Un total de 72 blessés en provenance du Soudan a été pris en charge à l'hôpital d'Adré, dans l'est tchadien, par Médecins Sans Frontières en partenariat avec les autorités sanitaires locales, tandis que les violences et combats se poursuivent au Darfour et dans d'autres régions du Soudan et que près d'une centaine de milliers de personnes ont déjà fui vers le Tchad.
« Des blessés sont d'abord arrivés au compte-goutte à partir de mi-mai, puis une cinquantaine ont afflué au cours des derniers jours » explique Christophe Garnier, coordinateur d'urgence de MSF. « La plupart ont été blessés par balle dans les affrontements et les attaques qui se déroulent au sud d'El Geneina à Masterei, une ville frontalière d'environ 80 000 habitants, dont de nombreux déplacés des villages environnants ».
Ces blessés atteignent la ville tchadienne de Goungour, située à une dizaine de kilomètres de Masterei, d'où ils sont ensuite référés par les équipes soignantes du ministère de la santé et de MSF vers l'hôpital d'Adré. Le plus jeune patient reçu a trois ans. Nombreux seraient ceux en état critique restés derrière, dans l'impossibilité de se déplacer vers le Tchad ou d'accéder à des soins médicaux au Darfour occidental, y compris dans la capitale El Geneina où les violences sont particulièrement intenses.
« Les réfugiés rapportent du Darfour occidental des scènes de violence très inquiétantes, des hommes armés qui tirent sur les personnes cherchant à fuir à pied, des villages pillés, et des blessés qui agonisent. Les hôpitaux sur place manquent de personnel, d'équipement et d'électricité pour fonctionner, lorsqu'ils n'ont pas été mis hors service par les destructions et pillages » s'alarme Christophe Garnier.
Travaillant à Adré depuis 2021, les équipes MSF sont mobilisées aux côtés des autorités sanitaires tchadiennes pour faire face aux besoins accrus des réfugiés soudanais et de la population qui les accueille. Dans les centres de santé d'Adré, Hilouta et Mahamata, appuyés par MSF, les consultations pédiatriques ont augmenté d'environ 40% la semaine dernière, une hausse en partie liée à l'arrivée de nouveaux réfugiés dans la zone.
Les équipes se déplacent également sur des sites où sont rassemblés les réfugiés, comme à Goungour, pour y proposer des consultations médicales et mènent des campagnes de vaccination pour protéger les enfants contre la rougeole. Plus de 30 000 enfants ont ainsi été vaccinés contre la rougeole dans les sites de Koufroun, Diza, Midjiguilta et Goungour. MSF répond également aux répercussions de la crise soudanaise dans la province du Sila.
« Avec l'entrée dans la saison des pluies, les conditions de vie déjà extrêmement précaires dans les camps de fortune vont empirer et la crue des cours d'eau compliquera les possibilités de mouvement et d'approvisionnement, s'inquiète Christophe Garnier. D'autant que cette période s'accompagne chaque année d'une très forte prévalence du paludisme et correspond aux mois les plus difficiles en termes d'insécurité alimentaire et de malnutrition infantile dans la région ».
La mise à l'arrêt des échanges, notamment commerciaux, avec El Geneina, poumon économique de la région, risque également d'aggraver la flambée du prix des denrées de base et l'insécurité alimentaire, dans une zone qui y est très exposée. La réponse aux besoins urgents des personnes qui ont récemment fui le Darfour doit également prendre en compte ceux des communautés locales et des quelque 400 000 réfugiés soudanais installés depuis plusieurs années au sein de camps surpeuplés et insalubres.