Au Sénégal, la chaîne de télé Walf TV est suspendue pendant 30 jours, jusqu'au 1er juillet. Le ministère de la Communication reproche à la chaîne d'avoir couvert les heurts entre manifestants et forces de sécurité après la condamnation de l'opposant Ousmane Sonko à deux ans de prison ferme pour corruption de la jeunesse. La direction de la chaîne et les organisations de journalistes s'inquiètent.
La diffusion était suspendue depuis jeudi 1er juin, mais selon la chaîne, la notification n'est arrivée que 8 jours plus tard. Le groupe Wal Fadjri a annoncé qu'une grande partie de ses salariés seraient mis au chômage technique : « C'est, c'est un gros préjudice au niveau des finances parce que Wal Fadjri, avant d'être un groupe de presse, est une entreprise tout court, avec des salaires fixes », alerte Moustapha Diop, directeur de Walf TV.
C'est une décision du ministère de la Communication qui dénonce « la diffusion d'images de violences exposant des mineurs, accompagnées de propos subversifs et haineux portant atteinte à la stabilité de l'État » qui a mené à la suspension. Le 1er juin, la chaîne avait couvert les heurts entre manifestants et forces de sécurité après la condamnation de l'opposant Ousmane Sonko à deux ans de prison ferme pour « corruption de la jeunesse ». En tout cas, cette suspension fait craindre pour la liberté de la presse dans le pays : « Dans tous les pays du monde, en tout cas dans toutes les démocraties du monde, quand il y a des événements, les journalistes, ils montrent ces événements-là, ils en font les commentaires », ajoute-t-il.
Cagnotte
Des internautes ont rapidement mis en place une cagnotte en ligne sur la plateforme d'envoi d'argent Wave pour soutenir Walf TV. Mais samedi matin 10 juin, Wave va annoncer que l'État lui avait demandé de suspendre les paiements vers Wal Fadjri. La chaîne a déjà été suspendue 7 jours en février et son chroniqueur Pape Ndiaye est sous mandat de dépôt depuis mars pour diffusion de fausses nouvelles, entre autres.
Cette nouvelle suspension est difficile à comprendre pour Ibrahima Lissa Faye, de la coordination des associations de presse : « Une injonction aurait pu suffire, ou bien même un rappel à l'ordre, cela prouve encore l'acharnement contre ce groupe de presse-là et c'est une volonté vraiment de tuer ce groupe de presse. Et ce qui est sûr, c'est que d'autres médias vont suivre, comme d'autres journalistes, qui vont aller en prison ».
On ne peut plus parler d'État de droit
Le groupe prévoit de lancer des procédures judiciaires et des manifestations de soutien.
#NouvellePhotoDeProfil pic.twitter.com/scW4ZeWBbi-- Ibrahima Lissa FAYE (@fayiboul) June 10, 2023