Burkina Faso: Libération du docteur Kenneth Eliott - Dénouement heureux, moult interrogations !

La bonne nouvelle est tombée depuis la lointaine Australie. Les autorités de Cambera ont annoncé vendredi dernier que le docteur Arthur Kenneth Eliott a été libéré saint et sauf et a retrouvé sa famille à Perth, sa ville d'origine en Australie-Occidentale.

C'est la fin heureuse d'une mésaventure qui aura duré 7 longues années, car le "miraculé" avait été enlevé dans la nuit du 15 et 16 janvier 2016, en compagnie de sa femme, dans la ville de Djibo, au nord du Burkina. Au bout de 3 semaines de captivité, Mme Jocelyn Eliott avait été libérée tandis que son mari restait captif des éléments d'Ansar Dine, alliés d'Al-Qaïda.

C'est un véritable ouf de soulagement pour les proches du docteur Eliott, le gouvernement australien, ses anciens collaborateurs et les populations de Djibo, qu'après tant d'années d'incertitudes et de peur sur son sort, il recouvre la liberté, sain et sauf. On avait craint le pire, vu son grand âge et les risques liés aux conditions de détention, généralement spartiates pour des otages aux mains de terroristes. Mais le plus qu'octogénaire aura tenu bon et ses ravisseurs en le libérant, donnent un signal que malgré la cruauté sanguinaire dont ils sont capables, il leur reste un brin d'humanisme dont ils peuvent se servir ne serait-ce que pour des intérêts furent-ils bassement pécuniaires.

Dans le cas du docteur Eliott, le gouvernement australien a beau dire qu'aucune rançon n'a été versée pour sa libération, on reste dubitatif. Al-Qaïda est coutumier d'une fâcheuse jurisprudence, celle de libérer ses otages contre espèces sonnantes et trébuchantes. Il serait étonnant que ces islamistes purs et durs aient fait exception pour le docteur Eliott, même si c'est un homme de bien.

C'est connu, ce dernier, en bon chrétien, donnait à son action en Afrique, au Burkina et particulièrement dans la région du Sahel, au-delà des aspects humanitaires, une portée missionnaire. C'est cette vision qui l'a poussé de sa lointaine Australie vers l'Afrique, d'abord au Bénin en 1967, puis au Burkina dès 1972. Au Bénin, il redonne vie à un hôpital qui était fermé avant de construire à Djibo, au coeur du Sahel, un autre centre hospitalier de 120 lits qu'il gèrera pendant plus de 40 ans. Il y recevait beaucoup de patients burkinabè et maliens, dont des cas de hernies, de calculs rénaux ou de tumeurs de toutes sortes qui nécessitaient des opérations chirurgicales. Notre bon médecin se tuait à la tâche, d'autant plus que les chirurgiens ne courent pas les rues au Burkina et la région du Sahel en manque cruellement.

Le docteur Eliott à cause de son engagement humanitaire et missionnaire a hérité à juste titre du surnom de "médecin des pauvres". On pourrait lui ajouter celui de « Bon Samaritain », lui qui déclarait avant son rapt que son « but ultime est de manifester l'amour de Dieu, sa bonté et sa puissance à travers la médecine ». Dans un message adressé à ses ravisseurs, plaidant pour sa libération, sa femme le décrit également comme «un homme désintéressé, au service de tous, souhaitant être fidèle à ses principes et animé du désir d'aider les autres ».

On ne peut donc qu'applaudir la libération d'un tel humanitaire et missionnaire, non sans se poser quelques questions dont on n'aura peut-être jamais les réponses : Pourquoi la libération du docteur Eliott a-t-elle mis tant de temps à se concrétiser ? Les autorités actuelles du Burkina ont-elles mis un bémol à leur principe de ne rien négocier avec les groupes terroristes pour jouer un quelconque rôle dans ce dénouement heureux ? Le Niger qui avait aidé à la libération de Jocelyn Eliott a-t-il été encore sollicité ? Et surtout, y a-t-il eu paiement de rançon dans cette affaire ?

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