Le procureur de la Cour pénale internationale a prononcé son réquisitoire dans l'affaire Al Hassan. L'ex-jihadiste d'Ansar Dine, ex-commissaire de la police islamique, est poursuivi pour des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre commis à Tombouctou lors de l'occupation en 2012. Le procureur demande aux juges de le condamner. Il risque la perpétuité.
À en croire le procureur, c'est l'accusé lui-même qui aura, bien involontairement, fournit les preuves de ses propres crimes.
Tombouctou occupée était une ville où tout était haram, avait dit l'un des témoins venus à la barre de la Cour. La danse, la musique, le tabac, le football sont interdits sous l'occupation jihadiste. Abdoulaziz Al Hassan est un commissaire zélé, selon l'accusation.
Dans son réquisitoire, le procureur, Gilles Dutertre est entré dans le détail d'un dossier très étoffé, évoquant des preuves abondantes et selon lui suffisantes pour condamner l'accusé.
Parmi ses preuves, il y a les témoignages de l'horreur. Il y a aussi les 39 rapports de police écrits et signés par l'accusé lui-même. Al Hassan y évoque l'utilisation de la torture.
Dans le dossier du procureur, il y a encore des vidéos sur lesquelles le jihadiste apparaît clairement infligeant des coups de fouet à un jeune homme, ou refusant la clémence qu'implore une femme à terre. Le procureur n'a pas montré les images d'une mise à mort, qu'il a néanmoins raconté aux trois juges.
Gilles Dutertre s'est aussi longuement arrêté sur les crimes ciblant les filles et les femmes durant les 10 mois d'occupation, traquées dans la rue et jusque dans leur maison, violées, parfois soumises à l'esclavage.
« Cette persécution subie par les femmes, monsieur le président, mesdames les juges, est symbolique de la persécution de toute la population de Tombouctou dans son ensemble. La persécution des femmes a affecté toute la population. Chaque Tombouctien pouvait avoir une mère, une soeur, une fille, qui a subi les rigueurs et les violences des occupants. Et quand on frappe ta femme devant toi, on frappe ta soeur devant toi, on l'emprisonne que tu ne peux rien dire, on frappe ta propre mère devant toi, tu ne peux pas parler parce que tu as les mains nues, alors tu perds ta dignité ».
Coiffé d'un turban blanc, assis derrière son équipe d'avocats, Al Hassan n'a pas commenté. La parole est désormais aux victimes, représentées devant la Cour par des avocats. Ce sera ensuite à la défense de prononcer ses plaidoiries.