La Direction générale des Impôts (DGI) a présenté, la semaine dernière, le nouvel imprimé du timbre de 200 F CFA. Peu avant, on voyait déjà circuler quelques spécimens floqués de certains symboles de la Nation sur la toile.
Toute chose que les uns et les autres avaient saluée, estimant que cela reflète notre identité. Mais à la question de savoir où sera imprimé ce nouveau timbre, on a senti de la gêne sur les visages des principaux animateurs du point de presse du 23 mai dernier ; eux qui, acculés par les journalistes, ont fini par lâcher le morceau. « L'impression sera faite en France en attendant... », ont-ils rétorqué.
Il n'en fallait pas plus pour que s'enflamme la toile. Pourquoi encore la France ? Se demandaient certains qui pensaient que, dans la conquête de sa souveraineté, le Burkina allait s'assumer en confiant l'impression du nouveau timbre à un national. On sentait le découragement même chez les inconditionnels soutiens du président Ibrahim Traoré qui, faut-il le rappeler, ne veulent ni voir ni entendre parler de la France qu'ils accusent à tort ou à raison, d'être à l'origine de tous nos malheurs. Ils n'ont peut-être pas tort.
Car, avant tout, notre pays a une expertise nationale qui mérite d'être valorisée. On ne peut pas chaque fois recourir aux experts étrangers alors qu'il y en a sur place qui sont à la hauteur, voire plus. Ayons confiance en nous-mêmes. C'est par là que commence l'émancipation. Cela dit, je tiens à faire observer que certains compatriotes, dans leur rejet de la France, semblent en faire un peu trop. Si fait qu'ils confondent la politique africaine de la France et les entreprises françaises. Ce sont deux choses très différentes.
Il faut que les uns et les autres sachent raison garder et qu'ils fassent parfois montre de retenue
Une entreprise française peut obtenir un marché au Faso, tout comme une société burkinabè peut avoir un marché en France. Je ne voudrais donc pas que le rejet de la politique africaine de la France, confine à la haine. Ne franchissons pas ce pas. Du reste, les autorités de la Transition n'ont jamais dit qu'elles ne coopéreraient plus avec la France.
Elles ont parlé plutôt de diversification de partenaires et non de rupture avec l'ex-puissance coloniale. La preuve, notre ambassade à Paris est toujours fonctionnelle tout comme l'est celle de la France à Ouaga. Parfois, je me moque éperdument quand j'entends dire qu'il faut complètement tourner le dos à la France. Car, ces mêmes gens, en anti-impérialistes revendiqués, acceptent que le Burkina s'acoquine avec d'autres puissances étrangères, oubliant qu'elles sont toutes pareilles. Elles ne défendent que leurs intérêts.
Et en plus, n'oublions pas que jusqu'à preuve du contraire, le français reste la langue officielle au Burkina. Or, le premier outil de domination d'un peuple passe par la langue en tant que véhicule de valeurs. Voyez-vous ? Il faut que les uns et les autres sachent raison garder et qu'ils fassent parfois montre de retenue. Cela dit, je voudrais que la France officielle tire leçon de tout ce qui lui arrive aujourd'hui.
Elle n'a qu'à s'en prendre à elle-même. Car, pendant des années, elle n'a eu de cesse d'opprimer ses colonies où elle faisait la pluie et le beau temps. Là voilà aujourd'hui groggy de ses propres turpitudes et rattrapée par son passé. Si elle veut reconquérir le coeur de ses anciennes colonies, elle se doit de changer de paradigme, notamment en abandonnant sa posture paternaliste qui consiste à vouloir donner des leçons aux autres en s'immixant dans leurs affaires internes. A défaut, elle ne fera que nourrir davantage le sentiment de rejet dont elle est victime.