Madagascar: Littérature - Un demi-siècle du parcours contemporain de « Dinitra »

Georges Andriamanantena, Rado pour sa plume de poète, aurait 100 ans cette année, son ouvrage « Dinitra » a, en parallèle, atteint le demi-siècle. Ce centenaire a été récemment célébré. L'occasion de retrouver son premier recueil « Dinitra » (1973), rock, effronté, amoureux, romantique, révolté...

En 1973, Georges Andriamanantena (1923-2008) avait 50 ans. A 50 ans, il sort son premier recueil. « Dinitra », une oeuvre magnifique. Habitée d'un réalisme humain et politique qui ne se retrouvera que très rarement, un demi-siècle plus tard, dans l'expression artistique actuelle. Trop pressée à ressusciter l'idéologie créatrice occidentale. Pourtant, la matière, la réalité en somme, se trouve aux bouts de leurs bras, de leurs regards chez la génération d'artistes actuelle.

Peu ont réussi à emprunter la voie de « Dinitra ». Sa puissance contemporaine, sa foi en ses idées, son intelligence créative, sa manière de dégager la personnalité de l'auteur Georges Andriamanantena, ses plis émotifs... D'ailleurs, il a suffi à quelques artistes d'aujourd'hui de mettre des mélodies à ses poésies pour en faire des chansons cultes. 1973 a été une année de toutes les attentes, tout en étant un virage dont l'issue était encore un pile ou face.

Madagascar, mais une « civilisation » séculaire, se regardait de l'extérieur comme une république jeune. Mai 72 et toute une jeunesse déboussolée par cette indépendance douce-amère. Dont la plupart n'a pas tenu les armes face aux colons entre 1895, 1947 et jusqu'en 1948. Mais a été bercée par les légendes, les témoignages, les séquelles psychologiques des parents, des aînés qui ont vécu la guerre contre les armées de répressions coloniales, les exactions... Bref, la fraîcheur du sang versé.

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« Gasikarako » titrait-il sur une poésie en quatrain dans le recueil « Dinitra ». Qui avait ainsi la particularité de dessiner les tracées d'une vision de continuité pour Madagascar. Comme pour dire que malgré tout, la « malgachéité » était intacte. Le poète y inscrivait le droit naturel au patriotisme comme la plus noble des valeurs humaines. La pudeur des rimes plates permettait de laisser tonner l'âme d'un amour de « la terre des ancêtres », infaillible.

Cette musicalité des formes et des contenus est probablement chère à Rado. Il pouvait toutefois prendre des bifurcations à sa guise. Puisque l'amour donne sûrement des ailes. Rien qu'à voir son art à libérer sa plume dans « Iny » (Dinitra, p29). Devenue une poésie culte, « Sambatra iny lalana iny/Lalovanao marain-tsy hariva/Ary angamba noho izany/No hanirian'ny voninkazo... ». D'une espièglerie, sur un jeu de personnification/projection, à tomber par terre.

D'une lecture contemporaine, il comprenait déjà que ce soit en 1973 ou en 1923, l'intellect des damoiselles, pour aborder leur triangle émotif, a besoin d'être surpris, d'être amusé. Dans « Ady » (p 56), le poids du quotidien pèse sur ses vers. Un tableau romantique, à préciser, sans incitation victimaire. Rado versifie pour les accablés et les dépouillés de la violence du système marchand. Des zombies, le sommeil les manque, signale-t-il en troisième strophe, condamnés à vivre l'« Ady ».

« Dinitra » rassemble plus de trente ans de poésies de Georges Andriamanantena. De tous les styles, de toutes les émotions... La « malgachéité » intacte, une base afin de se renouveler. Une inspiration pour des générations. Avec « Boboka », aussi génial qu'introspectif pour ceux ou celles qui n'ont de cesse de répéter que Madagascar est un pays perdu à jamais. Les « Etsy matorià », « Ekeko », « Iny zanako iny », « Avela », par les temps qui courent en Afrique cela lui aurait valu d'être fiché pour incitation à la rébellion dans une dictature...

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