En 2007, Madagascar a fixé l'âge matrimonial à 18 ans pour les filles comme pour les garçons. Mais dans les faits, sur une population globale de 28 millions d'habitants, l'Unicef estime que 3,5 millions de jeunes femmes malgaches se marient avant 18 ans. Un million d'entre elles seraient mariées avant leurs 15 ans. Vendredi, l'Institut français de Madagascar organisait un grand débat autour de ce phénomène de société.
Pour lutter contre le mariage forcé, la Grande Île s'est dotée en 2015 d'une loi des plus répressives du continent africain, « la loi relative à la lutte contre la traite des êtres humains », explique l'une des intervenantes du débat, Rose de Lune Rejojoarisoa, juge des enfants et membre du comité de réforme des textes relatifs aux droits de l'enfance. « Elle réprime le mariage forcé dont celui d'un enfant constitue une circonstance aggravante. Cette loi réprime aussi plus sévèrement les complices - ceux qui ont proposé l'enfant, ceux qui ont incité au mariage, contribué à constituer le financement, etc - que les parents », ajoute-t-elle.
« Faire évoluer les mentalités »
Des complices qui risquent aujourd'hui entre 1 et 10 ans de prison. Des sanctions cependant rarement appliquées. Pour faire bouger les lignes, Maitre Olivia Rajerison, militante pour les droits des enfants, estime que le pays doit « se saisir de ce qui fonctionne » et « faire évoluer les mentalités ».
Pour cela, une chose en laquelle elle croît, « c'est l'impact des réseaux sociaux sur la société et de cette grande sensibilisation de masse pour pouvoir faire en sorte que ces parents ne pensent pas au mariage forcé comme une solution économique pour s'en sortir ou, tout simplement, comme un suivi des traditions, explique-t-elle. Et d'ajouter : « Il faut maintenant profiter de l'essor des réseaux sociaux pour pouvoir vulgariser, rendre les textes accessibles, intelligibles, compréhensibles à tous » car « on a besoin d'une population éduquée, épanouie. »
Depuis la pandémie, les mariages forcés ont explosé sur l'île, du fait de la paupérisation de la population et ne concernent plus seulement la brousse. Dans la capitale, de nombreux cas ont été recensés ces deux dernières années.