Madagascar: Région - Régionalisation ou régionalisme ?

Régionalisation : transfert aux Régions de compétences qui appartenaient au pouvoir central

Régionalisme : mouvement ou doctrine affirmant l'existence d'entités régionales et revendiquant leur reconnaissance

La création des Régions, en avril 2007, était supposée «répondre à des critères d'homogénéité géographique, économique, sociale et culturelle». La même Constitution de 2007 prévoyait en son article 135 la création d'un «fonds spécial de solidarité», sur la base d'une «péréquation» entre des Régions qu'on savait inégalement développées.

Je ne sais pas si la création d'une Région réunissant Maroantsetra et Mananara répondrait à ces critères. La vraie question demeure cependant celle de l'effectivité de la décentralisation : 22 ou 23 voire 24 Régions ne serviraient qu'à multiplier les postes à pourvoir, et donc agrandir la clientèle politique, tant que l'autonomie des collectivités décentralisées demeure une incantation.

Depuis 2007 donc, on pratique les «Régions» ; en 1998, on avait expérimenté les «Provinces autonomes»; en 1957, on avait failli adopter le fédéralisme.

Sauf que le fédéralisme a été fortement péjoré par les événements de 1991 et de 2002 : quand un régime aux abois entreprit de dresser cinq provinces contre celle dite d'Antananarivo, en brandissant un mot qui ne voulait de mal à personne. « Malgachisation » et « fédéralisme » partagent le même opprobre aux yeux de l'opinion. Pourtant, l'usage de la langue maternelle est admis par l'UNESCO comme une clé fondamentale du développement de l'enfant, nonobstant les maladresses d'application du principe à Madagascar. De son côté, le fédéralisme est une technique juridique et administrative qui organise des pays aussi stables que les États-Unis, la Suisse ou l'Allemagne, et c'est seulement à Madagascar que son concept avait été dévoyé par la politique politicienne.

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Le fédéralisme fut sérieusement envisagé à la veille du 14 octobre 1958. Les péripéties juridico-politiques en sont relatées dans « L'administration publique à Madagascar: évolution de l'organisation administrative et territoriale de Madagascar de 1896 à la proclamation de la République malgache » (Michel Massiot, Paris, LGDJ, 1971). En 1949, le Haut-Commissaire de Chevigné avait réfléchi à la création de cinq territoires autonomes sur des critères moins économiques et plus ethniques: le Territoire Merina ou Gouvernement de l'Emyrne (chef-lieu Tananarive), le Territoire Betsileo (chef-lieu Fianarantsoa), le Gouvernement du Sud (chef-lieu Tuléar), le Territoire Sakalava ou Gouvernement de l'Ouest (chef-lieu Majunga), le Gouvernement de l'Est (chef-lieu Tamatave).

En mai 1957, devant l'Assemblée provinciale de Fianarantsoa, Gaston Defferre, l'auteur de la loi-cadre, rappelait : « Si les institutions créées pour la Grande Ile tenaient compte de l'indéniable unité du Territoire et de la solidarité de ses différentes régions, elles faisaient également une très large place à la personnalité des provinces ». Ce sont ces mêmes mots d'unité, de solidarité, de personnalité, qu'il nous faudrait revisiter sans angélisme ni diabolisation.

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