La note de la dette tunisienne n'était pas brillante, voilà que Fitch l'abaisse d'un cran à CCC-. La Tunisie figurait déjà dans la liste des émetteurs présentant un risque réel de ne pas pouvoir rembourser, selon l'agence américaine. Cette nouvelle dégradation est donc le signe d'une méfiance grandissante. La raison : la durée des négociations avec le Fonds monétaire international.
Fitch s'inquiète de la capacité de la Tunisie « à réunir les fonds pour répondre à ses besoins financiers conséquents ». Des besoins qui en rapport du PIB ont largement augmenté par rapport à la période 2015-2019.
Le budget du pays dépend de plus de 5 milliards de dollars de fonds externes, l'équivalent de 10% du PIB. Or, au moins une partie de ces fonds ne seront pas débloqués tant qu'il n'y aura pas d'accord avec le FMI. Cet accord, Fitch pense qu'il pourrait, certes, intervenir d'ici à la fin de l'année, soit beaucoup plus tard qu'espéré.
Les discussions entre Tunis et le Fonds monétaire pour un nouveau prêt de deux milliards de dollars sont ardues. L'institution de Washington demande la restructuration d'une centaine d'entreprises publiques très endettées et la levée de subventions sur certains produits de base. Kaïs Saïed s'y refuse. Le président tunisien a proposé, pour ne pas se soumettre « aux diktats étrangers », une nouvelle taxe ciblant les plus riches.
Faute de cet accord avec le FMI, Fitch estime que seulement la moitié des 5 milliards de dollars de financement extérieurs nécessaires à la Tunisie seraient débloqués cette année.
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, doit se rendre ce dimanche en Tunisie avec les dirigeants de l'Italie et des Pays-Bas. Une visite centrée sur l'économie et les questions migratoires.
Trois dirigeants européens à Tunis Avec notre correspondant à Bruxelles, Pierre Benazet
Ce dimanche à Tunis, trois dirigeants européens - Italie, Pays-Bas et Commission - se rendent en délégation officielle pour rencontrer le président Kaïs Saïed. La Première ministre italienne s'est déjà rendue en Tunisie mardi dernier et y retourne, accompagnée de Mark Rutte et Ursula von der Leyen. Ils vont parler énergie, économie et migrations - à l'heure où le prêt de 2 milliards de dollars consenti par le Fonds monétaire international en octobre est toujours dans l'impasse.
Le voyage de la Première ministre italienne à Tunis mardi semble avoir permis d'obtenir du président Kaïs Saïed des pistes pour désamorcer les tensions avec le Fonds monétaire international ou du moins d'identifier les chapitres sur lesquels il serait possible de trouver des concessions. Ce retour accompagné de deux poids lourds de la scène politique européenne en renfort ressemble à une offensive de charme, d'autant que Giorgia Meloni, Mark Rutte et Ursula von der Leyen vont proposer à la Tunisie un accord de coopération sur l'énergie, l'économie et les migrations.
Pour Eric Mamer, porte-parole de la Commission européenne, il y a un signe d'un « dialogue constructif ». « Le fait que la présidente de la Commission se rende en Tunisie accompagnée de ces deux chefs de gouvernement est en soi le signe qu'il y a un dialogue constructif qui est en cours avec les autorités. Attention, je n'ai pas dit qu'il y aurait conclusion d'un accord pendant ce voyage, j'ai dit que les discussions sur un accord seraient au centre de ce déplacement », explique Eric Mamer.
Politiquement, l'accord de coopération que font miroiter les trois dirigeants européens paraît taillé sur mesure pour faire avaler la pilule des concessions demandées à la Tunisie par le Fonds monétaire international.