Afrique: Mondial 1974 - Histoire d'une déconvenue africaine

Troisième nation africaine après l'Egypte et le Maroc et première d'Afrique subsaharienne à participer à une phase finale de la Coupe du monde, le Zaïre (ancienne appellation de la République démocratique du Congo -RDC) écrira la page la plus sombre de l'histoire de son football au cours de l'édition 1974 de la prestigieuse compétition. Retour sur le parcours des Léopards et les circonstances qui ont conduit à cette déconvenue qui a tant marqué les esprits.

Après 46 ans d'existence et dix éditions, la Coupe du monde de football voit enfin la participation d'une nation d'Afrique subsaharienne. Les léopards du Zaïre, sous la conduite de Blagoja Vidinic, ont la lourde charge de représenter le continent africain en leur qualité de champions, dans cette compétition qui à l'époque ne compte que seize participants, avec un seul billet pour l'Afrique.

La qualification du Zaïre n'est pas fortuite. Elle porte, en effet, le sceau d'énormes investissements consentis par son président de l'époque, Mobutu Sese Séko, qui utilise le sport comme instrument de récupération politique, depuis son accession au pouvoir. Cette même année 1974, il organise à Kinshasa, la capitale, le mythique combat de boxe du XXe siècle opposant Mohammed Ali à George Foreman, événement qui attira 60 000 spectateurs au stade Tata Raphaël, avec un total de 60% de la population mondiale téléspectatrice.

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Avec une équipe composée de joueurs amateurs, le Zaïre est logé dans un groupe 2 qui ne facilite rien puisqu'il se retrouve en face du Brésil, champion du monde en titre, de la Yougoslavie et de l'Ecosse, deux équipes fortement expérimentées. C'est dans ce contexte que les Léopards perdent leur première rencontre face à l'Ecosse lors de leur entrée en lice, le 14 juin 1974, sur un score de deux buts à zéro.

Avant la prochaine échéance face à la Yougoslavie, un vieux problème resurgit et rattrape l'équipe. Les joueurs n'ont toujours pas perçu leur prime de qualification. Dans l'optique où ces derniers sont presque tous des joueurs amateurs, il s'agit là donc de leur seule source de revenus.

Bien que la Fédération internationale de football association ait déjà versé la somme due à la Fédération zaïroise, celle-ci ne l'a toujours pas redistribuée aux joueurs. Situation analogue à celle précédemment vécue lors de leur victoire récente à la Coupe d'Afrique des nations (CAN). Cette fois-ci, la fédération et le staff auront droit à des représailles en signe de protestation.

Le 18 juin 1974, lors de la rencontre face à la Yougoslavie, les Léopards se laissèrent littéralement démolir. A la demi-heure de jeu, ils étaient déjà menés par 5-0. Le changement de gardien n'y fit rien. Le match se solda par une défaite cinglante (9-0) qui compte parmi les plus larges humiliations de l'histoire du football.

Pour Mobutu, la déroute fut totale. Il proféra alors la menace qu'aucun joueur ni membre du staff ne devraient regagner le pays dans le cas d'une défaite face au Brésil, par un écart supérieur ou égal à 4 buts. Les Léopards purent limiter la casse, la peur au ventre, en ne perdant que par 3-0 face aux champions du monde en titre. Le haut fait de cette rencontre illustrant la panique zaïroise fut le dégagement de Mwepu Ilunga sur un coup-franc brésilien, tandis que l'arbitre venait tout juste de relancer le jeu.

De retour au pays, personne ne vint les accueillir à l'aéroport. Ils sombrèrent dans l'oubli le plus total. L'image du Zaïre fortement écornée par cette déconvenue, Mobutu cessera par la suite tous les investissements majeurs dans le sport. Ce n'est qu'en 2011, trente-sept ans après le succès en Coupe d'Afrique, que l'Etat verse enfin une prime de 500 dollars américains par mois aux derniers vainqueurs de la CAN.

Les raisons qui ont conduit à cette déconvenue des Léopards à la Coupe du monde de 1974 sont encore légion de nos jours, non seulement en RDC, mais également dans de nombreux autres pays africains, créant au passage des frictions parmi les acteurs de premier plan du football, ce qui constitue en soi un véritable frein au développement de cette discipline sportive en particulier et du sport en général.

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