les ambitions politiques sont légitimes dans un système qui se réclame de l'idéal démocratique. Mais l'homme politique doit tenir compte du contexte et du poids des forces en présence. En refusant ce réalisme, on s'expose inutilement et on perd en crédibilité. C'est malheureusement ce qui arrive à Barthélémy Dias. Les coalitions politiques peuvent vous donner l'illusion d'un poids politique que vous n'avez pas en réalité. J'ai le sentiment que c'est ce qui arrive à Khalifa Sall et à son mouvement dans son ensemble. Taxawu Sénégal n'a pas pour le moment les moyens de rivaliser avec Pastef que ce soit au niveau structurel, au niveau du leadership et au niveau du projet proposé.
Des tensions et des différences de point de vue sont compréhensibles dans une coalition. Mais chacun en fonction de ses forces et de ses faiblesses doit mesurer l'impact de ses décisions sur les autres acteurs. C'est ce que nous enseigne la géopolitique. Khalifa Sall doit comprendre que même s'il négocie son éligibilité, il a peu de chances de remporter la prochaine élection présidentielle. Ce n'est donc pas stratégique de se mettre à dos une frange importante de militants et de sympathisants de Yewwi Askan Wi. Encore une fois, je considère que c'est une faute politique de la part de Khalifa Sall que de parler de dialogue politique à quelques mois d'une élection où a l'état actuel des choses, il ne sera pas sur le départ ».
« Khalifa Sall et Barthélémy Dias ont beaucoup plus à perdre de cette passe d'armes »
« Khalifa Sall et Barthélémy Dias ont beaucoup plus à perdre de cette passe d'armes entre membres de la même coalition. Les citoyens réclament davantage de constance chez les hommes politiques. La politique politicienne est de plus en plus honnie chez une frange importante de la société sénégalaise. Les politiciens caméléons ont de moins en moins de possibilités de justifier leur revirement ou leur reniement ».
« Il est clair que cette crise laissera des traces au sein de Yewwi »
« Tout porte à croire que pour le moment, personne ne conteste l'intérêt de Yewwi Askan Wi malgré cette récente crise. Les différentes composantes de cette coalition comprennent bien qu'ils ont besoin les uns des autres malgré les différences de statut et de poids politiques. Ainsi, ils n'ont aucun intérêt à se séparer dans l'immédiat. Mais, il est clair que cette crise laissera des traces notamment quant à la cohésion du groupe et la confiance des uns vis-à-vis des autres ».
« Ce qui se joue en ce moment concerne la crédibilité de Khalifa Sall dans l'opposition »
Au-delà de la prochaine élection présidentielle, ce qui se joue en ce moment concerne la crédibilité de Khalifa Sall dans l'opposition. C'est lui plus que n'importe qui d'autre qui a dorénavant besoin de se justifier et de prouver son ancrage dans l'opposition au sein de Yewwi Askan wi. Sa volonté affichée de participer à un éventuel dialogue risque de lui coûter cher, non pas dans la perspective de la prochaine élection présidentielle à laquelle il ne peut pas participer pour le moment, mais plutôt du point de vue de son image d'opposant qui est à présent contestée ».