Soudan: 1ère distribution de nourriture du PAM à Khartoum, alors que la faim s'intensifie

30 Mai 2023

Près de 1,4 million de personnes ont été déplacées au Soudan depuis le début du conflit à la mi-avril, dont plus d'un million déplacées à l'intérieur du pays, a indiqué le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA) dans un nouveau rapport qui révèle l'ampleur de la catastrophe humanitaire sur le terrain.

Avant même l'intensification des combats, des années d'instabilité politique ont fait que le Soudan comptait plusieurs millions de personnes déplacées à l'intérieur du pays. Le pays a également accueilli 1,13 million de réfugiés en provenance d'autres pays en proie à des conflits, notamment le Soudan du Sud, l'Érythrée et la Syrie, selon les données du Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR).

La majorité des personnes déplacées ont fui Khartoum (69%). La plupart des personnes déplacées à l'intérieur de ce pays du nord-est de l'Afrique ont trouvé refuge dans les États du Darfour occidental (24%), du Nil blanc (20%), du Nil fluvial (16%) et du Nord (14%).

Selon OCHA, le nombre de personnes nouvellement déplacées en un peu plus de cinq semaines (du 15 avril au 23 mai) est comparable à celui enregistré pour l'ensemble des déplacements dans le pays entre 2020 et 2022.

Le HCR demande de garder ses frontières ouvertes

%

Selon le HCR, plus de 345.000 personnes (réfugiés soudanais et retournés de pays) ont traversé la frontière pour se rendre dans les pays voisins à la date du 26 mai.

La majorité des personnes ayant franchi la frontière se sont rendues en Égypte (170.000 personnes), suivie du Tchad (90.000), du Soudan du Sud (76.000), de la République centrafricaine (13.800) et de l'Éthiopie (5.600).

Cette mise à jour des mouvements de population intervient alors que le chef du HCR a conclu ce lundi une visite trois jours en Egypte. Le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, Filippo Grandi, a ainsi demandé aux pays voisins de Khartoum de garder les frontières ouvertes pour accueillir les réfugiés du Soudan voisin.

« Je lance un appel pour que les frontières restent ouvertes pour les personnes qui ont besoin de passer en Egypte et dans d'autres pays accueillant les personnes fuyant le Soudan », a dit M. Grandi, qui a réitéré son appel à une diplomatie urgente pour garantir une paix significative entre les deux factions belligérantes au Soudan, un passage sûr pour les civils dans le pays ainsi que l'entrée de l'aide humanitaire.

Plus de 170.000 personnes sont entrées en Égypte depuis le début du conflit, le 15 avril, souvent par Qoustul, un poste frontière que M. Grandi a visité vers la fin de son voyage. Le pays accueille environ la moitié des 345.000 personnes qui ont récemment fui le Soudan. Une fois enregistrés auprès du HCR, les réfugiés et les demandeurs d'asile ont accès à un large éventail de services, notamment dans les domaines de la santé et de l'éducation.

Au moins 38 attaques contre les soins de santé (OMS)

À la frontière, M. Grandi a rencontré des réfugiés nouvellement arrivés et les autorités frontalières égyptiennes.

« J'ai entendu des témoignages poignants : des pertes humaines et matérielles à grande échelle », a déclaré M. Grandi. « Les gens ont parlé de voyages risqués et coûteux pour arriver ici en sécurité. De nombreuses familles sont traumatisées et ont besoin de toute urgence de notre protection et de notre soutien ».

Le HCR a récemment publié le Plan d'intervention régional pour les réfugiés au Soudan, qui vise à mobiliser 470,4 millions de dollars pour soutenir les réfugiés, les rapatriés et les communautés d'accueil en Egypte, en République centrafricaine, au Tchad, en Ethiopie et au Soudan du Sud.

De son côté, l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) a indiqué qu'au moins 850 personnes ont été tuées depuis le 15 avril dernier, et environ 5.500 blessées dans tout le pays, selon des chiffres compilés par le ministère fédéral de la santé (FMoH), à la date du 23 mai.

L'OMS a également recensé au moins 38 attaques contre les soins de santé depuis le 15 avril, dont 22 contre des établissements de santé, 12 contre le personnel de santé, 9 contre des fournitures, 6 contre des entrepôts, 6 contre des moyens de transport et 3 contre des patients.

« Depuis la signature de la déclaration de Djedda le 11 mai, huit nouveaux rapports d'attaques ont été vérifiés », a également précisé l'OCHA.

