Burkina Faso: Nos rubriques disparues

Les fidèles lecteurs auront remarqué que des rubriques qu'ils ont aimées et dont ils se délectaient à chaque parution ont malheureusement disparu.

Il en va ainsi de la vie d'une rubrique comme de celle d'un humain, qui naît, grandit et meurt. Chaque rubrique a un auteur et un style qui lui est particulier, au point que l'imiter est quasi impossible. C'est pourquoi certaines rubriques ont été purement et simplement enterrées avec leurs auteurs, au grand dam des lecteurs. A cela s'ajoute le départ des rédacteurs d'autres rubriques vers d'autres horizons. Cela dit, ces rubriques disparues ont laissé un héritage immensément varié à la postérité que les milieux scolaire et universitaire peuvent encore consulter dans nos archives. Il suffit de savoir la période et la périodicité de la rubrique concernée. Zoom sur les plus emblématiques.

- Le fichier du fureteur : Lancée dès les premières années de L'Observateur, cette rubrique qui était animée par Bali Maurice Bamouni traitait des problèmes récurrents de la société. Comme l'indique d'ailleurs son nom, le fureteur était toujours à l'affût pour des nouvelles fraîches de la cité. Il disait avoir remarqué, vu ou entendu parler d'un phénomène. Avec cette astuce, il était toujours au courant de ce qui se passait dans les bars, dans les familles ou dans les quartiers.

- Radio Cancan, animée par Salin Kolooto, est née du fait que la rumeur dans la cité était souvent considérée, à tort ou à raison, comme une vraie information amplifiée à souhait. Chacun l'accommodait à souhait. Radio Cancan partait alors de la rumeur et en tirait une conclusion, ou alors relatait des faits assortis de conseils, le tout dans un style où l'humour le disputait à la tragicomédie.

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Nous vous proposons cet extrait tiré du numéro 190 du vendredi 18 janvier 1974 de L'Observateur et intitulé : Un chapardeur bastonné à mort.

« Le délégué aux affaires sociales de Radio cancan s'est longuement apitoyé hier soir, dans sa chronique hebdomadaire, sur le sort d'un jeune délinquant qui, pris en flagrant délit d'un vol de 50 F, a été bastonné à mort par les vendeuses de légumes du grand marché de Ouagadougou. Etonné de ce qu'une si petite peccadille ait valu à son malheureux auteur un châtiment si capital, le détective de Radio cancan a ouvert aussitôt une enquête... »

- Mam-Ti-Fou avec pour slogan «Faites l'humour, pas la guerre». Cette rubrique avait une valeur intellectuelle et imaginative très élevée. Elle était animée avec maestria par feu Samuel Kiendrebéogo, qui travaillait à l'époque à la Radio nationale. Sa chronique avait une grande audience. Recruté plus tard par la Voix de l'Amérique, Samuel Kiendrebéogo a continué l'animation de la rubrique qui, par la suite, est devenue les « Billets craquants » signés de Rabi Mitib kièta.

- Soliloques de Nobila Cabaret dont l'initiateur était Boniface Batiana. Nobila Cabaret s'attaquait à des questions sérieuses, tant aux niveaux politique, social qu'économique, et visait à éveiller les consciences par le biais de l'humour. Tout en amusant ses lecteurs, Boniface Batiana, dans un français approximatif dont lui seul savait faire usage, se prononçait sur certaines tares de la société. A sa suite, El Kabor, dans un style propre à lui, a animé la rubrique avant qu'elle ne mette la clé sous le paillasson.

- Contre-jour. C'est une chronique qui ratissait large en abordant aisément différents sujets. Son animateur, Patrick Ilboudo, qui nous a quittés le 28 février 1994, avait un très haut niveau intellectuel et a régulièrement animé la rubrique sur pratiquement un an.

- Féminin Pluriel : Comme son nom l'indique, cette chronique traitait de la question féminine en dénonçant les actions contraires au bien-être et à l'épanouissement de la femme. Monique Ilboudo,première romancière burkinabè, en était l'initiatrice et a géré sa page avec professionnalisme entre 1992 et 1995.

- Les Mercredis de Zoodnooma Kafando :De son vrai nom Issaka Sourwèma, celui qui est aujourd'hui chef de Dawélgué et qui fut ministre en charge des Cultes dans le gouvernement de Damiba, a, sous le nom de plume Zoodnoma Kafando, animé cette tribune. Il était un observateur très avisé de la scène politique nationale. Sa chronique se présentait comme une réflexion critique sur tout ce qui touche à la vie en communauté.

- Si Ouagadougou m'était conté : Elle était coanimée par le directeur de publication de votre journal, qui signait sous le pseudonyme Pierre Emmanuel Kouma, et l'historien Lassina Simporé. Il s'agissait pour eux d'identifier un certain nombre d'anciens sites qui existaient ou qui n'existaient plus et d'en conter l'histoire. Un rappel historique qui intéressait de nombreux lecteurs. Par exemple, pour Ouagadougou, là où se trouve actuellement l'ancien état-major général des armées, c'était le siège du Volta club, l'un des tout premiers lieux de réjouissances de la capitale ; le siège de l'actuel SGBF était le siège de la Trans-africaine, une grande société de transport d'antan.

- Les Figas du jour, dont l'animateur était Pierre Tapsoba, alias Brice Kaboré, qui a tiré sa révérence le 25 août 2009. C'est une rubrique de faits divers qui paraissait chaque mardi dans L'Observateur Paalga et qui s'intéressait aux problèmes de la cité. On y interpellait régulièrement les autorités communales qui, en règle générale, réagissaient favorablement. Ainsi, des feux tricolores, des panneaux de signalisation et des routes étaient réparés et beaucoup de problèmes résolus. On y faisait aussi le point des interventions de la Brigade nationale de sapeurs-pompiers (BNSP).

Extrait d'un article intitulé : « Vite des balises au bord de ce canal », paru en juillet 2007

« Il y a quelques années de cela, la mairie de Ouagadougou procédait au lancement des travaux d'aménagement du canal des 1200 logements, puis de celui de Wemtenga. Grâce à ces deux ouvrages, les eaux de ruissellement sont mieux drainées dans ces zones au grand bonheur des populations...Tout aurait été parfait si les autorités communales avaient pris le soin de baliser le pont et surtout cette espèce de barrage qui existe du côté de la Circulaire juste après le maquis TV5... »

- Les Elucubrations de Toégui

« Hello ! Bombourou ! L'année 2010 s'annonce sous de bons auspices pour moi. Tu sais ce qui m'arrive ? Hé ! Hé ! Nakibeuogo m'a promu Elucubreur Honoris Causa. Oui, alors que je m'y attendais le moins, il m'a fait venir un matin et il m'a demandé :

- Toégui, est-ce que tu aimes vraiment élucubrer ?

Et j'ai répondu :

- Patron, je n'aime pas seulement élucubrer, j'adore élucubrer.

-... » (Confer 100 minutes chrono au K ya K in L'Observateur Paalga du mardi 2 mars 2010)

C'est par des accroches pareilles, dont lui seul avait le secret, que Toégui, à l'état civil, Charles Sidiki GuiboTony, administrateur des postes à la retraite, débutait ses écrits. Il élucubrait autant que faire se pouvait dans un style propre à lui. Sa chronique, empreinte d'humour, était en rapport avec les faits de société. Manipulateur hors pair de mots, le vieux Samo n'avait pas son pareil pour moquer certains faits et gestes de ses compatriotes, qu'il considérait comme des déplacés.

Hélas, Toégui a définitivement rangé sa plume le 17 décembre 2020 à Ouagadougou !

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