Deux ans de prison ferme pour corruption de la jeunesse. C'est le verdict du procès de l'opposant Ousmane Sonko, rendu par la Justice sénégalaise, le 1er juin dernier, dans l'affaire Adji Sarr qui tient le Sénégal en haleine depuis deux ans.
La conséquence de cette condamnation est l'inéligibilité du leader du PASTEF à la présidentielle de février prochain, même s'il a été acquitté des faits de viol et de menaces de mort qui constituaient la plainte de la victime. En outre, l'opposant devra payer une amende de 600 000 F CFA. Le moins que l'on puisse dire, c'est que le jour de vérité s'est révélé sombre pour le leader du PASTEF qui se voit contraint de ranger au placard, ses ambitions présidentielles pour les échéances électorales de l'année prochaine.
Triste sort que celui de cette étoile montante de la classe politique sénégalaise qui rêvait de s'installer au palais présidentiel, mais dont les actes le conduisent finalement en prison. En tout cas, ainsi en ont décidé les juges qui l'ont estimé plutôt bon pour le cachot. Mais Ousmane Sonko ne peut s'en prendre qu'à lui-même.
Ce jugement est un verdict pour deux
Car, au-delà de la cabale politique dont il se dit victime, il n'a véritablement rien fait pour se défendre des graves accusations portées contre lui. Il aura plutôt passé son temps à faire le paon et à snober l'institution judiciaire aux convocations de laquelle il avait même décidé de ne plus répondre. Pendant ce temps, le parquet se donnait toutes les chances d'avoir son scalp par des réquisitions diversifiées dont l'une a été finalement fatale au jeune opposant.
Aujourd'hui, sa stratégie qui consistait à miser sur la mobilisation de la rue plutôt que de préparer conséquemment sa défense au prétoire, a montré toutes ses limites. Et ce verdict est loin d'être étonnant, même s'il était attendu avec anxiété par nombre de Sénégalais. Pour cause, le pays a été fortement secoué et mis sous pression avec cette affaire qui défraie la chronique depuis deux ans et dont on ne sait pas si ce verdict signera l'épilogue ; tant la sentence prononcée risque de continuer à affecter négativement le climat social au Sénégal.
En tout cas, l'on peut nourrir des craintes quant à la réaction des partisans de Sonko qui attendent de pied ferme, le président Macky Sall au détour des velléités de troisième mandat dont on lui prête l'intention. Toujours est-il que maintenant que les carottes semblent définitivement cuites pour Ousmane Sonko, il faut croire que ce jugement est un verdict pour deux. Autrement dit, tout porte à croire qu'en coulant dans cette affaire, l'insubmersible maire de Ziguinchor qui semblait rester à flot en réussissant à maintenir le suspense dans l'affaire de diffamation, emporte avec lui les velléités de troisième mandat du président Macky Sall.
Car, après une telle sentence sans appel, qui met pratiquement définitivement sur la touche celui qui se voulait son rival le plus sérieux, on ne voit pas comment le chef de l'Etat pourrait encore tomber le masque en confirmant sa candidature à un troisième mandat, sans déclencher un tsunami au sein des partisans de Ousmane Sonko qui ont toujours crié à la cabale politique contre leur leader.
Si le droit a été dit, le Sénégal n'est pas encore sorti de l'auberge des turbulences sociopolitiques qui menacent fortement sa stabilité
Et les conséquences d'une telle annonce seraient d'autant plus désastreuses pour le Sénégal qu'au-delà des partisans de Ousmane Sonko, c'est tout une coalition d'une centaine de partis politiques et d'organisations de la société civile qui est vent debout contre une éventuelle candidature du natif de Fatick à un troisième mandat.
C'est dire si en frappant Ousmane Sonko d'inéligibilité à la prochaine présidentielle, la Justice sénégalaise condamne presque du même coup, Macky Sall à la renonciation à son mandat de tous les dangers. En tout cas, ce serait un bien pour un mal, si la disqualification du candidat déjà déclaré, devait entraîner la renonciation du chef de l'Etat à une candidature qui n'augure rien d'autre qu'une véritable tempête tropicale qui fera couler plus que de l'encre et de la salive au pays de la Teranga. Le Sénégal n'a pas besoin de ça.
En tout état de cause, la balle est à présent dans le camp du président Macky Sall. Le chef de l'Etat sénégalais doit d'autant plus avoir le triomphe modeste qu'il se tromperait lourdement en croyant que cette éviction du jeune opposant, lui ouvre un boulevard, pour l'opérationnalisation d'un éventuel projet de troisième mandat. En tous les cas, si le droit a été dit, le Sénégal n'est pas encore sorti de l'auberge des turbulences sociopolitiques qui menacent fortement sa stabilité. Et la raison de cette montée de fièvre, est connue. Tout comme la thérapie qui n'est entre les mains de personne d'autre que celles du président. A lui de faire son choix. L'histoire le regarde.