Première distribution d'aide alimentaire du PAM à Khartoum

Les distributions d'aide alimentaire du Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations unies ont commencé samedi pour des milliers de personnes piégées dans la capitale soudanaise, Khartoum, depuis que les combats ont éclaté il y a six semaines.

Ces distributions interviennent dans les derniers jours du cessez-le-feu de sept jours conclu par les deux parties au conflit, qui doit expirer lundi soir et qui aurait été prorogé.

« Il s'agit d'une avancée majeure. Nous avons enfin pu aider les familles qui sont bloquées à Khartoum et qui luttent pour survivre chaque jour alors que la nourriture et les produits de base s'amenuisent », a déclaré dans un communiqué le Directeur national du PAM au Soudan, Eddie Rowe.

Le PAM a distribué une aide alimentaire à près de 12.500 personnes dans les zones contrôlées par les Forces armées soudanaises (SAF) et les Forces de soutien rapide (RSF) à Omdurman, qui fait partie de la région métropolitaine de Khartoum. Trois jours de distributions ont débuté samedi et sont les premières effectuées par le PAM dans la capitale depuis que les combats ont éclaté à Khartoum le 15 avril.

Le PAM étend rapidement la distribution de l'aide alimentaire d'urgence à travers le pays. Au cours du week-end, des distributions de nourriture et d'aliments ont également commencé à Wadi Halfa, dans l'État du Nord, pour environ 8.000 Soudanais qui ont fui Khartoum et entreprennent le long voyage vers l'Égypte. À la fin de la semaine dernière, le PAM a également commencé à distribuer des vivres à 4.000 personnes nouvellement déplacées à Port-Soudan.

13,6 millions d'enfants ont besoin d'aide humanitaire

Le PAM a rapidement augmenté son soutien au Soudan pour atteindre jusqu'à présent 675.000 personnes avec une aide alimentaire et nutritionnelle d'urgence dans 13 des 18 États du pays depuis la reprise des opérations il y a moins d'un mois, le 3 mai.

Par ailleurs, une aide alimentaire supplémentaire a été prépositionnée pour poursuivre les distributions à Khartoum aussi longtemps que la situation sécuritaire le permettra. Le PAM prévoit d'atteindre au moins 500.000 personnes à Khartoum.

Alors que le conflit au Soudan franchit le cap des six semaines, plus de 13,6 millions d'enfants ont un besoin urgent d'aide humanitaire, le chiffre le plus élevé jamais enregistré dans le pays, a souligné pour sa part le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF).

En raison du conflit, du chaos et de la négligence, les enfants du Soudan sont aujourd'hui plus nombreux que jamais à avoir besoin d'une aide vitale.

Le conflit, le chaos et la négligence s'avèrent mortels pour les enfants

« C'est plus que la population totale de la Suède, du Rwanda ou du Portugal. Tous les enfants. Et leur nombre ne cesse d'augmenter », a déclaré lors d'un point de presse, James Elder, porte-parole de l'UNICEF.

Six semaines seulement après le début des combats féroces, cinq millions d'enfants soudanais de plus qu'avant le conflit ont besoin d'aide

« Alors que le Soudan s'enfonce dans l'ombre, la vie des enfants se rapproche de plus en plus de l'abîme », a-t-il ajouté. Six semaines seulement après le début des combats féroces, cinq millions d'enfants soudanais de plus qu'avant le conflit ont besoin d'aide.

« Alors que les hôpitaux sont pillés, que les écoles sont bombardées et qu'une usine de produits nutritionnels est en flammes, l'espoir se transforme en cendres », a insisté M. Elder.

Selon les rapports que l'UNICEF a reçus, des centaines de filles et de garçons ont été tués.

« Et bien que nous ne soyons pas en mesure de confirmer les estimations en raison de l'intensité de la violence, ces rapports indiquent que des milliers d'autres ont été blessés », a souligné le porte-parole.

« Je m'excuse pour la dureté de mes propos, mais le temps est un luxe que les enfants du Soudan n'ont pas, et un langage délicat ne sert qu'à trahir leur réalité désespérée », a-t-il ajouté.

Sur le terrain et malgré les difficultés liées à l'accès à l'aide humanitaire et à la sécurité, près de 2.300 tonnes de fournitures pour la santé, la nutrition, l'eau et l'assainissement, l'apprentissage et la protection ont été livrées aux populations déplacées à Madani et dans le reste du pays.

L'UNICEF a également maintenu les services de vaccination dans 12 Etats, mais aussi 80% des centres de traitement de la malnutrition au Soudan pour les enfants souffrant d'émaciation sévère.

AllAfrica publie environ 400 articles par jour provenant de plus de 100 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.