Afrique Centrale: People - Les « Grands prêtres » au cœur de la musique congolaise

Dans la culture populaire des deux Congo, l'expression "Grand prêtre" est couramment utilisée pour désigner ces mécènes qui apportent un soutien conséquent à une industrie culturelle très peu structurée. Découvrons ces acteurs et leur impact dans l'industrie culturelle en général et musicale en particulier.

Les noms de certaines personnalités se sont ancrés dans le subconscient collectif du public congolais à la suite d'un martelage redondant. Il est parfois difficile de mettre des visages sur ces noms qui, pourtant, jouissent d'une indiscutable notoriété.

Le phénomène dit "Mabanga" ou dédicaces est à l'origine de la notoriété de ces mécènes, couramment appelés "Grands prêtres", dans l'écosystème musical congolais. Cette pratique qui tire ses origines intrinsèques des traditions séculaires des peuples bantous s'est développée simultanément que le genre musical qui l'a portée.

C'est donc au coeur la rumba congolaise que les "Mabanga" ont contribué à façonner l'image de marque des "Grands prêtres", expression due à l'artiste musicien Koffi Olomide. Il est, en effet, le premier musicien à l'utiliser dans une dédicace à l'endroit de Simon Mbongo, lors d'un concert à Paris, au début des années 1990.

S'inspirant du modèle proposé par Koffi Olomide, l'ensemble des musiciens, qui parfois gravitent autour des mêmes mécènes, s'appliquent à proposer la meilleure dédicace en vue d'en tirer le meilleur fruit. C'est ainsi que, débordant d'imagination créative, les musiciens s'emploient à développer des dédicaces loties d'épithètes et d'attributs clairement destinés à flatter l'égo du « Grand prêtre ».

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Il en découle que les mélomanes se familiarisent avec des noms tels que Didi Kinuani, « mossombi monene ya mabanga » (qui se traduit littéralement par « Grand acheteur de pierres précieuses ») ; Adam Bombolé le grand Saoudien, « l'homme qui affronte la conjoncture, que ce soit la hausse ou la baisse du dollar » ; Willy Etoka, « le dragon de la monnaie » ; Paul Malié, « Petit-frère ya Jésus » (comprenez « le petit-frère du Christ », donc le sauveur) ; etc.

Le phénomène « Mabanga », qui s'apparentait à ses débuts à une forme d'émulation ou encore une marque de reconnaissance, apparaît très rapidement comme une source de revenus sûre. Cette pratique qui suscite des réactions ambivalentes auprès des mélomanes de la musique congolaise ne risque cependant pas d'être abandonnée de sitôt. Et pour cause, elle a permis d'ériger les « Grands prêtres » en grands pourvoyeurs pour des artistes qui peinent à vivre décemment de leur art.

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