C'est vrai, le contexte mondial actuel n'épargne aucune économie en ce qui concerne le renchérissement des prix. Les fortunes sont diverses pour les populations.
D'une contrée à une autre, les réalités sont plus ou moins différentes pour les couches défavorisées.
En Côte d'Ivoire, on assiste à une transformation de la société. Un phénomène social qui semble passer sous silence. Mais qui, pourtant, mérite que l'on s'y attarde quelque peu : les pauvres ne sont pas si pauvres.
Une affirmation qui est loin d'être une vue d'esprit. Les faits sont parlants. Ils tiennent à quelques indicateurs que tout le monde peut vérifier.
Dans nos quartiers, aujourd'hui, chaque maison a, au moins, un poste téléviseur couleur, un réfrigérateur et un ventilateur. Les abonnements aux chaînes cryptées font place aux branchements frauduleux. Bien des foyers modestes sont au split désormais.
Une réalité qui touche les zones rurales. Dans le village de Yacolidabouo, par exemple, dans la région de Soubré, les planteurs n'ont rien à envier aux citadins. D'abord, les cases sont progressivement remplacées par un habitat de plus en plus moderne. Ensuite, les infrastructures de loisirs et de plaisir cohabitent avec les traditionnels cabarets.
Enfin, les paysans vivent dans un relatif confort. Ce, avec l'appui combiné du Programme national d'électrification rurale (Proner) lancé en 2014 et du Programme électricité pour tous (Pept) permettant aux couches défavorisées de se raccorder avec seulement un apport initial de 1000 F Cfa. Les pauvres ne sont pas si pauvres.
L'autre facteur montrant bien le changement des habitudes, l'école. Les écoles privées font école. Auparavant, réservée à une classe dite supérieure, les écoles privées foisonnent.
L'éducation fait partie des postes les plus « lourds » du budget familial. Il y a quelques années, il fallait se lever à 3h du matin pour aller faire inscrire son enfant au Cours préparatoire première année (Cp1). C'est un vieux souvenir.
A coup de communiqués et de rappels, le gouvernement invite les parents à aller inscrire leurs enfants à l'école publique. Beaucoup d'enfants, malgré le niveau de revenu de leurs parents, vont dans des écoles privées.
Côté alimentation, les choses bougent. Les habitudes changent au bas de l'échelle sociale ivoirienne. Vous pouvez vous en rendre compte. Il suffit de sillonner les grandes surfaces. Là, l'on peut voir des enfants se procurer un pot de « dêguê » à 1200 ou 1000 F Cfa (selon les magasins).
Prendre son « dêguê » au supermarché alors qu'il n'y a pas longtemps, ce n'était qu'au coin de la rue dans le quartier que cet aliment à la louche était servi. Les pauvres ne sont pas si pauvres.
Justement, parlant de grandes surfaces, combien sont-elles à ce jour ? Abidjan ne comptait que deux grands espaces commerciaux. Monoprix, près de la gare sud de la Sotra et Score, non loin de l'hôtel de ville, au Plateau. Aujourd'hui, les centres commerciaux poussent dans chaque quartier. Des succursales voient le jour pour se rapprocher des populations.
La demande est telle que les horaires ont changé. Si les grands centres fonctionnent de 7h30 à 21 heures, leurs relais vont jusqu'à 23 heures, voire même 00h. Certains font du non-stop, 24 heures sur 24.
Dans ces boutiques modernes, ce sont les petits portefeuilles qui sont visés. Une des multinationales a bien compris qu'il faut aller capter la demande dans les petits quartiers.
A Koumassi, c'est avec joie que les populations parcourent, surtout à la tombée de la nuit, les rayons de ces magasins. Le marché, ce n'est plus seulement sur les étals traditionnels, dans la chaleur et le bruit. « C'est aussi le plaisir de faire ses emplettes en famille comme on le voit dans des films », confiait un couple. Les pauvres ne sont pas si pauvres.
En réalité, le pays, la Côte d'Ivoire, bouge. La demande de consommation est forte. Une consommation tirée par une classe moyenne de plus en plus forte. De plus en plus exigeante en matière de qualité de vie. Si au sommet de la société ivoirienne, l'on peut constater des dépenses ostentatoires, il n'en demeure pas moins que l'Ivoirien moyen se donne les moyens d'avoir une vie normale.
Le Salaire minimum interprofessionnel (Smig) a été bonifié à 75 000 F Cfa. Le gouvernement ne s'est pas arrêté là. Pour les ménages les plus défavorisés, un transfert social leur a permis de sortir de la zone rouge. Il faut se rendre à l'évidence.
L'Ivoirien modeste ne vit pas que de son salaire. Le salaire reste insuffisant pour accomplir tout ce qui a été dit plus haut. Il faut aujourd'hui parler de revenu. Bien des salariés ont bien compris qu'il faut multiplier les gains à la fin du mois. Pas forcément en jouant à la loterie. Mais en développant d'autres initiatives. Elles sont permanentes ou saisonnières.
Associant, dans des cas, le conjoint. C'est ainsi que le congélateur, géré par l'épouse à la maison, sert à vendre des jus de fruits, de l'eau en sachet, de la glace. On peut citer aussi le petit commerce en ligne, sans taxe, ni loyer de magasin, la cabine de téléphone, la petite table de marchandises diverses...
Occasionnellement, la confection de paniers durant le mois de Ramadan, la vente de moutons pour la Tabaski, la location de platine, de chaises et couverts pour diverses cérémonies sont, entre autres, autant d'activités qui permettent d'arrondir efficacement les fins de mois.
La Côte d'Ivoire change. Les conditions de vie des Ivoiriens s'améliorent. Les difficultés ? La population, avec l'appui de l'État, se donne les armes de les affronter. Ça va quand même au pays.