Ethiopie: Un «nettoyage ethnique» continue dans l'ouest du Tigré malgré l'accord de paix, selon HRW

Les forces de la région éthiopienne de l'Amhara poursuivent une campagne de « nettoyage ethnique » d'une partie du Tigré voisin sous leur contrôle, malgré la fin du conflit dans cette région du nord de l'Éthiopie, dénonce ce 1er juin 2023 Human Rights Watch (HRW). Explications de Laetitia Bader, directrice HRW pour la Corne de l'Afrique.

L'organisation Human Rights Watch a dénoncé ce 1er juin 2023, dans un rapport d'enquête, les campagnes de « nettoyage ethnique » menées par les forces armées de la région Amhara dans l'ouest du Tigré, et ce, même après la signature d'un accord de paix en novembre 2022.

« On a documenté deux vagues d'expulsions forcées de Tigréens »

Témoignages à l'appui, elle a documenté des expulsions forcées et des exécutions de prisonniers de Tigréens par des paramilitaires et des miliciens, dans cette région disputée, revendiquée par les régions Amhara et Tigré.

Ces crimes ont été commis au vu et au su des autorités fédérales, qui n'ont pas encore réagi à ces révélations, comme l'explique Laetitia Bader, directrice de Human Rights Watch pour la Corne de l'Afrique : « On a documenté deux vagues d'expulsions forcées de Tigréens, surtout des individus qui étaient en fait détenus dans des conditions terribles, purement dues au fait de leur identité en tant que Tigréens ; l'une, autour du moment de la trêve et une autre en début d'année ».

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Elle développe : « On a parlé à des dizaines de détenus qui avaient passé plus d'un an en détention, dans des conditions terribles. On a documenté des cas de torture, de représailles contre la population détenue dans laquelle des détenus avaient été exécutés par des gardes. Et ce que notre rapport prouve, c'est qu'au moins deux des individus qui avaient été clé dans cette campagne de nettoyage ethnique depuis le début de la guerre au Tigré sont encore dans des positions de pouvoir. On a soumis nos recherches et les trouvailles clé, et on n'a toujours pas eu de réponse ».

« Des centaines de milliers de Tigréens ont été expulsés »

Cette campagne, affirme la directrice de HRW pour la Corne de l'Afrique, est encore en cours et les victimes déplacées sont toujours en danger. « Il est très difficile de savoir quelle était la population tigréenne au début du conflit, mais on sait que des centaines de milliers de Tigréens ont été expulsés, poursuit-elle. Ce qu'on a vu dans nos recherches plus récentes, c'est que les Tigréens qui étaient encore dans le Tigré de l'Ouest, c'étaient soit des Tigréens qui étaient mélangés, donc qui n'étaient pas complètement Tigréens, ou qui avaient réussi à passer pour une autre ethnie. Mais en fait, une fois que leur identité a été révélée, ils ont été expulsés par la force ».

Laetitia Bader conclut : « Notre préoccupation concerne non seulement les Tigréens qui pourraient demeurer dans cette région, mais aussi, bien sûr, les centaines de milliers qui ont été expulsés par la force de cette région et qui sont maintenant dans d'autres parties du Tigré où, actuellement, l'assistance humanitaire a été restreinte, et notamment la distribution de nourriture qui depuis quelques semaines a été arrêtée dans d'autres parties du Tigré, où ces victimes de cette campagne de nettoyage ethnique demeurent actuellement. » La guerre dans le Tigré (novembre 2020-novembre 2022) aurait fait « environ 600 000 morts », selon un bilan avancé en janvier 2023 par le médiateur de l'Union africaine (UA), l'ancien président nigérian Olusegun Obasanjo.

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